Cœur de cristal

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Le fleuve des sentiments.

Bougival, petite ville charmante de l’agglomération parisienne, rayonne de douceur par son côté provincial, les berges de la Seine caressent les bords de ses rues et nous rappellent à chaque instant que la capitale des arts et lumières est toute proche. Un jeune homme à l’allure séduisante et fière se dirige d’un pas rapide vers un immeuble à l’architecture contemporaine. Une jeune femme charmante et rêveuse, accoudée à son balcon, contemple le magnifique parc qui entoure sa résidence.

La sonnette retentit plusieurs fois, notre belle se dirige vers la porte et laisse entrer son visiteur l’accueillant d’un petit baiser de bienvenue.

- Bonjour ma chérie, quelle journée éprouvante, si tu savais !

- Bonjour Julien, oui, je vois ça, tu m'as l'air fatigué et tristounet ! Que t'arrive-t-il ?

- Ce matin, dans un café, j’ai rencontré un ancien collègue de bureau, il était de passage dans le quartier. Dans la boîte il était doué et volontaire, puis il y a deux mois il a démissionné pour s’envoler vers un avenir professionnel plus radieux.

On a discuté autour d’un verre un peu de tout et de rien, puis sans que je m’y attende, il m’a flingué la journée.

- Ah bon ! Au sujet de quoi, Julien ?

Juste d’y repenser ça me bouleverse, il m’a ouvert les yeux sur quelque chose que je ne voulais pas voir. J’ai toujours aimé la sincérité chez lui, mais là ! Il a abusé.

- Qu’est-ce qu’il t'a dit pour te mettre dans un état pareil ? Un problème au travail ? Une maladie ?

- Tu sais, quelque fois, entendre certaines vérités, ce n’est pas toujours un cadeau, elles sont comparables à des épées qui nous transpercent le cœur et nous enflamment l’esprit de démons. Aujourd’hui dans ma tête, j’ai des feux qui me brûlent de douleur, des feux qui se contredisent et je ne sais pas comment les éteindre…

- Tu m’inquiètes Julien. Qu’est-ce qu’il t'a dit ? Dis-le-moi s’il te plaît !

- C’est trop difficile, les mots ne pourront pas sortir de ma bouche, j’espère que tu me comprends.

Emma est surprise de voir julien dans un tel état de mélancolie, lui si fort moralement, toujours partant pour prendre des risques inconsidérés, elle ne le reconnaît plus.

- Je comprends, je respecte tes émotions, mais je suis mal à l’aise de te voir dans un tel désarroi.

Julien perçoit bien le trouble qu’il provoque en elle, mais il lui est impossible d’exprimer la moindre explication, sans prendre le risque, lui-même, de chuter vers un abîme de souffrance…

- Merci tu es mignonne, ne te préoccupe pas pour moi, ça passera, du moins, je l’espère, je m’accroche…

Emma reste dubitative devant tant de non-dits et surtout très angoissée de ne pas savoir ce qui le tourmente autant.

- J‘ai vraiment besoin de me changer les idées, après un petit dîner en tête à tête, j’aimerais te faire plaisir et t’emmener au théâtre ce soir.

Emma est surprise de l’invitation et son comportement la perturbe énormément : Sa morosité, son empathie, le ton de sa voix inhabituel bousculent sa propre sensibilité.

- Je suis partante pour ce soir, ça nous fera le plus grand bien à tous les deux.

Nos deux amants arrivèrent dans une petite ruelle et s’arrêtèrent devant un petit théâtre légèrement éclairé. Le charme fou de la façade lui donne un petit cachet shakespearien à tel point qu’il provoque chez les passants un désir mystérieux de découvrir l’intérieur.

Assis confortablement dans des fauteuils de velours, le rideau se lève sur une petite scène au décor simple et raffiné. La magie débute pour transporter nos deux amoureux vers plusieurs petites scènes de vie.

Le cœur d’un autre.

L’amour d’une mère.

Le père Noël aux yeux mouillés.

Le chant de la haine.

Le fleuve des sentiments.

Emma reste complétement envoûtée devant la prestation des comédiens qui défilent devant ses yeux. Ils réveillent en elle, dans les profondeurs de son âme, un tourbillon de joie et de tristesse. Cet instant rare où une mystérieuse alchimie prend entièrement possession de notre corps et bouleverse délicieusement les plus petites cellules de notre être.

