Chapitre 15 - Mais crève, charogne !

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Juste une lueur céleste mourante permettait de distinguer les contours de cette terre desséchée. Autour de lui, sa famille ; certain(e)s étaient glabres et aveugles, d'autres plutôt humains, mais plus on passait de temps ici... Devant, son Aîné. Le Premier Né. Celui-Qui-Écoute-Le-Non-Temps. L'Enfant de la Chose.

Et son visage n'exprimait pas la joie de le revoir. « Yannis » se prosterna devant lui. Il attendit un long moment, quand son aîné s'exprima :

— Je ne t'ai pas donné un corps pour que tu en disposes séance tenante, que je sache.

La menace le fit frémir, et Yannis gémit :

— J'ai abaissé ma vigilance, et je mériterais toute punition.

— Lève-toi.

L'injonction fut aussi sèche que le bois mort qui craquait sous ses doigts. Avec une frayeur dédoublée, il se redressa lentement… Pour croiser un regard aussi près qu'indivisible.

— Je ne punis que ceux qui faillissent. As-tu failli ?

Yannis se pinça les lèvres, avant d'opiner doucement de la tête. L'Enfant soupira, congédia d'un geste la famille pour qu'il ne reste qu'eux deux, simples fétus de pailles enserrées par le vent dystopique de l'Entre-Monde.

— Tu es faible, car tu es jeune, expliqua son aîné avec un ton réconfortant ; il le prit par l'épaule.

Ce contact qu'il n'avait jamais reçu de son existence, bien que froid, sans texture ni saveur, était d'une chaleur matérielle que rien ni personne n'aurait pu remplacer.

— Mais tout ce que je souhaite, c'est bien faire ! sanglota le changeforme, avant de gronder : Mais ce sont ces saletés de mages, ils gâchent tout à chaque fois !

— Je vais te confier une nouvelle mission.

Il revint dans l'instant dilaté par la translation hypercosmique. Rouge,orange ou jaune ? Couleurs chaudes, mais l'odeur ne démordait pas. Par contre, il ne s'attendait pas à tomber sur eux.

* * *

Lorkhan allongea Kara sur le lit de son appartement, remontant délicatement la couverture sur son corps frigorifié et partiellement pétrifié. Elle s'était endormie sur son dos pendant le voyage, et Lorkhan avait dû fouiller ses poches pour récupérer ses clés, et il avait mit un moment avant de comprendre comment le mécanisme fonctionnait.

Une fois qu'il fut sûr qu'elle s'était endormie, et que son pouls se faisait régulier, il regarda la pièce ; la lumière tamisée par les rideaux rouges et oranges faisaient penser aux sombres forêts de Kadash lors des longues soirées d'été. L'odeur était, par contre, différente ; âpre ou sucrée, il n'aurait su le dire. Un buffet attira son attention, et en s'y approchant, il constata la présence d'un petit tableau monté sur un cadre et des lettres.

Le tableau représentait bien sûr la fameuse scène qui était apparue aux yeux de tous avant l'Apparition ; au travers d'un ciel aux couleurs de jour et de nuit, avalant un disque noir cerclé de feu, deux monstres s'affrontaient. Lorkhan ne s'était jamais beaucoup occupé de Yannis, ayant délégué cette tâche à Kara. Il avait oublié pourquoi.

Les lettres venaient principalement d'Horebea. Dans ses souvenirs, c'était une fille boute-en-train, revêche et très bagarreuse, à la limite de la violence gratuite. Ce genre de soldat se mettait souvent de côté pour les missions sur le terrain, incontrôlables comme ils étaient, mais… En tant que fille, il n'avait jamais essayé de prendre du temps avec elle.

Il s'assit pour faire quelque chose qu'il n'avait plus fait depuis des lustres ; prendre du recul, penser. En regardant une nouvelle fois Kara, il se demandait pourquoi il n'avait jamais retenté de lui parler. Et, avec ce fameux recul, il constatait qu'il n'avait fait que son travail. La question, c'était pourquoi ? Quelle était la raison de son indéfectible loyauté à l'Empire et plus précisément au Dogme d'Abraxas, qu'on lui avait retiré l'instant même où il se sentait le plus perdu ?

Il restait un mage avant d'être un soldat, et un mournien avant d'être un mage. Mais un père ? Non, il ne pouvait en être un, puisque le lien entre lui et sa fille s'était brisé, asséché par le tarissement d'émotions pourtant si importante pour le clan des Ybris.

