NAISSANCE ET CONTEXTE SOCIAL : Partie I

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C'est en septembre de l'année 2000 que Marvin Müller et Naël Ypsilantis se rencontrèrent pour la première fois. Les deux jeunes enfants qui n'avaient alors pas passé une seule journée sans la compagnie permanente de leurs parents ou de leurs nourrices, croisèrent leurs regards, et une alchimie très spontanée naquit entre eux deux. Sortir pour la première fois d'un lieu familier pour partir dans une grande et longue aventure, celle de la scolarité est à la fois effrayant et excitant, mais leur coudoiement allait marquer leur vies à jamais et allait leur permettre de surmonter quelques moments difficiles que la plupart des autres loupiots allaient également vivre. C'était alors tous deux des enfants très sympathiques, souriants, Naël naturellement plus énergique que Marvin, mais ils correspondaient à ce qu'on pouvait attendre des gamins de leur âges. Les deux jeunes garçons n'étaient pas vraiment copains avec leurs autres camarades, Marvin qui était certainement beaucoup moins extraverti que Naël avait un engouement moindre pour les activités en groupe. Mais malgré ça, le petit brun préférait largement rester aux côtés de sa première rencontre au sein de l'établissement, celle avec le petit Marvin.

Les souvenirs de Naël sur cette période de sa vie sont plus que flous, ils se limitent à des flashs assez anecdotiques, comme quand la maîtresse jouait avec une marionnette, une petite sorcière qui s'appelait Madame Ronchon, mais qui pour une raison qui lui échappait, était renommée "Jeanne la méchante sorcière" par le blondinet. "Jeanne la méchante sorcière" était l'ennemi juré de Marvin à l'époque. Quand la maîtresse posait des questions aux enfants avec cette petite marionnette, ce dernier tirait la langue et réagissait excessivement mal, faisant rire ses camarades et même madame Lulling qui retenait un petit rictus, mais qui remettait tout de fois Marvin à l'ordre en lui rappelant chaque jour, chaque fois que Madame Ronchon venait, que la haine n'était pas la bonne solution, et que discuter, apprendre à connaître l'autre et ses problèmes étaient bien plus gratifiant et pouvait même faire changer les gens. C'était ça que Judith Lulling, maîtresse dans cette petite école près de Luxembourg-ville voulait apprendre à ses élèves. Mais Marvin, malgré l'amour qu'il avait pour son enseignante, continuait tous les jours de faire des grimaces à la petite sorcière, même si celle-ci devenait de moins en moins méchante au fil de l'année scolaire. Naël trouvait ça amusant de voir son ami si timide se déchaîner contre la pauvre petite marionnette sans défense.

Déjà à cette période, le petit blond à lunettes n'était pas très bavard, se contentant uniquement de répondre aux interrogations des adultes, il n'était pas des plus sociables avec les autres enfants. Mais il était tout de même un peu plus ouvert à Naël qui était alors âgé d'un an de plus que lui en ayant commencé le cycle 1 une année plus tard. Tous les jours, les deux enfants se retrouvaient devant le portail de l'école, la plupart des autres élèves pleuraient de voir leurs parents partir, mais au contraire, Marvin lui, était ravi plus qu'autre chose, saluant sa mère en secouant ses petits bras vers elle avec tant d'amour, celle-ci qui ne prenait même pas le temps de sortir de son véhicule pour amener son fils unique dans la cour de récréation. Cette voiture familiale était assez différente des autres, plutôt sale, on pouvait y voir des rayures et tags incompréhensibles pour un enfant de quatre ou cinq ans, mais qui, à la réaction des adultes pouvait leur faire comprendre que quelque chose clochait avec ce véhicule qui était si spécial aux yeux des grands. Cette voiture, cette fameuse voiture a porté préjudice à Marvin durant plusieurs années. Les autres enfants devenaient odieux quand ils le croisaient. Les parents d'élèves eux-mêmes étaient assez violents avec le petit blond, empêchant leurs rejetons d'aller le voir. Il n'assimilait pas cet étrange comportement qu'avaient les adultes et les autres enfants à son égard, se croyant parfaitement normal et propre sur lui.

"Ta maman elle est bizarre !"

Marvin lui ne répondait pas, préférant ne rien dire à sa maîtresse qui, elle, le traitait avec la plus grande douceur. Naël de son côté ne concevait pas non plus la haine qu'avaient les autres élèves envers la mère de son ami qui n'était jamais sorti de son véhicule, mais qui avait une apparence agréable. C'était une femme blonde, qui portait toujours des lunettes de soleil même quand le ciel était couvert. Elle qui ne regardait jamais son fils lorsqu'elle le faisait descendre de sa machine mais qui semblait être chagrinée en même temps. À cette période-là, le petit brun ne s'occupait pas des affaires de son copain, ce n'était pas de son âge et eux deux ne pensaient qu'à s'amuser et rigoler comme tous les enfants de leur génération. Là méchanceté de ses camarades amenait à la bonté de la maîtresse qui se doutait, étant donné la réputation fondée ou non de la mère de son élève, que quelque chose ne tournait pas rond. Lors des récréations, Marvin avait s'il le souhaitait l'autorisation de rester dans le bureau de la jeune femme qui n'était faite que de bienveillance et de gentillesse. Elle prenait soin du petit Marvin plus que les autres élèves, amenant donc à la jalousie de ses camarades, sauf de Naël, toujours débonnaire avec son copain.

