2.Le cavalier et le fou

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« En 1945, l’armée soviétique est entrée dans Berlin. Mais alors que les soldats auraient pu se venger sur la population des crimes de l’armée nazie, ils ont tendu une main secourable pour nous libérer de la tyrannie d’Hitler. C’est depuis ce moment de générosité que l’Allemagne, et j’entends par là la République démocratique bien sûr, a pu se relever grâce à l’aide magnanime de notre allié russe. Par la suite, la coopération… »

Il soupira et arrêta un instant d’écouter le professeur. Depuis sa position élevée dans l’amphithéâtre, il avait une vue plongeante sur le cours d’histoire, mais aussi sur une personne qui l’intriguait. Tout en jouant avec son stylo, il se pencha vers son ami assis à sa gauche.

« Eh, Nikolaï, murmura-t-il.

-Hmm, Karl ?

-Tu sais qui c’est ? demanda-t-il en pointant une jeune femme aux longs cheveux couleur lila.

-Oh, c’est la princesse Eileen von Arenberg.

-Princesse ?

-C’est le titre de sa famille, bien que ça n’ait plus aucune importance maintenant. Fille de riche qui se mélange très peu et trie sur le volet ceux à qui elle adresse la parole. Bref, il y a peu de chance que tu lui parles un jour.

-Tu ne m’as pas l’air de l’apprécier, s’amusa-t-il.

-Bah, c’est l’exemple vivant de l’aristocratie qui opprimait les ouvriers avant qu’ils ne se libèrent. Je me demande même pourquoi elle n’est pas partie à l’Ouest.

-Peut-être qu’elle n’a pas eu le choix. Ou peut-être que sa décision est juste incompréhensible à nous autres du peuple, dit-il avec un pétillement d’intérêt dans ses yeux gris.

-Ton nom de famille ce n’était pas ‘’von Adlerschloss’’ par hasard ?

-Effectivement, mais mes grands-parents ont délaissé leur baronnie afin de se rapprocher du prolétariat qu’ils défendaient auprès des autres nobles. Je leur en suis reconnaissant, d’ailleurs. Je préfère vivre comme tout le monde plutôt que dans une cage dorée, sourit-il.

-Je te reconnais bien là, Karl. Tu as adhéré au parti ?

-Non, je ne m’intéresse que peu à la politique.

-Ça ne se limite pas à ça, tu sais.

-Peut-être bien, mais je ne suis pas trop tenté pour l’instant. Je préfère me concentrer à fond sur mes études.

-Toi alors », répondit-il mi-amusé, mi-étonné.

Une sonnerie métallique signala la fin du cours. Chacun rangea ses affaires pendant qu’un brouhaha s’installait, après quoi ils se dirigèrent vers la porte de sortie. En passant, Karl lança un furtif regard à Eileen, puis s’adressa à son ami en passant la main dans ses cheveux blonds :

« Tu as une réunion ce soir ?

-Oui, à l’amicale des jeunes communistes. On revient sur les œuvres de Staline en ce moment. Ça fait déjà sept ans qu’il nous a quitté.

-Déjà ? Le temps passe vite.

-Et ouais. De ton côté, tu fais quoi ?

-Je vais rester une heure ou deux à la bibliothèque universitaire avant de rentrer chez moi.

-T’es un vrai bûcheur, ma parole !

-On va dire ça comme ça, répliqua-t-il avec un sourire.

-Bon bah sur ce, à demain !

-Oui, à demain. »

Il partit dans le couloir de gauche, traversa quelques corridors et dévala un escalier avant d’entrer dans un vaste bâtiment. De hautes étagères fractionnaient l’espace tandis que ça et là se trouvaient des tables où lisaient diverses personnes. Il suivit les rayonnages jusqu’à la partie historique, bien souvent déserte. Cependant, un homme aux cheveux oscillant entre le blanc et le blond platine, probablement plus dans sa prime jeunesse, parcourait un ouvrage à la couverture bleue. Karl s’assit en face de lui, croisa son regard vert, puis engagea la conversation :

« C’est un honneur de vous rencontrer, monsieur Shimada. »

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