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Annecy, dimanche 30 septembre 2018, 15h30


Hans et Alice ne l'avaient pas avertie.

Mais Eliah Bonnetière ne sembla pas surprise au moment d'ouvrir la porte. Elle avait bien sentit que l'inspecteur observait sa réaction. Elle savait qu'elle était sur la liste des suspects  et que l'on puisse penser qu'elle aurait pu vouloir éliminer son mari.

Mari ? Quel mot absurde. Que pouvait-il bien vouloir dire? Ils vivaient ensemble dans la même maison, couchaient à droite et à gauche, sauf ensemble. Mais ils étaient tout de même restés "mariés"!? Donc oui, on pouvait légitimement penser qu'elle en ait eu marre et souhaite en finir avec Jérôme. Se venger. Car des deux, c'était tout de même le plus volage. Très largement.

Des fois il lui arrivait, assise dans son salon, buvant un thé, en regardant son jardin, d'essayer de s'imaginer le nombre de femmes qu'il avait eues. Cela l'amusait. Alors oui, des jours elle avait joué avec cette idée : le tuer. Saboter les freins de sa voiture. Ou le noyer dans le lac. Ou l'électrocuter. Alors peut-être que c'était elle pour finir. Qu'elle avait confectionnée ces amandes à la cyanure. Qu'elle les avait envoyée à son bureau en signant énigmatiquement E. Son nom commençait bien par un e. Ce serait une amusante manière de laisser entendre à la police que ce pourrait être elle. Elle s'était même demandée, pas trop sérieusement tout de même, si elle était schizophrène et que par conséquent, elle était, sans le savoir vraiment, l'assassin de son mari.

- Madame Bonnetière, demanda Hans. Est-ce qu'il vous est arrivé de souhaiter la mort de votre mari?

Ils s'étaient installés dans son salon, comme vendredi après-midi, et avaient tous une bière à la main. Il faisait chaud, et même que Hans et Alice étaient en service, une petite bière ne pouvait pas leur faire du mal, mais plutôt du bien. C'était à cela qu'ils avaient tous les deux pensés.

Elia Bonnetière avait meilleur mine que l'autre jour. Elle s'était maquillée, et portait une jolie robe bleue.

- Alors oui, inspecteur. Il m'est arrivé de souhaiter qu'il aie un accident de voiture, la route est sinueuse et dangereuse ici. Si possible fatal. Ou qu'il se noie dans le lac. Ou qu'il s'électrocute avec son rasoir électrique. Mais bon. Quel conjoint ou conjointe n'a pas pu un jour ou l'autre s'imaginer un tel événement. Jouer mentalement avec cette éventualité. Comme solution aux problèmes de couple? Hein? Vous-même, ça ne vous est jamais arrivé? Vous êtes marié!?

- Euh oui. Je suis marié, mais je dois dire que je ne pense pas que ça me soit arrivé. Je n'ai pas le souvenir d'avoir pensé souhaiter la mort de ma femme...

- Vous êtes sûr?

- Parfaitement !

- ça fait combien de temps que vous êtes mariés?

- Six ans.

- Ah oui! Alors c'est ça. Attendez encore quelques années et vous verrez....votre dulcinée...vous souhaiterez bien des fois qu'elle trépasse...

- Vous êtes très cynique, madame Bonnetière, remarqua Hans alors que Alice souriait en sirotant sa bière.

C'était l'éventuelle suspect qui menait l'interrogatoire à l'encontre de l'inspecteur et non l'inverse. Comique.

- Vous, vous n'êtes pas encore mariée, fit alors Eliah en se tournant vers Alice.

- Comment le savez-vous? Parce que je n'ai pas d'alliance?

- Non, pas du tout. Aujourd'hui plein de couple ne portent plus d'alliance. Des fois parce que il l'ont perdus, ou que ça les gênent pour travailler....non, ça se voit simplement que vous n'êtes pas mariée.

- Ah bon? Mais bon. Revenons à nos moutons, madame. Vous nous dites que vous auriez souhaité des fois, certains jours , que votre mari meurt. Je réitère la question de mon collègue d'une manière directe: avez-vous tué Jérôme Bonnetière, votre mari?

- Non. Même si des fois je l'aurais souhaité.

- Connaissez-vous le cyanure?

- Oui.

- Sauriez-vous confectionner les fameuses amandes mortifères?

- Absolument pas!

Alice resta silencieuse. Puis :

- Vous arrive-t-il d'aller à la poste pour envoyer une lettre, ou un colis? Et si oui, à quelle poste vous rendez-vous? Sur Suisse ou sur France?

Eliah réfléchissait.

- Oui, il m'arrive des fois d'aller à la poste.

- Laquelle?

- la poste de Veyrier.

Les amandes enrobées de sucre et contenant la cyanure avaient-été envoyées depuis la Suisse. Et sur le paquet, on pouvait lire, sur le tampon :

Poste de Veyrier.

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