Sans s'en apercevoir...

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Comme tous les jours, à sept heures pile, ma grande soeur Ilham vint me réveiller. Elle me secouai fortement mais je n'avais pas envie de mettre fin à ce doux sommeil. Enfin, je fis ma toilette et me dirigeai vers la salle à manger où, chaque matin, je trouvai mon petit-déjeuner préparé sur la table. En fait, je fut ébahi quand j'aperçus celle-ci vide. Peut-être ma mère avait oublié -même si c'est quasi impossible- de le préparer. Je courus vers la chambre de ma soeur, puis vers celle de mes parents. Les deux étaient fermées. Et comment ça ? Que devais-je faire ? Partir à jeûn ? Je commençai à perdre mon sang-froid et criai à tue-tête :

— Hey ! Maman, il y a rien à manger ?

A ce moment-là, me parvint à travers la porte sa voix coléreuse :

— Et alors ? Qu'est-ce qui te pousse à brailler comme ça ? Tu nous a dit que tu pourrais te débrouiller, Yamin !

Je poussai alors un long soupir, prit mon cartable et me dérigeai vers le collège. Une mauvaise journée s'annonçait.

*********

— Je ne me rappelle plus de la date de notre examen de math, Omar ? demandai-je à mon camarde lorsque nous entrâmes en classe. J'eus beau répéter la même question, Omar fit la sourde oreille, et changea de place.

Un moment plus tard, le prof d'histoire découvrit que je n'avais pas terminé mon devoir à la maison, alors il me claqua au visage, en vociférant des insultes humiliantes, et m'ordonna de quitter la salle. Sans protestation, les larmes aux yeux, je quittai carrément l'établissement.

*********

Je m'assis sur le trottoir, en hoquetant. Je ne comprenais absolument rien à tout ce chaos matinal. Le vertige me prit et j'avais la nausée. Je sentis un grand besoin de repos. Je me hâtai de rentrer à la maison.

Devant la porte, je fit retentir la sonette une fois, deux fois, trois fois... en vain. J'eus beau appeler ma soeur et ma mère à tue-tête. J'y tambourinai comme un fou. Je savais qu'elles ne voulaient pas ouvrir. Et alors, que faire ? Je n'avais ni clés ni de téléphone pour contacter mon père. Soudain, à ma grande joie, je vis ce dernier s'approcher de la maison, le regard égaré. J'accourus vers lui, sa froideur m'ébahit. Il m'ignora et se hâta de rentrer dans sa maison. Est-ce bête, dites ? C'était la mienne aussi ! Pourquoi Papa s'ajouta-t-il à la liste de mes ennemis ? Je le regardai, stupidement, ouvrir la porte et la fermer.

* * * *

Allongé sur le gazon du parc central, des torrents de larmes coulèrent sur mes joues, je ne parvenais pas à comprendre cette journée malveillante.

Des dizaines de minutes passèrent, une voix féminine m'arracha à mes rêveries.

En me retournant, une créature d'une beauté surnaturelle me surpris : des cheveux dorés, un visage d'une blancheur magnifique, avec des dessins sur le front et les joues, des mains portant une sorte de bracelets transparents. Absorbé, je ne remarquai guère qu'elle commençait à me parler :

— Tu peux me dire pourquoi tu es là, seul, alors que les cours ont déjà débuté ? demanda-t-elle avec un léger sourire.

Je rougis immédiatement ; lui dire que ma famille ne voulait pas de moi était gênant.

— Bien, suis-moi.

Sans hésitation, je marchai docilement derrière la fille, qui se dérigeait vers le bois. En fait, Une question me hantait depuis des dizaines de minutes :

—Pardon, mademoiselle, mais qui êtes-vous ? Et comment avez-vous su mon nom ?

—Excuse-moi, j'ai oublié de me présenter. Je m'appelle Nadin, je suis une des "Feestania". Nous sommes des fées. Nous nous occupons du temps, surtout le passé des humains. Les feestania ont pour rôle de s'assurer des enregistrements des souvenirs de chaque individu dans la forêt du passé. Comme ça, si un des hommes ne parvient pas à se souvenir de son propre passé, nous l'aidons.