Julien chuchote à son oreille « J’espère que ça te plaît ma chérie, j’adore le titre de la dernière scène, je t’aime mon amour. »

Elle lui lance un doux regard, un mélange de surprise et de désir.

Le rideau se lève pour la dernière représentation de la soirée :

Le fleuve des sentiments.

Acte 1 : Alexandre un jeune homme élégant et raffiné entre sur scène.

Il a trente-cinq ans. Cadre supérieur, astrophysicien dans une grande entreprise de l’aérospatiale, donne beaucoup de son temps pour faire évoluer sa carrière au travers de projets novateurs.

« Ce soir, je suis trop content, je reçois ma plus belle conquête, je vais lui sortir le grand jeu habituel, préparer un petit repas aux chandelles, rien d’innovant, un classique, qui les fait toutes craquer.

Après avoir balayé cet instant poétique, les choses sérieuses commenceront, je reprendrai la situation en main, de manière à lui préparer une nuit torride et chaleureuse sous les draps.

Cette fille je l’ai rencontrée à l’anniversaire de mon pote d’enfance qui est devenu professeur de mathématiques à l’université. Il avait invité la plupart de ses collègues de travail dont une très jolie femme nommée Vanessa qui avait attiré toute mon attention. Au début, elle ne me captait pas trop. Pour la séduire, j’ai sorti l’artillerie lourde, inexpérimenté dans le domaine, j’avais étudié en prévision d’une belle rencontre plusieurs revues et manuels du parfait séducteur. Personnellement, ce n’est pas trop mon truc, je suis plus accro aux jeux vidéo et boire une bière avec mes potes devant un match de la ligue 1. N’étant pas très fleur bleue, j’avais besoin d’aide.

Comme un bon élève, j’ai appliqué mes leçons par petites touches, j’ai suivi les recettes d’approches : je la frôlais à plusieurs reprises, en m’excusant avec un grand sourire, dans le seul but de me faire remarquer. Dès que j’ai senti l’accroche, j’ai ferré avec la formule magique du « loveur », la phrase qui ouvre toutes les portes de l’invitation mutuelle : « Décidément, le hasard fait bien les choses, il me ramène toujours vers la plus ravissante des étoiles. »

Elle me sourit ! Bingo ! J’avais entrouvert la première fenêtre de son cœur. Le sourire est le premier rayon de lumière qui nous indique la direction à prendre, donc, je continuais sur le même chemin.

« Un verre, ça vous dit ? Pour remercier ce merveilleux hasard de nous avoir emmené vers le même univers. »

Elle me sourit pour la seconde fois et là, sans aucune hésitation, je courais expressément lui chercher cette boisson enivrante et pétillante, cet ambassadeur du luxe français au goût festif et plein de gaité.

Ce jour-là fut notre premier contact, notre premier baiser de cristal, notre premier “tchin tchin”.

Déjà un an que nous sommes ensemble, chacun vit de son côté et nous nous retrouvons souvent pour des soirées et des nuits endiablées de plaisirs pour la plus grande exaltation d’assouvir nos ardeurs les plus charnels.

Cette situation me va très bien. Pour elle c’est bien différent, c’est une femme à la fibre romantique, on n’est pas toujours synchro.

J’essaye de faire de mon mieux, cependant je ne suis pas très doué pour « le sentimental », et puis entre nous, je n’ai pas trop envie de faire d’efforts dans ce domaine. À mes yeux, les bienfaits sensuels que je lui offre sont suffisants et compenseront largement ses attentes.

Derrière mes apparences de crooner de ces dames, j’y tiens à ma jolie poupée, je dirai presque que j’en suis amoureux !

Quelle connerie je peux dire ! (Sourire.)

Acte 2 : Vanessa une jeune femme charmante et pleine de vie est sur scène.

Elle est proche de la trentaine, professeur de littérature, passionnée et bouillonnante de vie, aime son métier et adore par-dessus tout transmettre à ses étudiants sa passion de toujours pour les écrivains romantiques et réalistes du dix-neuvième siècle.

« Quelle belle journée ! Mes étudiants étaient adorables, ils ont participé attentivement à mes cours et aux thèmes que nous avions choisis ensemble, analyse et étude de texte des œuvres magistrales d’Honoré de Balzac et de Gustave Flaubert, la Comédie Humaine et Madame Bovary.

