Cartes et serpents

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Je me réveillai dans un souterrain poussiéreux, morte de peur. Cela ressemblait davantage à des catacombes qu'à une vulgaire salle de réunion, mais ce n'en était pas moins un terrifiant lieu de rassemblement. Au centre d'une grande cavité écarlate où s'entassaient des ossements brûlait un feu, alimenté par des cadavres que l'on avait enflammés. Les têtes jaunâtres et malades, figées dans une expression de douleur tordue, me regardaient méchamment, ravagées par les flammes.

Sans vie.

Autour du feu, quatre anges aux bras tentaculaires jouaient aux cartes, dont le revers rouge était marqué d'un serpent noir. Devant eux, au nombre canonique de huit joueurs, étaient retenus prisonniers des hommes de même constitution que les cadavres. Marqués au fer rouge du sceau de leurs adversaires, enchaînés à un pan de mur, ils tentaient d'ignorer la souffrance pour donner le meilleur d'eux-mêmes au jeu. Les figures des cartes se révélaient instruments de torture, et se détachaient parfois pour achever les joueurs. Les anges ne perdaient jamais et se délectaient de la mort des esclaves, les poussant religieusement au coeur du brasier. Régulièrement, il en venait un autre, et encore un autre, pour nourrir ces parties assassines, et je me cachai les yeux à plusieurs reprises, terrorisée.

J'étais assise près du feu, hantée par la vision de tous ces visages desséchés, lorsqu'un des anges revint à la table avec un nouveau prisonnier. Il l'enserrait violemment de ses multiples appendices, ne laissant à l'air libre qu'un visage en bien meilleur état que les précédents. L'homme, encore vêtu d'un manteau bleu nuit et d'une chemise blanche déchirée, vint s'asseoir et posa une main confiante sur le paquet de cartes qu'on lui avait attribué. S'ensuivit une partie endiablée, où l'un des anges fut fortement diminué et mutilé, puis tué sous la torture magique d'une des cartes maîtresses.

"Ich hab' gewinnen" lança le prisonnier avec fierté. "Befreie mich!".

Les trois anges encore en vie s'avancèrent comme pour le libérer de ses chaînes, insensibles à la mort de leur compagnon, et se penchèrent sur lui.

"Ich glaube, du traümst" dirent-ils à l'unisson. "Du stirbst, wie die anderen gestorben sind!"

Mes neurones, cette fois-ci, furent assez performants pour que je pûs me procurer une traduction directe avec mes restes de LV2. Je crois que tu rêves. Tu mourras comme tous les autres!

Le prisonnier me regarda avec pitié, et tendit des doigts osseux vers moi. J'essayai de me lever, mais n'y parvins pas: j'étais attachée aux chevilles, et je ne m'en étais même pas aperçu.

"Rose!" cria-t-il. "Rose Pastor! C'est moi, Pierre!

- Ruhe!

- P... Pierre? fis-je, le reconnaissant enfin.

- Rose..."

Sa main se rapprocha de la mienne, salvatrice, et les flammes commencèrent à lécher ses vêtements.

"Non!

- Rose! Rose!"

C'était Pauline.

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