Nous arrivâmes au sein d'une clairière formidable. Toutefois je ne me rappelais pas qu'il y avait une ici. Etrange.

— Bienvenue dans la forêt du passé. Ici tu comprendras ce qui t'arrives, mais d'abord allons vers ton propre arbre.

— Et depuis quand j'en ai un ? articulai-je timidement.

—Depuis ta naissance. Il est archiplein de tes moments passés.

Nadin me guidait vers mon arbre, celui-ci se trouvait au centre de la forêt. Il était immense, avec ses feuilles luisantes et ses branches dansantes. La fée commença à murmurer des mots incompréhensibles puis le tronc de l'arbre s'ouvrit comme une porte. Nadin y entra, je la suivis inconciemment.

L'intérieur était complétement différent, il y avait une seule pièce où une grande plaque de bois flottait dans l'air. Surprenant !!! Tout à coup, Nadin fit vibrer ses bracelets, et la plaque s'illumina comme un grand écran.

— Ici, tu verras tous tes souvenirs du mois dernier. Et tu arriveras à comprendre.

J'acceptai et regardai attentivement. D'abord, je vis un garçon assis dans sa chambre, jouant aux jeux vidéos. C'était moi ! Ensuite, ma mère frappa à la porte, je ne me détachai pas de ma partie de jeu, tandis qu'elle me disait de venir dîner. Je lui criai, avec un ton plaignant :

— Je ne veux pas manger, ne m'appelez-plus. J'ai 13 ans, je me débrouillerai plus-tard.

Après cette scène, je me vis, assis seul dans un coin du salon avec son téléphone à la main. Ses parents l'invitaient à partager le repas et la discussion familiale, en vain. Ensuite lorsque son père lui ordonna de terminer ses devoirs, il faisait la sourde oreille et s'enfermait dans sa chambre.

Les autres scènes se sont déroulées dans le collège, la première était lorsque Omar avait remarqué les cernes sous mes yeux et me conseilla de délaisser Free fire qu'elle ne détruise ma vie. Je fronçai les sourcils et m'écriai :

—Tais-toi. Depuis quand t'es devenu mon père, hein ? Ne te mêle pas des affaires des autres !

La deuxième scène se déroulait pendant une séance d'arts plastiques. Omar, assis à mes côtés, a constaté que je jouai sur mon téléphone portable. Il m'interdit d'enfreindre les lois de la classe. Pourtant, devant mes protestations, il finit par m'abondonner, en haussant les épaules .

La troisième scène était en plein cours d'histoire-géo. Je m'étais endormi. Le prof m'avait découvert et je disai en baillant :

— Désolé, monsieur. Votre explication était assez ennuyeuse pour me faire sommeiller.

A ce moment-là, le professeur m'ordonna de quitter la salle et de ne jamais assister à ses séances. Pourtant il changea d'opinion lorsque je lui jurai, devant mes parents et mes copains, que je deviendrai assidu.

L'écran s'est éteint, me laissant abasourdi. Comment j'avais pu oublier tout ça ?

Sans m'en apercevoir, j'avais perdu l'amitié d'Omar.

Sans s'en apercevoir, j'avais perdu la confiance de mon maître.

Sans m'en apercevoir, j'avais perdu ma famille.

Sans m'en apercevoir, le jeu vidéo avait détruit ma vie !!!

Je tombai sur le sol, et fondis en larmes. Comment ? Pourquoi ? Quand ? Des questions me tourmentaient et un lourd poids pesait sur mon coeur. Comment j'arriverais à rétablir toutes ces relations ? Les autres allaient-ils me pardonner ? Ou bien je mourrais dans le remords et le regret ?

Je fermai mes yeux et poussai un cri assourdissant. Lorsque je les réouvris, je vis que j'étais bel et bien allongé dans mon lit. Pas la moindre trace de Nadin, ni de la forêt, ni même pas de mon arbre. J'allumai l'interrupteur, et constatai que j'étais à la maison. Un sourire triomphal se dessinait sur mes lèvres, c'était seulement un cauchemar. J'avais encore une chance de reconstruire ce qui était abîmé.

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