Son épée était sa plume, son moyen de communication. Maintenant ne restait que sa Nature, qui ne pouvait que voler la bile amère des songes et pensées. Un crû qu'il s'était forcé d'apprécier au gré des marées de la vie, mais maintenant avait perdu sa saveur. Tout ce qu'il avait tenu comme acquis lui semblait désormais aussi étranger que la toute première fois.

— Hmm…

Il se retourna ; Kara s'était levée, la tête dans une main, l'autre la soutenant. Propulsé par un instinct oublié, Lorkhan l'aida à tituber jusqu'à la salle d'ablutions, ou « salle de bains » même si aucune baignoire ne s'y trouvait. Sans réfléchir, l'ancien commandant lui déroba sa douleur, mais…

— Arrête.

— Excuse-moi… (il fit refluer son pouvoir)

Elle inspira un bon coup, avant de s'approcher de la drôle installation en métal ; elle fit tourner un loquet et de l'eau coula. Il sursauta et n'eut pas le temps d'arrêter son geste qu'elle plongea ses mains sous le liquide pétrifiant. Cependant, à son grand étonnement, il ne se passa rien de tout cela.

— L'eau n'est pas mortelle si sa concentration est faible, expliqua Kara en faisant tourner le loquet pour couper l'arrivée d'eau, puis s'essuya les mains à l'aide d'une serviette. Maintenant, dis-moi ce que tu fais ici.

— Je… (il hésita ; en effet, que faisait-il ici ?)

— Si tu crois que « rattraper le temps perdu » peut être une activité de retraité, tu es vraiment plus bête que je ne le pensais.

— Ce n'est pas ce que tu crois…

— Quoi, alors ? avait-elle haussé la voix en frappant le bord du « coule-eau ». Tu te décides enfin à prendre en main ton rôle de père. C'est quoi, la suite ? Tu vas me trouver un parti adéquat pour renforcer la famille ?

— Tu sais très bien que je ne ferais jamais cela, répliqua-t-il, heureux de pouvoir affirmer quelque chose de vrai.

— Alors qu'est-ce que tu fais là !!? hurla-t-elle.

— Euh, excusez-moi de vous déranger en pleine discussion, mais…

Lorkhan tourna la tête, pour voir la chose la plus étrange et ridicule qu'il n'aurait vu dans sa vie ; une moitié de Yannis les observait d'un air gêné.

—…vous pouvez m'aider à sortir ?

— Que… Comment es-tu arrivé ici ? balbutia Kara.

L'autre haussa des épaules, prenant un air ennuyé qui fit rire Lorkhan. Sa fille lui lança un regard courroucé, et il s'empressa de prendre les aisselles du mage légendaire pour le désencastrer du sol.

— Je t'ai posé une question, ne me fais pas répéter ou sinon…

— Du calme ! Laisse-moi remercier ton père… (il se tourna vers Lorkhan) Vous avez une forte poigne !

— J'imagine.

— Yannis ! souffla Kara. Tu saignes !

— Oui, oui… Mais ça s'est refermé, donc rien de grave.

— Où…

— Un repaire de Dardants (Lorkan se raidit) Ah, vous les connaissez, on dirait ! Ce ne sont pas les plus amicaux des mourniens, si j'ose dire…

— Mais… Et Béryl ? Bartavius ?

— Je ne sais pas. Mais connaissant le vieux renard, il les a sûrement vaporisé.

— Qui ça, il ? demandèrent à l'unisson Kara et Lorkhan, avant de se regarder.

— Sharivari.

L'ancien commandant se précipita vers Yannis, lui agrippa le bras pour le regarder dans les yeux, et lui somma de répéter. Il devait être sûr.

— Vous êtes pas sourd, que je sache ! maugréa le magicien en se dégageant de l'emprise solide.

— Pè… Lorkhan, qui est Sharivari ? s'enquit Kara.

— C'était un magicien de génie que j'escortais durant mes jeunes années. Yannis, peux-tu nous amener là où tu étais ?

— « Nous » ?

— C'est dans mes cordes, répondit Yannis en ignorant Kara.

Il croisa ses bras, les fit tourner vers l'intérieur, paumes vers le bas, et se mit à pousser un bouton invisible. Un grésillement, qui se mut en ronronnement puis en grondement, en parallèle au tourbillon de lumière qui s’élargissait brusquement. Soudain, le vortex fut traversé par une onde, comme une pierre jetée dans l'eau.

