Chapitre 20

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Après ce moment de shopping de folie, nous nous accordons pour dire qu'il serait bon de prendre un verre.

Les gars se proposent pour aller porter les sacs à la voiture pendant qu'Élodie et moi, nous faisons la queue devant l’un des restaurants du centre commercial. Alors que nous nous installons enfin à une table, les yeux verts de la jolie blonde viennent trouver les miens.

- Tu ne m'as jamais dit depuis combien de temps vous vous connaissez avec Mathieu, s'intéresse-t-elle d'un coup.

Eh bien ça alors, je m’attendais à tout sauf à ce qu’elle me parle de Mathieu, comme ça, de but en blanc. Il y a forcément quelque chose qui se trame dans sa petite tête.

- On se connaît depuis que l'on a six ans. On était dans la même classe de CP. Il a été le premier ami que je me suis fait quand je suis arrivée chez mes grands-parents, expliqué-je sans entrer dans les détails. Pourquoi ?

- Et, si j’ai bien retenu, vu votre réaction de l’autre jour, il ne s'est jamais rien passé entre vous ? Demande-t-elle sans retenue tout en regardant l'ardoise du restaurant. Même pas un petit dérapage comme un baiser volé ou une petite caresse ?

Je manque de m’étouffer avec ma propre salive. Habituellement, j’adore son côté cash, mais là c’est pour me cuisiner.

- Non ! Réponds-je, dégoutée. Mathieu est comme un frère pour moi. Je connais bien trop de choses compromettantes à son sujet pour l’envisager autrement.

Elle hausse les épaules, pas franchement convaincues, et répond.

-Vous êtes si proches lorsqu’on vous voit, que « ami » n’est pas le premier terme auquel on pense, avoue-t-elle après avoir scrupuleusement vérifié que personne ne nous écoute. Vos regards, votre complicité, vos petits gestes… Cara, tout à l’heure encore il te regardait comme si tu étais la huitième merveille au monde. Crois-moi, Cara, il n’y a rien d’étonnant à ce que vous soyez encore célibataires, tous les deux car, si Simon avait ce comportement avec sa meilleure amie, je ne l’aurais jamais approché.

Mais qu’est-ce que je peux répondre à ça moi ? Elodie n’est pas la première à me faire la remarque, c’est un sujet qui revenait déjà souvent au lycée. En général, il était abordé par les filles dans le but de savoir le statut amoureux du beau blond. C’est d’ailleurs le seul moment où ces pestes de ma classe s’intéressaient à moi. Je me souviens, en seconde, dès que je recevais une invitation pour une soirée il était ajouté « viens avec Mathieu ». Résultat : on a passé notre année à éviter les fêtes. Bien sûr, il est évident que les motivations de ma copine concernant cette discussion sont toutes autres, mais, même si ces derniers temps mon cerveau s’est un peu brouillé concernant mon colocataire, je dois absolument lui enlever cette idée de la tête.

- Tu sais, je pense que le fait que l’on se connaisse depuis si longtemps ça y joue beaucoup, plaidé-je prête à sortir tous mes arguments. On s’est vu grandir, changer. On a fait les quatre cents coups ensemble, on a aussi pleuré nos premières déceptions amoureuses… Enfin, tu vois quoi ? On a passé la majeure partie de nos vies tous les deux, alors ça rapproche.

Elle ne semble pas très convaincue.

- Si tu le dis, plie-t-elle sans convictions. Mais laisse-moi quand même te dire que vous n'avez plus six ans et qu'il serait normal que vos sentiments changent. Vous ne seriez pas les premiers.

- Je...

Elle me coupe.

- Je ne dis pas que c'est le cas, je dis simplement que ce serait normal.

Je n'ai pas le temps de répondre que nous sommes rejoints par les garçons.

- Alors les filles, vous parliez de nous ? Demande Simon sur le ton de la plaisanterie.

Je suis trop gênée pour dire quoi que ce soit et cela s’amplifie quand Mathieu décide de s’installer à côté de moi. S’il avait ne serait-ce qu’une petite idée de ce que pense Elodie, il éclaterait de rire. Je ne suis absolument pas son genre de fille !

-Plus ou moins, répond Elodie avant que je n’ai le temps de prendre la parole. On parlait de la vie amoureuse de Cara.

Elle balance ça comme si elle parlait de sa propre vie privée. Sans que je puisse intervenir, Mathieu enchaîna.

- Donc vous parliez de Jonathan, réplique-t-il tout content de pouvoir faire partie de la conversation.

- De Jonathan ? Interrogent en cœur Simon et Élodie.

A cet instant précis, j’aimerais être une petite souris pour pouvoir échapper à la conversation qui va suivre.

-Oui, confirme Mathieu. Il a littéralement craqué sur Cara.

Nos deux compagnons qui nous font face sont clairement subjugués. Ils semblent attendre la suite comme on attend le prochain épisode de notre série préférée.

- Et je pense que notre chère Cara n’est pas insensible à son charme, ajoute-t-il malicieusement. Seulement, comme à chaque fois qu’il s’agit de relation amoureuse, madame fuit à toutes jambes…

Un éclair passe dans les yeux de la blonde qui me fait face.

