Pressant besoin de vacances

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Dans un des couloirs du palais aux mille miroirs, un courtisan se glisse vers une de ses connaissances, courtisan comme lui, et donc supposément ennemi ; mais si on ne peut plus se fier à ses ennemis dans les temps de trouble, en qui donc avoir confiance ?

Se redressant, bombant le torse et tous les jabots gonflés, il questionne comme on lance un défi.

" - Alors, ce nouveau roi, l'avez vous vu ?"

L'autre, au lieu de se rengorger de sa connaissance toute neuve, au lieu de le prendre de haut ou de le faire lanterner, tous jeux de langages qui pour des courtisans sont la pire des tortures ; au lieu donc de se comporter comme se comportent d'habitude les courtisans, l'autre lui répondit directement, ce qui en soit était anormal.

" - Il n'y a pas grand chose à dire, et puis je n'ai pas le temps, il faut que je fasse mes valises !"

" - Vos valises, monseigneur ?"

" - Je me retire sur mes terres. Vous savez ce qui est arrivé hier en plein conseil des ministres ? Le nouveau roi. Il a enfoncé la double porte de l'entrée pour faire passer la carriole qui le suivait. Et vous savez qui la poussait ? Des gobelins !"

"-Vous voulez dire les nouveaux conseillers ?"

" - Oui, OUI, ceux là même. Nos nouveaux et respectés conseillers d'Etat. L'air est plus pur dans l'arrière pays à cette saison. Plus sain. Alors, comme le nouveau roi n'était pas encore le nouveau roi et que le sénéchal ne savait pas qu'il devait lui obéir, il s'est avancé et a demandé c'était quoi ce bordel et pourquoi la salle du trône grouillait de merdes vertes."

Il s'éponge le front, comme s'il venait de se rendre compte de ce qu'il vient de dire. Tout va bien, sa tête est encore seur ses épaules. Pour l'instant.

" - Je m'excuse de l'expression, injustement blessantes envers la race gobelinoïde, mais ce sont ses propres mots. Alors la grande armure a parlé - et je n'avais jamais entendu un bruit pareil : Voilà, ainsi que le veux la tradition druidique, cinq cent mille glands bien secs et exempts de vers en échange de votre royaume. Et la grande armure ..."

" - Vous voulez dire le nouveau roi ?"

" - OUI ! Sa Nouvelle Majesté, a défait la toile et – que je sois écartelé si je mens – il n'y avait que des glands en dessous. Une grosse pile de glands. Alors le sénéchal a déclaré que c'était pas mal fort et que de toutes les conneries qu'on lui avait jamais sorties, celle là valait bien une putain de couronne.

La grande armure n'a pas eu l'air d'apprécier, et elle a regardé bizarrement une des créatures qui poussaient la carriole, et c'est là qu'on s'est aperçu que sous le chiffon gobelin qui lui servait de tunique, c'était l'ancien roi."

" - L'usurpateur ?"

" - Non, celui encore avant. Ah ! Ce n'est pas ce que je voulais dire. Vous savez que c'est ma grand mère qui m'avait légué ses terres ? Un charmant petit domaine entre la route des malles postes et la rivière. Alors la grande armure a dit qu'on l'avait surement mal compris, et que le senechal devait regarder les glands de plus près. Mais quand il s'est penché au dessus de la carriole, la grande armure a tiré son épée et lui a coupé la tête. La tête du senéchal a roulé dans la pyramide, et il a à peine eu le temps de dire que pour une putain de mort à la con, c'était une p... "

" - Une plaisanterie ?"

" - Je ne veux pas le savoir ! Il y a trois pièces, une cuisine et un potager, et j'y a déjà fait envoyer mes meubles ! Et la grande armure a annoncé qu'il y avait maintenant cinq cent mille et un glands dans la carriole et que si quelqu'un d'autre avait envie de recompter, il ne devait surtout pas se gêner."

"Vous pensez bien que personne n'a bougé, à part l'ancien roi qui s'est faufilé derrière une tenture et qui a disparu, et l'ancien ancien roi qui a repassé la grande porte en prenant bien soin de laisser la carriole entre lui et la grande armure."

" - Et les ministres ?"

" - Ils n'ont pas bougé, oh la la, vous imaginez bien bien qu'ils n'allaient pas intervenir dans une crise de légitimité à un tel niveau de l'Etat !"

" - Vous n'étiez pas ministre des phynances jusqu'à hier ?"

" - Moi ? Jamais, il ferait beau voir ! Je ne sais même pas manier le bâton à phynance."

Il se glisse le long du mur avec des mines de comploteur

" - Si on me cherche, je suis dans mon domaine pour y bêcher les navets."

Le courtisan le regarde partir en se demandant bien ce qui lui apris de réagir comme ca. Ce nouveau roi a l'air de quelqu'un de parfaitement raisonnable, le genre de roi qui saurait reconnaître les qualités d'un homme plein d'ambition qui jouirait d'une confortable expérience dans le maniement du bâton à phynances.

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