 Les jours passaient, les semaines également, et ce n'était pas rare de voir Marvin aller chez Naël, mais c'était clairement très peu, voire jamais l'inverse à cette époque. Salomé Ypsilantis, mère célibataire, était toujours préoccupée par son fils et de ses fréquentations, le voir passer sa jeunesse avec le petit lunetteux n'était pas un souci pour elle, mais c'est lors de la première rencontre entre Hervé Müller et elle-même, que les choses ont vite changé. Naël, de ses yeux d'enfants, voyait bien que quelque chose clochait quand le papa de son copain sortait de la voiture, il ne voyait rien de mal en lui, mais l'énergie que renvoyait sa mère ne le rassurait pas. La peur est quelque chose qui se transmet, et Naël ressentait bien la crainte de sa maman. Le père de son ami était quelqu'un de très grand et fin, son regard était ténébreux tout autant que ses cheveux très courts qui ne dépassaient pas les cinq centimètres de longueur. Salomé attendait toujours que le rejeton de l'homme qu'elle craignait tant parte pour prévenir son propre fils. Elle rabâchait sans cesse à Naël qu'il ne fallait pas monter dans la voiture de cet homme ou de le suivre même s'il s'agissait du "papa" de son ami et qu'il avait l'air Ô combien normal d'apparence. Mais cette couardise envers le trentenaire avait l'air tout à fait fondée, en tout cas assez pour que son petit garçon ne s'approche pas trop près de lui, même si sa mère avait l'air de cacher quelque chose. Marvin lui, semblait ressembler traits pour traits à sa mère, aucune de ses caractéristiques physiques n'était en héritage de son papa, et on pouvait même croire qu'ils n'étaient pas de la même famille. Le petit blond était mignon, à la peau très claire voire pâle et aux yeux bleus, un peu rondouillet avec des lunettes et un patch sur l'œil qui le grattait sans cesse. Il avait peur, l'effroi de s'imaginer l'enlever. Ce détail avait marqué Naël, quand d'autres enfants s'approchaient trop du visage du gamin à la peau si spectrale, il pouvait se mettre à crier d'une intensité sans pareil. Naël n'entendait jamais parler de la mère du petit garçon, lui ne mentionnait que son papa, laissant tomber totalement sa génitrice dans l'oubli. Il ne s'expliquait pas ce phénomène, et pensait en grandissant que les parents de son ami étaient divorcés et que celui-ci vivait chez son père. Le petit brun fut alors surpris, très étonné quand Marvin lui annonça le divorce de ses parents. Lui qui pensait que cela arrivait aux vieux couples mariés, ne s'attendait pas à une si sombre nouvelle, mais son labadens n'avait pas l'air plus chagriné que ça, étant même content de vivre uniquement chez son père. C'est pendant cette période que Naël vit Marvin le plus heureux des seize années qu'il a vécu à ses côtés. Ils avaient alors neuf et dix ans quand le divorce des parents du blondinet est venu arranger partiellement certaines choses dans son comportement. Il ne s'était pas métamorphosé pour autant, mais son sourire s'affichait un peu, il était un peu plus éloquent, et rieur que d'habitude, mais ce que pendant une courte période.

Malgré ce qu'il pouvait en dire, donc pas grand chose, Marvin aimait tout de même sa mère. Le petit brun avait toujours compris que quelque chose n'allait pas avec la maman de son ami malgré sa crétinerie à l'égard de celle-ci, il ne remarquait rien. Comme avec sa matrone, il ressentait la peur des adultes, et la réaction de ses camarades lors du Cycle 1 n'était que le reflet de la pensée des parents. Après tout ce temps, il ne l'avait jamais rencontré, il ne l'avait jamais aperçu autre part que dans sa grande voiture familiale devant l'école. Marvin les peu de fois où il parlait d'elle avait toujours le regard fuyant, comme s'il avait peur d'avouer quelque chose. Après quelques mois, il arrêta complètement de parler de sa maman. Il n'allait plus les weekends chez elle, ne donnait plus de coup de téléphone. La joie qu'il pouvait avoir après le divorce de ses parents s'estompa plus que rapidement. À peine quelques mois plus tard, son sourire était redevenu poussière, il avait perdu cette flamme dans les yeux, et il s'agissait de la dernière fois que Naël allait être témoin du sourire, de la gaieté et de la bonne humeur du lunetteux. Lorsque Hervé allait déposer Marvin chez madame Ypsilantis, les remarques devenaient de plus en plus fréquentes et insistantes. Le père du petit blond n'était absolument pas agréable avec cette jeune femme célibataire. Naël lui n'avait jamais connu son papa, mais ce n'était pas quelque chose qui le dérangeait, bien au contraire. Voir cet homme dont sa maman avait peur lui faire des avances le mettait en colère, il n'avait pas à toucher à sa mère, qui refusait ses avances poliment malgré une peur notoire. Marvin demandait sans cesse à son comparse d'arrêter d'être désagréable avec son père, même si celui-ci pouvait en rire. Mais la tête de mule qu'il était n'écoutait pas et continuait d'être acariâtre. Les jours défilaient, les semaines, et les agissements déroutants d'Hervé Müller continuaient, mais plus que sur Salomé Ypsilantis, mais également sur les autres femmes qu'il pouvait croiser. Son célibat le rendait honteux, insupportable. Sa gestuelle, ses propos gênaient de plus en plus Marvin, mais également Naël qui le voyait de temps en temps hors de chez lui, notamment dans un de ces parcs avec des attractions pour les jeunes enfants. Mais c'est alors qu'un jour, son attitude changea radicalement, et que Naël allait faire la rencontre de Véronique Krier, la belle-mère de Marvin.

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