Dépression | Noir | Abandon

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Il pleure. Ça fait un moment qu'il pleure. Il finira bien par se taire. De toute manière elle n'a plus la force ni morale ni physique de se lever pour aller le voir. Charlie finira bien par se taire. Charlie tais-toi tu m'énerves ! Mais aucun son ne sort de sa bouche. Elle n'a pas parlé. Elle s'est juste contentée de le penser. Seulement son agacement et bien réel, lui. Le bruit s'intensifie. Elle a l'impression qu'il résonne dans sa tête. Elle n'en peut plus. Elle est à bout ! Jamais il ne va la fermer. Elle est fatiguée, fatigué de ce bruit constant ! Il veut hurler ? Très bien, elle aussi va hurler alors ! Et elle se met à hurler, elle aussi pour couvrir les pleures de son fils, allongé dans le berceau à dix pas d'elle. Les cloisons entre les appartements ne sont pas très épaisses et l'homme de 50 ans qui habite juste à côté et vient de rentrer de son travail, épuisé, commence à en avoir vraiment marre de ce genre de crise. Sa patience a des limites ! Il sort de chez lui et va taper chez elle. Mais elle ne l'entend pas trop occupé à pousser un hurlement plein de sanglots. L'homme décide alors d'appeler la police. Il en a marre, tant pis si les autres voisins le trouvent injuste. C'est vrai qu'elle vient juste d'avoir un enfant et de perdre son mari mais ce n'est pas une raison pour emmerder tout l'immeuble ! Ça fait déjà deux jours que son mioche hurle ! Il prit son téléphone et composa le numéro d'urgence.

Vingt minutes plus tard deux agents en uniforme arrivèrent, ils parlèrent quelques instants avec le voisin puis ils lui demandèrent de rentrer chez lui. Les deux policiers frappèrent eux aussi à la porte mais plus fort et en indiquant qu'ils étaient des agents de police. La porte resta close. La femme se tut. Le seul son perturbant le silence était les pleurs du bébé. Les deux policiers appelèrent le concierge pour qu'il leur ouvre l'appartement. En entrant ils découvrirent quelque chose qui les cloua sur place, le concierge qui avait vu par-dessus leurs épaules ne put s'empêcher d'aller vomir un peu plus loin. Horreur. Sang. Noir. Des mots qui tournaient en boucle dans les esprits des trois hommes. La femme s'était ouvert les poignets avec un couteau de cuisine, son sang recouvrait le sol en de grosse flaques, des giclures rouges tâchaient les murs blancs et les barreaux du lit pour bébé. Un tout petit bébé la tête tournée vers le corps sans vie de sa mère hurlait dans son lit. Il était bien trop jeune pour comprendre ce qui venait de se passer, mais ces images resteraient à jamais gravées sur sa rétine, dans sa mémoire.

Le plus âgé des policiers réagit en premier. Il attrapa son collègue par les épaules et l'entraina vers la sortie. Il ferma la porte. Saisit sa radio et contacta le central. Il réclama une ambulance et le légiste.

Plus tard, ils arrivèrent sur les lieux. La nouvelle avait fait le tour de l'immeuble. Les ambulancières emmenèrent l'enfant à l'hôpital le plus proche.

La femme avait perdu son mari peu de temps avant la naissance de leur fils. Elle était tombée dans une grave dépression. Elle avait arrêté de s'occuper de l'enfant, d'elle-même, elle avait longuement hésité à se débarrasser de l'enfant croyant que c'était lui la cause de son désespoir puis après avoir réfléchis un moment elle c'était rendu compte que même sans le bébé elle n'arriverait pas à passer le cap, que la seule personne coupable de son état, c'était elle. Seulement elle. Alors elle avait supprimé le problème sans plus se préoccuper de la chose hurlante à côté d'elle. Elle avait abandonné son fils pour, le pensait-elle, rejoindre son mari, l'homme qu'elle aimait de tout son cœur et pour qui elle donna sa vie.

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