inter 4
— À quelle fréquence faites-vous ces rêves ?
— Ce ne sont pas « des » rêves. En réalité, il n’y en a qu’un seul. Un qui semble interminable quand je m’essaye à le raconter.
— Très bien. Mais ça ne répond pas vraiment à la question…
— J’ai l’impression que c'est depuis toujours. J'ai dit « j’ai l’impression » n’allez pas me faire dire ce que je n’ai pas dit. Chaque fois que je suis dans le noir, que ce soit en plein jour ou la nuit, je me vois comme un fantôme prisonnier de cette famille.
Aurore note cette phrase tandis que je jette un œil au gadget posé sur la table qui nous sépare.
— Vous pouvez me dire à quoi vous sert le dictaphone, si vous vous entêtez à gâcher de l’encre ?
— C’est juste un complément. Je m’en sers pour revivre certaines séances.
« Certaines » dit-elle ? Elle ment.
Elle réécoute toutes les nôtres, j’en suis convaincu.
— Si vous le dites.
— Laissez-moi vous poser une autre question, dit-elle.
Je lui fais un sourire sincère.
— J’aime votre manière de gaspiller mon argent, alors allez-y.
— Si vous pouviez défaire ce fantôme de ses chaînes, que pensez-vous qu’il ferait ?
Soudain, j’ai un coup de chaud.
— Cela me semble tellement évident. J’apprendrais à Lily et Martin comment gribouiller mes croquis.
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