14.Surprises

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« Bonté divine, Charlie, j’ai eu un mal fou à vous joindre en ligne sécurisée.

-J’espère que vous avez de bonnes nouvelles. Vous réapparaissez après vingt jours de silence radio et m’interrompez dans mon unique pause-café.

-Tout arrive plus ou moins à son terme. Les pièces tombent une à une à leur place, et le puzzle n’est pas déplaisant à voir.

-Cinq semaines avant la dead line, il était temps.

-J’ai été recruté par le KGB fin décembre. L’absence de communication est due aux tests de loyauté qu’ils m’ont fait passer à intervalle irrégulier depuis. Malgré ça, j’ai le plaisir de vous annoncer qu’ils n’ont pas la moindre idée de qui je suis. La surveillance qu’ils appliquent à leurs propres agents m’a juste donné du fil à retordre pour vous contacter.

-Recruté… par le KGB. Bien. C’est… non, je ne sais même pas quoi dire. Ça ne m’étonne même pas autant que ça devrait, soupira-t-elle. Vous êtes vraiment imprévisible, c’est le moins que je puisse dire. Enfin, je présume que vous avez profité de l’opportunité pour faire avancer la mission.

-Très précisément. Le ministre de la défense visitera une base aérienne après-demain. Sans le demander ouvertement, j’ai obtenu le poste de garde du corps. Après tout, ils m’ont recruté pour mon lien particulier avec lui. Vu la paranoïa de Stroheim quant aux espions, j’étais l’homme de la situation.

-C’est bien ironique, remarqua sa supérieure. Vous pensez pouvoir lui faire révéler ses véritables opinions politiques au milieu d’une base militaire, cela dit ?

-C’est le scénario le plus optimiste, mais pas celui sur lequel je mise le plus. Il me reste une carte à jouer après ça, et cette opportunité est la voie royale pour y parvenir. De plus, j’aurai l’occasion d’approcher des Mig-21. Une petite collecte d’informations ne devrait pas poser de problème.

-Ce ne serait pas de refus. Vous savez à quel point les Américains sont friands de ce genre de choses, en particulier maintenant que le F-4 est entré en service. On devrait pouvoir les faire chanter un peu avant de leur communiquer ça. Si vous avez une demande à leur adresser, profitez-en.

-Je garderai ça en mémoire. Une surprise de ce type devrait les faire danser de joie, je doute qu’ils soient très regardants de la faveur requise en échange. Je vais bientôt devoir vous laisser, mais au moins j’ai la conscience tranquille à propos de ça.

-Avant de raccrocher, William, je voudrais savoir.

-Quoi donc ?

-Quels sont vos plans avec Eileen von Arenberg ? »

Il ne répondit pas tout de suite, rit un coup, puis sourit.

« Vous n’auriez pas discuté avec mon honorable mentor depuis la dernière fois, à tout hasard ?

-C’est une possibilité. Donc ?

-C’est si important que ça ? interrogea-t-il une pointe de curiosité dans la voix.

-Si je vous dit que sa grand-mère, Anna von Arenberg, a eu une relation aventureuse avec un agent britannique, et que l’histoire n’est connue que de quelques personnalités du MI6, vous commencez à comprendre ?

-Les nobles ont des vies plus dissolues que je ne le croyais.

-C’est difficile de résister aux charmes d’un espion fougueux, avec de beaux cheveux blonds et un regard vert perçant. Vous suivez ?

-Attendez, vous voulez dire que…

-En effet. Vous séduisez la petite-fille de Shimada. »

Le jeune homme partit d’un grand éclat de rire. Son interlocutrice patienta quelques instants qu’il reprenne son sérieux pour ajouter :

« Alors faites attention à ce que vous faites.

-Ne vous inquiétez pas, Charlie. Ce sera soit rien, soit jusqu’à ce que la mort nous sépare.

-Vu votre job et votre double affiliation, vous risquez d’être cueilli plus tôt que vous ne le pensez.

-Je le sais bien. Ce sont les risques du métier.

-Vous m’avez l’air bien résolu, dénota la trentenaire avant de prendre un gorgée de café.

-J’ai pesé le pour et le contre avant de m’engager. La jeunesse n’exclut d’ailleurs pas la sagesse, surtout quand on côtoie un sexagénaire qui a sauvé le monde une bonne dizaine de fois.

-Ce n’est pas faux. Nous reprendrons contact après votre mission.

-Avec plaisir. Au revoir, C.

-Au revoir, W. »

Un grésillement dans le combiné lui signala qu’elle avait raccroché. Il fit de même, vérifia l’heure, puis sortit de la cabine téléphonique. Mais alors qu’il commençait à marcher vers son appartement, il se retrouva nez à nez avec Nikolaï au premier croisement.

« Kolia ! Pour une surprise !

-Karl ? Effectivement, je ne pensais pas tomber sur toi !

-Que fais-tu dans le coin par ce beau samedi après-midi ?

-Je me baladais sans trop savoir où aller, pour être honnête. Mais c’est pas mal que tu sois là, ajouta-t-il.

-Ah oui ? répondit l’agent avec un fin sourire.

-On peut discuter chez moi ?

-Bien sûr, acquiesça l’espion. C’est si sérieux que ça ?

-Eh bien… je crois qu’à force de me parler d’avions, expliqua son ami, tu m’as bien donné envie de devenir pilote de chasse. »

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