Sous un pont, qu'y fait-on ? On cueille des champignons et on cherche des solutions !

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Domenico Scribus s’est réveillé tôt ce matin après sa nuit à la belle étoile et a fait diligence pour arriver au château à temps. En effet, le seigneur Jean de Beaune a fait appel à lui pour venir défendre sa fille, Romane, accusée de sorcellerie.

« Ah mon cher Domenico, vous voilà enfin ! J’ai bien cru que vous alliez m’abandonner et ne pas assister ma fille dans son procès ! »

« Eh bien, le pont s’est effondré, mon ami. Cela m’a retardé car il a fallu que je trouve une embarcation pour traverser la rivière !

Le Seigneur le prend par le bras et l’emmène rapidement dans la prison ecclésiastique où des soldats les laissent entrer. Un évêque aux cheveux blancs les accueille froidement, dans le hall, sans leur proposer de s’assoir.

« Sire de Beaune, Messire Scribus. Je sais ce qui vous amène ici, mais vous comprendrez que je ne peux vous accorder de faveur. Il ne vous sera pas possible de rencontrer la sorcière ! Son procès est prévu demain et sa condamnation après-demain. Je ne peux donc rien faire pour vous. Bonne journée à vous. »

L’évêque fait mine de se retourner et de laisser les deux visiteurs à la porte, mais Domenico l’interpelle.

« Monseigneur, attendez un instant ! Je pense que je peux vous convaincre de nous laisser approcher la fille du seigneur de Beaune ! »

L’évêque s’arrête mais ne se retourne pas. Domenico prend ça comme un signe positif.

« J’ai en ma possession une relique de Sainte Marthe que je suis prêt à confier à votre communauté si vous me laissez aborder la jeune femme pendant une heure. »

L’homme d’église refait face aux deux hommes.

« Je connais votre réputation, messire Scribus. Je ne doute pas que la relique soit vraie. Cependant, pourquoi pensez-vous que cette relique puisse m’intéresser ? Et quelle garantie j’ai que la Curie ne va pas vouloir la récupérer ? »

Domenico sait qu’il a réussi à piquer l’intérêt de l’évêque.

« Vous savez comme moi qu’une telle relique va attirer les fidèles dans l’église où elle sera consacrée. Et qui dit fidèles, dit dons… Je vous laisse imaginer les sommes que cela peut représenter… »

L’enquêteur italien laisse passer quelques secondes, afin de laisser à son interlocuteur le temps de faire quelques calculs mentaux, puis reprend :

« J’expliquerai à la Curie que je me suis senti menacé et que, pour éviter de perdre la relique, je l’ai confiée à un homme d’église de toute confiance. Ils n’en ont pas vraiment besoin, de toute façon. Et en choisissant ainsi pour eux, je leur évite des heures de concile afin de choisir la destination finale du bijou. Ils me remercieront et auront votre nom en tête. Nous sommes ainsi tous les deux gagnants ! »

L’évêque le regarde longuement sans répondre. Il pèse le pour et le contre puis répond à la requête en tendant la main :

« Une heure. Pas une minute de plus. Donnez-moi le bijou ! »

Domenico lui confie alors le petit tube en or contenant la relique. L’évêque, le regard avide, s’empresse de le saisir, puis il fait signe à un soldat. Celui-ci les emmène à une cellule au fond d’un couloir dont les murs en pierre contribuent à maintenir une froideur qui les fait frissonner. Il leur ouvre la cellule, puis se retire de quelques pas, sans s’éloigner trop.

« Je vous ai dit que je n’avais pas faim !

Cessez donc de faire les importuns !

Je ne veux voir que mon père !

Ou alors, enlevez-moi mes fers ! »

Domenico sourit en entendant la voix féminine qui s’exprime derrière la porte. Il se dit que la petite fille espiègle qu’il a rencontrée des années auparavant a grandi mais n’a rien perdu de son caractère ! Ni de cette manie de s’exprimer en vers lorsqu’elle est sous le coup de sentiments forts.

Il fait signe au seigneur de le précéder et entre dans la petite pièce où est enfermée Romane. Celle-ci fond en larmes en voyant son père et se précipite dans ses bras, ce qui laisse le temps à Domenico de l’étudier un peu. C’est un petit bout de femme, aux cheveux roux et au teint très pâle. Elle a une jolie poitrine à peine dissimulée sous une fine robe blanche. La pauvre, se dit l’italien, elle doit geler avec une pareille tenue !

Romane aperçoit enfin Domenico et lui lance un regard méchant.

« Que me voulez-vous ?

Laissez-moi profiter de mon père, je suis à bout !

Je sais que je vais finir au bucher !

Ils n’ont que ça en tête de me faire brûler ! »

Son père a un haut le cœur en réalisant le désespoir de la situation de sa fille.

« Dame Romane, vous ne me reconnaissez surement pas, mais je suis Domenico, un ami de votre père. Je suis ici pour essayer de vous sauver, mais nous n’avons qu’une heure pour y arriver. Je dois tout savoir sur ce qui est arrivé pour que vous soyez enfermée ici ! »

Romane a un éclair de reconnaissance envers l’italien et elle fond en larmes sans répondre.

« Allons ! Cessez de pleurer ! De quoi vous accuse-t-on ? J’ai besoin que vous vous confiez à moi si vous voulez avoir une chance de vous en sortir… »

La jeune femme s’emporte alors :

« Ils pensent que je suis une sorcière !

Que je suis un produit des enfers !

Que je suis responsable de la chute du pont

Du contraire, jamais ils ne me croiront ! »

Domenico essaie de passer outre les vers pour comprendre ce qu’il se passe.

« Ils pensent que c’est vous qui avez causé la chute du pont ? Qu’est-ce qui leur a mis ça en tête ? »

La belle jeune femme entre dans une transe un peu mystique et répond :

« J’étais en train de ramasser des champignons

J’étais malheureusement sous le pont

C’est l’endroit où il y en a le plus, du sol au plafond

Et en me relevant, je me suis cogné le front

Un bruit venu des tréfonds

Et c’en était fini du pont. »

Domenico la regarde, étonné de sa réponse. Pas étonnant qu’ils la prennent pour une sorcière ! Une rousse qui parle en vers, quel phénomène !

« Vous vous êtes cognée sous le pont et il s’est effondré… Mais ce n’est qu’une coïncidence ! Ce n’est pas possible autrement ! »

Il réfléchit un peu et lui demande si elle se souvient d’autre chose avant l’effondrement du pont.

« J’ai juste entendu un bruit de roulement

Et ensuite, il y a eu l’effondrement

Je pense qu’une charrette est passée

Et ensuite, les pierres se sont écroulées. »

Domenico se dit qu’il va lui falloir mener l’enquête. Le procès est dans 24h. Cela lui laisse le temps de faire son métier, mais la tâche pour prouver que l’Eglise s’est trompée ne sera pas aisée. Il ressort de la prison, laissant la jeune femme être consolée par son père.

Il se dirige vers le pont effondré et se met en quête d’indices. Il interroge les paysans qui vivent à proximité et voit que, déjà, certains d’entre eux sont revenus et se servent en champignons…

Il escalade une partie de l’éboulis et se retrouve en dessous de l’arche du pont dont il reste une grosse moitié. Il observe comment il s’est effondré, il cherche à comprendre et se met à faire des dessins, des calculs. Le temps presse… Il est convaincu que

sous le pont,

il n’y a pas que des champignons,

il y a aussi la solution,

le moyen d’obtenir pour la jeune femme l’absolution.

Domenico va-t-il résoudre le mystère du pont ?

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