Partie 2.

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Bon, il a l’air d’être un peu comme moi le nounours. Je pensais bien faire et voilà comment je suis reçu. A-t-il conscience que le toit sous lequel il se repose est le mien ? Le respect, la sympathique, la courtoisie, la gratitude, il connaît ? Non, cela ne semble pas lui parler.

- Je peux me lever pour aller pisser ?

- On est chez toi.

Exactement la réponse que j’aurais balancé.

Maintenant que j’ai son autorisation, je ne mets pas longtemps pour sortir de sous ma couette.

Aussitôt, je pose un premier pied sur mon tapis, puis le second et je quitte ma chambre après avoir traversé l’omnivore. Quand je reviens dans la pièce en me sentant un peu plus léger, l’animal n’a toujours pas bougé d’un poil.

- Tu comptes te lever ?

- Oui.

- Quand ?

- Je ne sais pas.

- D’accord. Tu te doutes bien que nous allons devoir discuter ?

- Oui.

Je n’insiste pas. Je sors une nouvelle fois de ma chambre et traverse le couloir de l’entrée pour ouvrir la porte vitrée de ma cuisine. Aussitôt, je m’approche de la table blanche carrée que j’ai installé sous la fenêtre que j’ouvre dans la foulée. L’été, mon appartement est un vrai four. En plein cœur de l’après-midi, la température à l’intérieur peut grimper au-delà des trente-et-un degrés.

C’est pour cette raison que j’ouvre toujours les fenêtres en cette saison dès le matin. D’ailleurs, je dois me rendre dans mon salon pour allumer ma bouilloire. Une fois cette tâche effectuée, je retourne auprès de ma table afin de m’installer et là, je prends connaissance de ce qui m’attends pour cette nouvelle journée. Aujourd’hui, j’ai juste à poursuivre la lecture du service-presse sur lequel je bosse. Nickel !

Toutefois, vais-je pouvoir lire avec l’ours ?

D’ailleurs, le voilà qui se matérialise sur la chaise réservée à mes invités pile au moment où l’eau de ma bouilloire est à point.

- Je t’en sers une tasse ? Lui demandai-je.

- Non.

- Tu veux autre chose à la place ?

- Non.

Encore une fois, je ne cherche pas à aller plus loin.

Quelques secondes plus tard, je fais mon retour avec ma tasse à motifs de vaches entre les mains et je pose mon postérieur sur ma chaise. Alors que j’attends le refroidissement de ma boisson, je regarde franchement l’animal qui se tient sur le second siège. Celui-ci a le regard perdu dans le lointain et je dois reconnaître que ce comportement me turlupine.

- Tu as un prénom ?

- Caran.

- Tu ne l’as pas cherché bien loin.

C’est mon prénom wiccanique, du moins, l’un des trois. A force, je vais finir par croire que l’ours sort directement de mon imagination à cause de toutes ces ressemblances. Après tout, son état vaporeux n’aide pas à songer autrement. D’ailleurs, ai-je une mission à accomplir pour lui ?

- Tu as besoin que je t’ouvres les portes de l’au-delà ?

- Pour quelle raison ?

- Ben… Tu es un fantôme !

- Je suis ton totem ducon et je suis venu te voir car tu m’as fait une belle connerie y a pas si longtemps.

Ouais… Le problème est que j’en fais souvent et je vais avoir besoin de lui pour y voir plus clair à ce sujet. Me parle-t-il de Frédéric ? C’est la dernière folie que j’ai su réaliser et dans ce type de délire, il est vrai que…

- … Tu es parti très loin, ouais. Au moins, nous sommes d’accord.

Rapidement, je rentre ma tête entre mes épaules car Caran va sûrement me passer un savon même si je ne l’ai pas attendu pour en essuyer un. Par qui ? Par moi. Dès l’instant où j’ai giclé ce mec de mon habitation, je me suis senti soulagé d’un poids. Après tout, quand mes yeux se posaient sur son être, j’étais en train de voir le moi d’il y a une quinzaine d’années. Un gars paumé, à la rue, qui reconnaissait avoir besoin d’aide mais qui n’avait pas encore le déclic.

Son objectif dans la vie ? Récolter des likes sur son profil facebook. Appeler une assistante sociale pour se sortir de la merde ? Ben non, ce n’était pas important. Et le pire, c’est que le mec ne cessait de dire qu’il avait son gosse à récupérer…

Reste loin de ton gamin, c’est le plus beau cadeau que tu peux lui faire.

J’ai tenu une semaine avec lui. Sa merde, il l’aimait. C’est moche à dire mais c’est la réalité. Moi, j’ai avancé depuis et ouais, je comprends mieux pourquoi j’énervais les autres lorsque j’étais dans cette situation.

- Je sais que tu veux être le plus humain possible, commence l’ours, mais avant d’aider les autres, fais-le pour toi-même.

Il ne m’apprend rien de nouveau. J’ai beau me le dire, mon esprit de sacrifice et de soutien me joue des tours. Depuis, je me suis fait la promesse de ne plus me faire reprendre à ce piège mais je me connais… Suffit que je croise une personne qui remplit parfaitement certaines conditions et hop, j’y retourne. Vais-je attendre qu’on vienne me planter directement chez moi pour mettre un terme à ces imprudences ?

- Et comment se porte ta flamme de vie ? Poursuit-il.

- Pourquoi me poser la question alors que tu connais la réponse ?

Ma flamme de vie, comme j’aime la nommer. Cette image symbolise ma volonté de vivre. Cerclée de ténèbres, une petite bougie brûle. Petite… Elle ne l’a toujours pas été mais la vie a veillé à la façonner jusqu’à cette taille. Au sujet de la flamme au bout de sa mèche, elle vacille. C’est ce qui arrive lorsqu’elle est sur le point de s’éteindre.

Si je ne fais pas ce qu’il faut, j’ai des raisons d’être peu confiant en mon propre avenir.

- Désormais, cesse de céder aux appels car tu vas livrer une nouvelle bataille et tu auras besoin de toutes tes forces. En plus, tu sais quels sont les enjeux derrière.

- Oui.

- Donc, continue à te battre. Au fait, tu te souviens du cadeau dont je t’ai parlé lors de ton dernier voyage chamanique ?

- Bien sûr.

- Il arrive.

- Tu m’as dit ça il y a déjà plus de quatre ans…

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