La marque de l'inconnue

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Domenico Scribus, l’enquêteur romain, est l’invité du seigneur. Un émissaire de Vatican, c’est quelqu’un d’important ! Il faut bien s’en occuper ! Et donc, en son honneur, le seigneur a organisé une soirée musicale et costumée. Domenico, toujours impatient de rentrer chez lui, à Rome, a essayé d’esquiver, en arguant qu’il n’avait pas de costume, mais rien n’y a fait. Et puis, le seigneur lui a parlé des jeunes demoiselles qui seraient présentes, déguisées en naïades impudiques. Il n’a pu résister.

Le voilà donc qui se promène dans le grand hall du château, habillé en… romain, bien sûr ! Pas difficile, il a mis sa toge blanche d’apparat et sa cape rouge, et le seigneur lui a prêté un masque noir habillant ses yeux. Le romain masqué… Un nouveau concept qu’il faudra peut-être développer un jour !

Il écoute un instant la musique qui est jouée par un vieil homme à la barbe blanche et l’air malicieux et une jeune femme vêtue d’une splendide robe rouge qui la met bien en valeur. Mais Domenico n’est pas attiré physiquement par elle. Elle est trop jeune même si elle est belle, d’une splendeur trop éthérée et inapprochable pour lui. Il devine sous son masque rouge un regard aussi rieur que celui du vieil homme à ses côtés. La musique est vraiment formidable et contribue à rendre l’atmosphère un peu différente… S’il n’était pas un émissaire de la curie, il parlerait presque de magie plutôt que de mystère divin provenant de cette musique… C’est comme si une sorte de lumière jaillissait de leurs instruments !

Une femme s’approche de lui. Elle porte une tenue de lavandière, bien échancrée et qui lui laisse les épaules dénudées. Ce qui le frappe surtout, c’est son masque. Il est de couleur dorée et Domenico se demande si ce n’est pas de la poudre d’or qui parsème ses contours ainsi que les magnifiques plumes d’oie, elles aussi dorées.

« Bonjour, bel Italien. Il parait que vous êtes envoyé par Rome pour enquêter dans nos contrées… »

Domenico ne répond pas tout de suite. Il est charmé par la voix qui lui parle. Mature et profonde. Il a l’impression que la dame est de bonne naissance et exprime une sensualité rare et admirable.

« Bonjour, jolie lavandière. Je viens en effet de Rome. »

Domenico ne se gêne pas pour la dévisager des pieds à la tête. Il se rend compte, malgré le masque d’or, qu’elle est un peu plus âgée que lui. Il devine quelques petites rides autour des commissures des lèvres, ce qui démontre une dame qui sourit souvent. Ses lèvres sont pulpeuses, d’un rouge carmin qui donne envie de les embrasser et d’y gouter.

« Ce que vous voyez vous plait, il me semble. Tant mieux. Je suis prête à vous offrir tout ce que vous désirez ce soir, mais pour cela, il faudra d’abord m’aider. »

Toujours cette voix sensuelle et chaude. Cette femme dégage une telle aura que Domenico est subjugué. Il sent son désir pour elle le saisir et occulter toutes ses autres pensées.

« Vous aider ? Mais je suis à votre service, corps et âme, chère Madame ! »

Un petit sourire illumine le visage de la lavandière ainsi que ses yeux de couleur verte qui brillent presque autant que l’or de son masque.

« Votre corps, je sens qu’il va me combler. Votre âme, je vous souhaite de ne pas la perdre à m’aimer. Je suis bien trop vieille pour vous, jeune homme. »

Et elle éclate d’un rire cristallin qui remue tout l’être de Domenico. Il n’a plus qu’une idée en tête : l’aider pour pouvoir passer la nuit dans ses bras.

« Mon cœur est déjà séduit, Madame. Dites-moi comment je peux vous apporter mon aide, et je ferai tout pour mériter la récompense que vous me promettez ! »

« Suivez-moi dans mes appartements. Je vais vous expliquer. »

L’Italien la suit, envouté par le parfum qu’elle dégage ainsi que l’aura de sensualité et de plaisir qui émane d’elle. En haut des marches, elle sort une clé pour ouvrir une porte en bois et il se retrouve dans la chambre de la dame, une invitée de marque du Seigneur au vue de la pièce qui lui a été accordée. Elle lui fait signe de s’installer dans un des fauteuils près de la cheminée pendant qu’elle s’assoit sur le lit à baldaquins.

« Mon bel Italien, voici le mystère qui me ronge. J’ai besoin de vos lumières et de votre intelligence pour résoudre cette histoire. »

Domenico l’écoute avec attention, essayant de ne pas se laisser distraire par le magnifique regard de son interlocutrice. Le masque est tellement bien imaginé qu’il souligne les paupières de la jolie femme, la rendant plus désirable encore.

« Depuis que je suis arrivée ici, en ce château, je pense que je suis victime d’une malédiction… Chaque matin, à mon réveil, je trouve une marque rouge sur le haut de ma cuisse… Une marque en forme de croix... »

« Une marque en forme de croix ? Intéressant… Vous pouvez me montrer où cette marque apparait ? »

La belle inconnue, toujours masquée, commence à relever lentement sa robe, dévoilant d’abord un joli mollet, puis une jambe dont le galbe finit de charmer l’Italien. Elle dévoile ainsi peu à peu ses deux jambes puis pose son doigt sur sa cuisse, presque à la hauteur de ses hanches.