Je veux simplement leur redonner une petite lueur d’espoir, les sortir de la grotte confortable où la société d’aujourd’hui les nourrit d’ombres et d’illusions depuis leur naissance.

Qui mieux que ces écrivains de génies pour les éclairer vers des chemins remplis de beautés, de contemplation, de créativité, d’harmonie et d’amour.

Juste leur donner l’envie de cultiver avec les outils fabuleux de l’esprit et du cœur de merveilleux jardins de vie. Pour qu’ils transmettent à leurs enfants les plus beaux fruits et les plus belles couleurs de l’avenir.

J’ai aussi ma petite parcelle à entretenir, une relation amoureuse n’est pas toujours un long fleuve tranquille remplie d’amour et d’eau fraîche, le mien, en ce moment, c’est plutôt : flaque d’eau et torrent déchaîné. Ce soir, j’ai prévu d’aller dîner chez lui et comme d’habitude la soirée se terminera sous les draps pour le plus grand divertissement de ses désirs. »

Acte 3 : Quelques semaines plus tard.

Sophie une jeune fille simple et souriante entre sur scène.

Elle a vingt-huit ans, célibataire, en quête du grand amour, professeur d’histoire dans la même université que son amie d’enfance Vanessa.

Sophie reçoit un appel téléphonique d’Alexandre.

« - Bonjour Sophie, tu vas bien ma belle ? Alors ! Cet homme exceptionnel, l’as-tu enfin trouvé ?

- Bientôt mon cher ami, je ne désespère pas, s’il existe pour d’autres, il doit bien être quelque part pour moi.

- Dommage pour toi ! Je ne suis plus libre.

- Toi, tu es l’antithèse de mes plus beaux rêves, un vrai cauchemar comme mec ! Je comprends mieux Vanessa.

- Ah bon ! Elle pense quoi ?

- Que tu es un gros prétentieux et que ton cerveau se trouve entre tes jambes.

- Elle me connaît bien ! (Rires.)

- Tu devrais être moins sûr de toi !

- Aucun risque, elles craquent toutes devant mes tablettes !

- Abruti ! Comment une fille aussi sensible, douce et bienveillante que Vanessa a pu être séduite pas un goujat pareil ?

- La force de l’amour ! L’amour rend aveugle. C’est vrai que tu l’ignores… ! (Rires.)

- Je ne crois pas, tu vas bientôt déchanter beau merle et redescendre de ton trône d’arrogance.

- Aucun risque ! Je porte bien la couronne.

- Tu es immonde, heureusement que cet homme la rend rayonnante et joyeuse maintenant.

- Tu me dis quoi là ? Je n’ai pas tout compris ?

- De toute façon, elle n’a jamais été heureuse avec toi, alors que ça soit moi ou elle qui te le dise, autant que tu le saches…

- Tu me dis quoi là, soit plus précise Sophie, qui la rend plus heureuse ?

- Il y a trois semaines, la voyant toute triste à cause de toi, je l’ai emmenée avec moi à une soirée « Speed Dating », elle s’est prise au jeu et au bout de quelques rencontres, la magie a eu lieu avec un homme charmant et merveilleux qui a su réveiller en elle les plus beaux paysages de son cœur. Depuis, ils échangent des correspondances, des mots de tendresse, de douceur, des phrases d’un romantisme inouï et divin à faire chavirer l’enfer en paradis d’amour.

- Comment oses-tu dire des âneries pareilles, ta blague ne me fait pas rire !

- Ce n’est pas une blague, gros naze !

- De toute façon, elle ne me quittera pas, si elle le fait, j’irai me foutre en l’air avec elle dans le fleuve.

- Mon pauvre, tu es pathétique, si tu avais su la comprendre, être plus attentionné, si tu avais parlé aux beautés de son âme, tu aurais gardé ce trésor de fille afin que chaque jour elle enrichisse et illumine ta vie de bonheur. Ce n’est pas l’amour qui rend aveugle, c’est la vanité et l’égoïsme mon garçon !

- Alexandre reçoit un sms de Vanessa, je ne pourrai pas venir ce soir, je ne me sens pas très bien. Bisous. »

Le rideau se baisse et la lumière se rallume.

Julien regarde tendrement Emma et lui dit, j’aimerais que nous allions flâner main dans la main sur les bords de la seine, j’ai tellement de merveilleuses choses à te dire avant de partir…

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