— Il m'empêche de me stabiliser. Entrez vite ! ordonna Yannis.

Sans se faire prier Lorkhan sauta dans le portail, suivi de près par les deux jeunes. De l'autre côté, un terrain calciné qui entourait un manoir branlant, aux murs explosés. Lorkhan s'écarta pour laisser passer les deux autres, et remarqua un corps non loin. Il s'y précipita ; c'était une jeune fille brune aux joues pleines, portant des lunettes sur un nez épais.

Un doigt sur son poignet ; son pouls était irrégulier. Tandis que Kara et Yannis s'approchaient, il enjamba la fille et constata qu'un éclat de bois s'était fiché dans sa chair.

— Elle souffre… (Kara s'était penchée vers elle, en face de Lorkhan) Mais elle n'a pas peur pour sa vie. Impressionnant !

— On peut encore la sauver. Tu connais des charmes de soin ?

— Je vais voir ce que je peux faire, répondit-elle avant de se tourner vers Yannis. Aide-moi.

Ils se penchèrent tous deux au-dessus de la blessée, et récitèrent des Mots et coulèrent des runes qui glissèrent sur les vêtements. La vision de sa fille, les mains plaquées contre le corps, son épaule soutenue par la magie et la main de Yannis, brillant d'un bleu vaporeux… Un serrement au cœur, Lorkhan détourna le regard. Il se redressa pour sortir de cette scène qui faisait remonter des souvenirs douloureux.

Il se dirigea parmi les décombres vers le manoir. Ne prenant pas le temps d'admirer l’architecture, il porta son regard sur les murs et le sol ; l'explosion avait été dirigée dans une seule direction, un seul sens. Par contre, rien n'avait brûlé ici… La pression a généré de l'énergie thermique plus loin, ce qui veut dire… Il suivit du regard les marquages au sol, pour finalement arriver à la source ; deux empreintes de pas bien visibles. À l'aide de quelques gestes rapides, il traça un simple sortilège de détection, qui lui apprit que le coupable était toujours ici. Le mince fil de magie menait vers…

L'escalier. Lorkhan suivit le chemin indiqué par son sort, évitant de marcher sur les parties effondrées, jusqu'à parvenir au premier étage. Là, le fil l'emmena à un bureau. Il ouvrit la porte.

Affalé sur des piles de livres renversées, accablé d'une respiration sifflante, Sharivari le dévisageait d'un œil fatigué. Lorkhan tira son épée, toujours cinglée à sa ceinture qu'il en oubliait le poids.

— Je n'aurais… Kof kof… pas cru que tu arrives… Hrmpf… jusqu'ici.

— Malgré les détours et retours, je reste votre garde du corps.

— Ha !

Sharivari cracha du sang, avec si peu de force qu'il ne fit que couler sur son menton de vieillard. Assez proche pour remarquer les détails de son visage, Lorkhan constata que son ancien employeur avait les yeux traversés de veines lumineuses, qui débordaient sur sa face tirée par la fatigue des âges. L'autre ricana.

— Je n'en étais pas loin, de toute façon. Quelques sortilèges d'illusion m'ont permis de masquer ma faiblesse auprès de mes apprentis…

— Où sont-ils ? et Lorkhan pointa son épée sur la gorge du vieux magicien

— Qui sait ? Ils sont déjà loin, en train de lécher leurs blessures… et d'attiser les braises du conflit et de leur haine.

— Tu n'es plus rien. Pas même un martyr, ni une légende morte.

— Oh, je sais qu'une autre est venue prendre ma place… Mais mon nom et mon histoire ne sont pas les armes qu'ils useront pour vous détruire.

Sharivari empauma la lame et darda un regard vindicateur sur Lorkhan, qui ne put reculer, épaté par la formidable force que le vieux mourant faisait preuve.

— Vous avez déjà perdu. Le Tranchecoeur est à nous.

Il tira l'arme dans sa poitrine avec un rire sardonique, la lueur dans ses yeux disparue. La prise se s'amollit un instant plus tard, laissant Lorkhan se libérer avec un sursaut. Il était bouleversé, et resta silencieux même quand sa fille et son compagnon vinrent le rejoindre dans ce mausolée littéraire.

* * *

S'étendre sur le sujet de la métaphysique est un travail de longue haleine. Tenez, rien qu'avec la question de l'omnipotence, il suffit d'un paradoxe et toutes les discussions repartent à zéro ; et comme nous savons tous qu'il est impossible d'être absolument d'accord avec qui que ce soit, sur une thèse qui engendre des idées sur l'absolu lui-même, la colle est bien figée.