Domenico a du mal de se retenir et ne lui saute pas dessus au prix d’un bel effort de volonté.

« Je peux m’approcher ? »

« Faites donc ! J’ai besoin de comprendre ce mystère !!! »

L’enquêteur s’approche et se permet de caresser la cuisse de sa jolie lavandière. Il appuie ses doigts sur la jambe et la caresse sensuellement. La situation l’excite particulièrement, mais il ne voit rien qui puisse expliquer le mystère… L’inconnue, elle, apprécie et pousse des petits soupirs de bien-être et le laisse faire avec délice.

« Pouvez-vous me montrer comment vous vous couchez dans le lit que je puisse comprendre ce qu’il se passe ? »

« Il faut que je fasse comme si vous n’étiez pas là ? »

« Oui, c’est ça ! Montrez-moi tout ! »

Sans se faire prier, elle dégrafe sa robe d’un geste tout naturel et celle-ci tombe à ses pieds, la laissant dans une petite chemise blanche légère qui ne cache rien de ses formes. Elle se dirige vers son masque pour l’ôter mais Domenico la retient.

« Non, gardez le masque ! Je ne veux pas vous mettre mal à l’aise et je souhaite que votre identité reste un mystère pour moi ! »

Elle éclate de rire.

« Mais vous voyez tout le reste de moi ! »

« Eh bien, si un jour, je vous retrouve nue, je saurai vous reconnaitre ! Mais allez-y, couchez-vous que je puisse admirer… enfin, non, voir et comprendre ce qu’il se passe. »

Domenico a de plus en plus de mal à rester concentré sur sa mission. Il observe sa partenaire du soir se glisser sur son lit, puis se mettre de côté, lui offrant une vue sur ses fesses rondes et rebondies qu’il aura du mal à oublier, même s’il vit jusqu’à cent ans !

« Voilà, je me couche comme ça, et je ne bouge plus jusqu’au matin. C’est fou, mais c’est pourtant vrai. Et si vous arrivez à comprendre ce qu’il m’arrive et ce que je dois faire pour lutter contre cette malédiction, vous pourrez le vérifier en venant me rejoindre ! »

Domenico est content d’avoir une toge aujourd’hui car sinon, s’il portait des braies, il y serait très à l’étroit. Il demande à la femme allongée de se relever puis va examiner le lit. Son cerveau le titille. Quelque chose qu’elle a dit sûrement l’interroge. Ça le démange, même s’il ne sait pas bien pourquoi…

Il s’allonge à son tour et se met dans la position de sa belle inconnue, comme s’il allait dormir… Et là, Alléluia ! Il comprend tout ce qu’il se passe ! Il se relève d’un bond et ôte d’un geste rapide sa cape qu’il jette à terre.

« Madame, je connais le remède à votre malédiction ! Une nuit d’amour avec moi et plus jamais cette marque maléfique n’apparaitra ! »

« Vous me le promettez ? » minaude-t-elle.

« Je vous le garantis ! Foi de Domenico, je vais vous guérir de votre fléau ! »

« Oh, mon sorcier, je fonds pour vous ! »

Et c’est comme ça que l’enquêteur se retrouve à passer une folle nuit d’amour avec sa belle et son masque doré. Au petit matin, sa partenaire, qui dans le noir de la nuit a quand même enlevé son masque, se réveille et tout de suite regarde si elle porte la marque. Quand elle voit que sa cuisse est blanche et vierge de tout signe, elle crie de joie, ce qui sort Domenico de son sommeil.

« Oh, mon doux sorcier ! Vous avez réussi ! Vous êtes un vrai miracle à vous tout seul ! »

Domenico, encore endormi, sourit sans ouvrir les yeux.

« Vous voilà guérie ! Je vous l’avais promis ! Maintenant, si vous le voulez bien, allez-donc dans la pièce voisine, le temps que je récupère mes affaires et que je vous laisse. Je tiens à garder le mystère de votre identité, vu que j’ai résolu tout le reste ! »

La dame lui dépose un doux baiser et lui glisse :

« Je vous laisse mon masque en cadeau, il vous permettra de ne jamais m’oublier. »

Une fois qu’elle est sortie, Domenico regarde sa propre cuisse où il y découvre… La marque en forme de croix ! Il soupire et se lève, puis glisse sa main dans le matelas rempli de paille. Il fouille un peu et finit par y découvrir une petite croix en bois marquée des lettres "INRI"... Il se demande qui a bien pu mettre cet artifice religieux dans la couche de la dame... Peut-être un ancien amant jaloux ou un amoureux éconduit... Il ne se pose pas plus de questions que ça et il glisse la croix dans sa poche. En tous cas, c’est bien ça qu’il avait senti en se couchant la veille au soir et qui créait la marque ! Il se rhabille ensuite et quitte la demeure du seigneur, un masque doré à la main, le sourire aux lèvres, comblé de sa nuit de passion.

Domenico Scribus a encore résolu un mystère !

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