-Ah, je comprends mieux, dit alors Elodie comme si elle venait d'avoir une révélation.

-Quoi ? Demande Simon.

-Non rien... Lui répond-elle.

Un serveur finit par me libérer de cette conversation en venant prendre notre commande.

La fin de l'après-midi se passe plutôt bien. Après ce petit moment sur ma vie amoureuse, les conversations ont vite dévié sur les cours. Pour mon plus grand soulagement. Enfin, après cette discussion avec Elodie, j’ai tout de même eu du mal à prendre part aux conversations. J’ignore pourquoi, mais ses mots ont eu bien plus de répercussion que je ne l’aurais pensé.

Cela n’a rien d’étonnant que vous soyez encore célibataire.

Elle pense vraiment que le comportement de Mathieu à mon égard fait fuir les hommes ? Après tout la jalousie de Jonathan n’est peut-être pas infondée mais alors quoi ? Il faut que je demande à mon meilleur ami d’arrêter ? Impossible !

Une fois nos verres vides et nos estomacs remplis, nous nous accordons pour arrêter là cette session de shopping.

Il est déjà presque dix-huit heures quand nous arrivons à l'appartement avec Mathieu, alors nous partons aussitôt nous préparer pour notre soirée « tête-à-tête »

Après une douche rapide, me voilà de nouveau face à cette grande armoire, sans idées de ce que je vais me mettre. Mon regard se pose sur la poche plastique posée au sol et je décide de mettre la tenue qu'Élodie m'a choisie plus tôt dans l’après-midi. Je l'accompagne d'un maquillage simple avec juste un trait d'eye-liner noir sur les paupières et des bottines qui accentuent à la perfection le côté rock de ma tenue.

Je me dirige vers le salon, persuadée que j'ai battu un record de temps de préparation, mais je constate que Mathieu m'attend déjà. Mais comment fait-il sérieux ?

- Alors beau gosse, prêt à aller te remplir l'estomac, dis-je en rigolant alors que je suis dans son dos.

Il se retourne et me regarde comme lorsqu'il est sorti de la cabine.

- J'adorais déjà ta tenue tout à l'heure, mais là, c’est carrément parfait, confit-il les yeux pétillants.

Je rougis.

Qu'est-ce qui m'arrive ? Depuis quand ce que me dit Mathieu me fait tant d'effet.

- Tu n'es pas mal non plus, lancé-je en constatant qu'il porte le polo que je lui ai choisi avec un pantalon droit bordeaux.

Il s'approche de moi pour remettre une mèche de cheveux qui me tombe sur les yeux.

- On y va, s’enthousiasme-t-il. Je suis affamé.

Sans surprise, le choix de Mathieu s’est porté sur un Japonais. J’ignore pourquoi, il voue un culte aux sushis. C’est vrai que c’est bon, mais ce n’est que du riz et du poisson cru.

Alors que nous sommes en pleine réflexion de ce que l’on va prendre, j’hésite à faire part à Mathieu de ma conversation avec ma copine de fac. Finalement, je me ravise. Je l’entends déjà rire et me dire « Non mais Cara, tu as eu totalement raison, c’est juste que l’on se connaît depuis longtemps c’est tout. Regarde, je suis le premier à t’encourager à aller vers notre voisin. ».

Une fois cette question mise de côté dans mon esprit, la soirée se passe si bien qu'elle raisonne comme un grand bol d'air frais. Avec Mathieu, nous retrouvons cette complicité que l'on a toujours eue. Nous parlons de tout et de rien. L'ambiance est légère et le temps semble suspendu. C’est comme si nous étions retournés en Bretagne, loin de tous les tracas que je me farcis depuis mon emménagement.

Une fois rentrés à l’appart, nous nous promettons de recommencer rapidement. Alors que j’enlève mes chaussures, il s'approche de moi, me donne un baiser sur la joue et me dit.

- C'était une soirée géniale, ma p'tite. Je te souhaite une bonne nuit.

Je lui en souhaite une belle également et je m'en vais dans ma chambre. Alors que je me démaquille, je reçois un SMS de Jonathan :

"Coucou ma belle. Désolé de ne répondre que maintenant, mais j'ai passé deux jours chez ma mère en pleine campagne où le réseau manque. C’est vrai que j’avais oublié de te dire que je n’avais pas cours vendredi.

Je suis partant à l'idée que l'on se voit, si ta proposition tient toujours. Je suis libre demain après-midi. Tu me tiens au courant. Bisous".

Un soupir de soulagement sort du plus profond de mes poumons. Il va bien. Je me précipite pour répondre :

"Ça tient toujours et je suis disponible aussi. On se dit quatorze heures ?".

Sa réponse est instantanée :

"Parfait. À demain ma belle. J'ai hâte d'y être."

Je ne réponds pas, mais j'ai hâte moi aussi de le retrouver. Maintenant que je suis rassurée, la nuit va être plus sereine que la précédente

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