Mais il est un monde qui est presque au total opposé de ce dernier, tout en étant son semi-inverse en partant via la médiane de la racine. Incompréhensible ? Naturellement, mais nous pouvons ressentir. La sensation. L'émotion. L'indirectement incorrect du terme qui s'efface derrière nos pensées évasives. Nous nous comprenons mieux à travers ces choses-là, sans pouvoir mettre de mots là-dessus.

Ce couperet « très forcément magique », par exemple, appartenait à cette catégorie. Et Saulia en faisait les frais sans vraiment s'en rendre compte. Un peu comme une respiration, vers laquelle on ne tend plus par réflexion intrusive, mais plutôt exclusive, autrement dit un réflexe. Et elle sentait le réflexe, le besoin de ne pas lâcher ce couperet.

Tandis qu'ils marchaient à travers les longs couloirs égouttés et ragoûtants, Endath soulignait d'un signe de tête l'outil rouillé, avec un œil soupçonneux :

— Ce truc est bizarre… Nuzzeg, tu le sens aussi ?

— Oui, c'est… étrangement familier et lointain à la fois, comme un souvenir qu'on aurait trempé dans du lait chaud de Yattoon ?

— Quoi ? (la pyromancienne se tourna vers lui avec un regard désabusé) Tu perds la boule ?

— Je vois ce qu'il veut dire, intervint Saulia. La chose, elle… ne parle pas comme un anneau maudit, ne luit pas tel un joyau enchanté… (elle regarda le couperet ; césure intransigeante autour de mains plutôt tacites… Des mains tacites ?) Il doit catalyser des émotions environnantes de manière aléatoire.

Les deux Dardants la dévisagèrent avec un air perdu, et Saulia se tourna vers Horebea, qui l'ignorait depuis déjà un bon moment. Soudain, celle-ci s'adressa à Nuzzeg :

— Quand vous parliez de « rampent vers la surface », que vouliez-vous dire ?

— Les Dardants ne constituent pas seulement les magiciens renégats, mais ils comptent aussi des humains dans leurs rangs. Comment croyez-vous qu'ils se soient aussi facilement manifestés depuis l'Apparition ?

— On arrive.

Ils se tournèrent vers Endath, qui montrait une porte dérobée éclairée par une faible lampe. Une fois devant, la pyromane toqua cinq fois à la porte. Un judas s'ouvrit, découvrant deux yeux perçants et qui lançaient des éclairs. Une voix grinçante jaillit :

Pour ceux qui seuls savent sentir le sang sans s'essorr…

— Un mot de plus, râla Endath en frappant la porte du pied, et je te crame la gueule, Mikshot.

Les yeux se plissèrent, puis le judas se referma. Un grincement, et la porte coulissa, les laissant entrer.

L'intérieur avait tout d'une base secrète ; creusée à même la pierre, large, des cordages pour soutenir des vêtements qui séchaient et les canalisations transportant gaz et eau. L'aménagement, c'est-à-dire des canapés, lits, tables, etc… semblait confortable, pour ne pas dire spacieux.

Mikshot, la personne qui leur avait ouverte, referma la porte sur eux. C'était un beau jeune homme châtain au visage anguleux, au nez grec et à la bouche pincée par un rire jaune. Drapé d'un cape, un arc et un carquois dans son dos, une paire de lunettes d'aviateur sur la tête, il avait tout d'un aventurier post-apocalyptique. Si on oubliait l'odeur âcre et ses bottes mouillés aux couleurs douteuses.

— T'as un fond de teint horrible, ricana-t-il vers Endath, qui gronda dans sa direction, avant de se tourner vers Horebea : M'dame, ça fait longtemps. Vous faites du babysitting ?

— Mikshot. Toujours aussi aigu.

— Et pas très poli, ajouta Saulia.

— Pardon, mais qui aime bien châtie bien. D'ailleurs, je vous ai pas demandé votre nom… ?

— Saulia.

— Comment ?

— Vous avez l'air plus sûr de vos yeux que de vos oreilles, répliqua-t-elle avec un sourire.

— Ah ! On parle la même langue, j'aime beaucoup ! (Il glissa son bras autour de l'épaule de la rousse, qui le repoussa) Pardon, j'oubliais que vous et vos semblables ne sont pas très contacts.

— Dame Horebea !

