Chapitre 8 - A point nommé (partie 1)

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Dans le village de Boisfeuillus, un homme vêtu de noir terrorisait les habitants. Les villageois avaient bien tenté de s’opposer à lui, mais il les avait envoyés mordre la poussière. Il avait usé de magie et personne n’osait plus bouger. Ils étaient tous pétrifiés par la peur, les yeux écarquillés.

Kaldor serrait son père dans ses bras et pleurait sur son corps sans vie. Les larmes coulaient, tumultueuses. Parfois, il le secouait légèrement comme pour le réveiller. Il refusait sa mort, cela ne pouvait être possible. Il était dans un cauchemar. L’homme en noir s’était approché de lui et le jeune homme braqua sur lui un regard brûlant de colère et de haine. Son agresseur n’en avait cure et leva son épée magique, prêt à l’abattre. Kaldor avait désespérément levé un bras au-dessus de sa tête. Les villageois avaient tous fermés leurs yeux, ils ne voulaient pas assister à sa mort. Seul son ami Leyt avait hurlé son nom.

L’épée de feu noir s’abattit. Il se produisit un crissement et une intense lumière blanche. Kaldor, qui avait fermé les yeux, les rouvrit et constata avec surprise qu’il était encore vivant. Son agresseur chancelait et secouait la tête pour reprendre ses esprits. Il semblait sonné. Le jeune homme remarqua une chose bizarre. Il y avait comme un voile légèrement flou devant lui. Il tendit la main pour le toucher et découvrit que c’était solide.

— Ah ! Sale vermisseau ! Tu m’as bien eu. Je ne pensais pas que tu étais déjà capable de faire ça.

Une rumeur de surprise et d’indignation parcourut l’assistance.

— Vous avez vu, Kaldor aussi s’adonne à la magie ! Pourquoi risquer sa vie pour une personne aussi malsaine ? dit un villageois Pas étonnant qu’il ait des ennuis, la sorcellerie n’apporte que ça.

— Il a raison ! s’exclama un autre. Eh ! On vous le laisse mais partez d’ici. On ne veut rien avoir à faire avec ça !

Un murmure d’assentiment émergea de toute la foule rassemblée là. Le jeune homme la parcourut du regard, effaré et impuissant. Du rôle de victime, il était passé à celui de paria. La magie était intolérable pour la plupart des gens et pour certains son usage était passible de mort. Kaldor se sentit trahi par les siens. Même son ami, dont il croisa le regard, ne semblait pas quoi penser de lui. Un orage se déchaînait en lui, où se mêlaient nombre de sentiments : colère, tristesse, incompréhension, trahison. Il n’était que ruine en son for intérieur. Ses épaules de voûtèrent et sa tête se pencha sur celle de son père. Il ne put retenir ces nouvelles larmes qui l’assaillaient.

— Ah, que j’aime l’humanité et sa peur de la différence et de l’inconnu, ricana l’homme en noir. C’est bon de se sentir soutenu, n’est-ce pas ? Si je pouvais, je verserais bien une larme, tiens. Tu vas mourir seul, bien qu’étant entouré.

Il raffermit sa prise sur le manche de son épée et se gonfla de pouvoir afin de percer le bouclier du garçon et le tuer. Kaldor ferma les yeux, il avait peur de mourir. Il ne voulait pas périr de cette façon.


— Je crois bien que nous arrivons à temps pour la fin de la fête, dit une voix inconnue. Pas vrai, capitaine ?

Toutes les têtes se retournèrent vers l’origine de cette voix. De l’autre côté de la rue, derrière la foule, trois hommes à cheval venaient d’arriver. L’homme, qui avait parlé, était encadré de deux soldats de l’Ordre du Temple. Les villageois étaient surpris. Kaldor était intrigué et l’espoir s’insinua à nouveau en lui. Il y avait quelque chose de rassurant qui se dégageait de l’homme. Ils mirent pied à terre et traversèrent la foule pour venir se placer entre le jeune homme et son agresseur. Il sourit à Kaldor avant de reporter son attention sur l’attaquant.

— Cette magie est interdite, l’ami. Où l’avez-vous apprise ?

— Mon maître Mastar m’a tout appris. Comme reconnaître quelqu’un d’en ton genre. Pourquoi te caches-tu ?

— Je ne me cache pas. Je me tiens là devant toi. Moi aussi je sais reconnaître ceux de ton genre, servombre. Tu n’as rien à faire ici, retourne auprès de ton maître. Ce jeune homme et ce village sont sous ma protection.

— Je parlais de l’illusion qui t’entoure. Il est hors de question que je reparte sans m’être assuré que ce petit vermisseau soit mort. Rien ne se mettra en travers de ma route ! Rien !

L’homme en noir se jeta sur lui, l’épée pointée sur la poitrine du sauveur. Celui-ci dégaina à une telle vitesse que Kaldor ne vit que du flou. Les épées s’entrechoquèrent en produisant des éclats de lumière. Les duellistes semblaient danser et non combattre. Ils se portaient ou esquivaient des coups et autres bottes avec la fluidité d’un vol d’oiseau et la souplesse du roseau. Ils sautaient et virevoltaient sans qu’aucun ne prenne le dessus sur l’autre. Puis au bout d’une dizaine de minutes, l’homme en noir se tint à distance. Voyant qu’il ne triompherait pas de manière conventionnelle, il usa de magie. Il envoya un jet de flamme sur le sauveur de Kaldor qui en ressortit indemne. Les deux soldats avaient bandé leurs arcs, mais les deux bretteurs étaient trop proches l’un de l’autre. Alors quand l’agresseur concentra son attention sur l’épéiste pour le brûler, ils tirèrent leurs flèches. Celles-ci se fichèrent dans la poitrine de l’homme en noir. Il tituba mais aucun sang ne sortit de la plaie.

— C’est un coup bas digne de pleutres, hoqueta-t-il sous la douleur. Vous avez peut-être gagné cette bataille, mais pas la guerre. Je vous retrouverai et j’aurai ma revanche.

Des flammes s’élevèrent de son torse pour le consumer entièrement. De lui, il ne resta rien.

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