Une fille apparut dans leur champ de vision, vêtue d'une robe de magicien élimée. Une frange violette et l'autre côté rasé, un nez bien plat et une bouche pleine qui souriait avec une telle sincérité que c'en était rafraîchissant. La fille s'inclina bien bas devant Horebea, qui lui intima de se redresser. L'autre se jeta dans ses bras en pleurant, tandis qu'Endath râlait copieusement. Saulia remarqua le regard attendri de Nuzzeg, et celui entendu de Mikshot.

Elle venait de se rendre compte qu'une équipe venait d'être réunie. Ludwig lui avait parlé des Scaravengers, mais le constater de ses yeux était une expérience différente ; pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait… à l'écart. Et, contrairement à ce qu'elle redoutait, c'était plutôt reposant.

Comme le temps des retrouvailles était important, elle s'attela à la découverte de la pièce dans ses détails. Ici, une télévision datant de 2014, branchée à la même multiprise que le grille-pain, ce qui la fit sourire ; on aurait pu prendre cette endroit pour une colocation. Spéciale, mais ça restait assez humain. Là, des miettes sur la table témoignaient d'un repas pris dans la hâte… ou l'appétit. Sur le canapé, des comics et des livres en tout genres (surtout de langues) se mélangeaient à des vêtements éparpillés. Et…

— Si vous étiez une espionne, vous seriez piètre.

Mikshot l'avait rejointe ; il fuyait peut-être les retrouvailles, qui repartaient en force. Désireuse d'en apprendre davantage, elle lui répondit :

— Faisons comme si j'en étais une : que faisiez-vous ici ?

— On vit, rétorqua-t-il en haussant des épaules ; il attrapa un comics, le feuilleta, et le jeta sur le canapé en soupirant : Mais on se prépare aussi.

— Pour vivre à la surface ?

— Pfff… J'ai pas très envie de finir mes jours dans un endroit clôt sous un ciel gris et triste.

— Tous les endroits sur Terre ne ressemblent pas à Oxford… (elle attrapa un manuel de photos qu'elle avait repéré sous un slip beige et mauve) Voyez ?

Elle ouvrit la page aux chutes du Niagara, passa par les Cévennes pour voyager jusqu'au Kilimandjaro. Le regarde Mikshot s'illumina, il tendit la main vers les images… mais stoppa son geste et détourna le regard. Saulia referma doucement le livre, ressentant son dépit comme si c'était le sien.

— On se prépare à combattre les Dardants. C'est Nuzzeg qui nous a poussé à faire ça. On a fait le tour de tous les mages renégats pour vérifier où se trouvaient leurs allégeances, et on a réussi à se donner une date.

— Combien êtes-vous ?

— Deux-cent cinquante-trois.

— Contre des milliers de magiciens fanatiques et sûrement entraînés à la guerre sainte ? (Saulia secoua sa tête) C'est complètement irréaliste.

— On n'est pas idiots au point de se suicider comme ces tarés ophiophiles ! On peut lancer des raids, des infiltrations…

— Je ne questionne pas votre intelligence stratégique, bien au contraire. Mais tu… Je peux te tutoyer ? (Mikshot opina du chef) Tu sais qu'en face, ils sont autant, sinon plus intelligents que vous. Ils vous anticiperont, vous tendront un piège.

L'archer fit claquer sa langue et s'affala sur le fauteuil, le regard tourné vers ses coéquipiers ; ceux-ci s'approchaient, ayant sûrement entendu leur conversation de loin. Horebea intervint :

— Vous êtes peut-être bien préparés, mais nos ennemis le sont aussi. Il n'y a rien qu'ils ne puissent faire.

— Et si nous utilisions les armées humaines ?

— À quoi tu penses, Ashuz ? (Endath secoua sa tête) Aucun humain sain d'esprit n'accepterait de se mêler à ce conflit…

— Nous possédons une arme que les Dardants n'ont pas.

Tout le monde se tourna vers Saulia, qui montra du doigt les canalisations.

— Il y a quelque chose dans notre eau qui vous pétrifie, ou du moins vous ralentit. Si nous pouvions inonder les souterrains, nous pourrons rameuter les Dardants mourniens à la surface.

— Et qu'en est-il des partisans humains ? s'enquit Nuzzeg.

— Ces derniers devront se rendre, ou se battre ; dans les deux cas, ça nous arrangera, mais…

— Mais ? firent à l'unisson les Scaravengers.

— Je préférerais attendre que Ludwig ait réussi son entreprise.

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