26. Retour

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Le Q.G. semblait vide, désormais. La moitié des Mambas Noirs gisaient encore sur le sable, et Mouse tremblait en composant le numéro de téléphone de leur famille. Mais il fallait les prévenir, d'une manière ou d'une autre, afin d'organiser les enterrements.

Ils avaient tous intégrés le gang par choix. Certains avaient pris ce chemin pour survivre, d'autre pour garantir leur sécurité face à leurs ennemis. Être en groupe permettait la force, la plupart du temps. C'était une question de lutte de pouvoir, perpétuelle, menant à la sensation d'invisibilité, de business croissant, et de fraternité inégalable. Tout ça, réduit à néant par un seul homme, profitant de l'impulsivité d'une seule femme.

Scarlet.

Assise sous le porche, comme à son habitude, elle observait la pluie laver la crasse du monde, une culpabilité dévastatrice prenant possession de son corps. A cause de sa colère, tous étaient morts en vain. Dans deux nuits, son île allait être détruite.

Elle avait pensé, l'espace d'une seconde, que les guerrières d'Alda étaient entraînées pour faire face à l'attaque. C'est ce qu'elle avait cru, en quittant l'île pour venir ici. Mais elle se rendait à l'évidence : on n'était préparé à la guerre qu'en la vivant, jamais avant.

La porte d'entrée grinça, dévoilant Maïa plus pâle que d'ordinaire. Si sa peau hâlée avait toujours l'air lumineux, elle n'était que blafarde, accordée à la grisaille du ciel. Elle sortit une cigarette de sa poche et l'alluma, expirant la fumée dans un soupir.

« Ce n'est pas de ta faute, tu sais. »

Scarlet leva la tête vers elle, sans un mot.

« Charly aurait gagné, de toute manière, ajouta-t-elle.

— Qui sait ?

— Les Mambas ont vécus dans cette ville toute leur vie. Le sang, les cris, les meurtres, ils n'ont connu que ça.

— Ce n'est pas pour autant qu'ils méritaient de finir ainsi.

— Ils se seraient battus jusqu'à la mort, Scarlet. Un jour ou l'autre, tout le monde fini par mourir. »

L'Aldienne baissa les yeux au sol. Rien de ce que disait Maïa ne l'aidait réellement à se sentir mieux.

« Je vais retourner sur Alda, lança-t-elle après un instant. Je vais les aider à détruire Charly.

— Seule ? (elle esquissa un sourire compatissant.) A quoi servirait nos affinités élémentaires, alors ?

— Maïa, si tu viens avec moi, ton frère et les autres découvrirons que tu es une Hyarani. Tu n'as pas à prendre ce risque.

— J'ai vu ce qu'était une guerre, de mes propres yeux. J'ai vu les gars avec qui j'ai grandi se faire massacrer, sans que je ne puisse rien faire. Alors je vais apprendre à me battre, et je vais me rendre utile. »

Scarlet se crispa. La dernière fois qu'elle avait accepté une demande similaire, Halia s'était retrouvée enfermée dans une cage quelques jours après.

« T'as une clope ? »

La voix de Scorpio retentit derrière elles. Maïa lui tendit un tube de nicotine, que l'ancienne mercenaire craqua de manière désinvolte, puis ferma la porte.

« De quoi est-ce que vous parlez ?

— Nous allons sur Alda. »

Scorpio lâcha un rire bref.

« Ok, je viens avec vous.

— Les filles... hésita Scarlet. Ce n'est pas une bonne idée. »

De nouveau, la porte s'ouvrit, sur Halia cette fois-ci.

« Oh ! s'exclama cette dernière. Qu'est-ce que vous faites toutes là ?

— Nous allons sur Alda. » répéta Maïa.

La princesse, surprise, regarda son amie avec des yeux ronds, qui ne contredit pas les dires précédents.

« Ce n'est pas drôle, réfuta-t-elle. Il est hors de question que vous retourniez sur l'île sans moi. »

Un sourire victorieux se dessina sur les lèvres de Maïa.

« Comment pouvons-nous nous rendre là-bas avant Charly ? »

« Vous téléporter ?! »

Garett, assit en tailleur dans une chambre avec Luttie, réprima un rire.

« C'est une blague ?

— Non, petit-frère, on a besoin de toi.

— Vous allez vous faire jeter d'Alda aussi vite que je vous y aurais amené. Avez-vous ne serait-ce que réfléchit à la tête que va faire notre mère en nous voyant ?

— Je préfères m'attirer les foudres de Janet que de la voir mourir, répliqua Scarlet.

— Vous n'allez jamais pouvoir la convaincre qu'un humain auquel on aurait implanté un Hyara est en chemin pour les tuer, soupira-t-il.

— Il faut essayer.

— Bien, mais je reste avec vous. Si on a besoin de renfort, je reviendrais ici chercher les autres. »

Halia acquiesça. Il y avait peu de chance pour que ça marche, mais elles se devaient d'essayer.

« Je ne veux pas être celle qui préviendra Aaron... »

Maïa éclata d'un rire nerveux.

« Me prévenir de quoi ? »

A l'unisson, tous se retournèrent vers la voix masculine qui émanait du couloir. A l'encadrement de la porte, Aaron se tenait les bras croisés, attendant que quelqu'un lui explique la situation.

« Nous allons sur Alda. » répéta une énième fois Maïa.

Il sourit, amusé.

« Bien sûr.

— Ce n'est pas une blague, répliqua Scarlet. Nous allons défendre mon île, sans quoi il n'y aura plus jamais de refuge pour les gens comme nous.

— Sans le quatrième élément ? C'est du suicide ! s'exclama-t-il, furieux.

— Je suis le quatrième élément. » annonça alors Maïa, d'une voix qui tirait du murmure.

Les yeux écarquillés, Aaron l'observa longuement, tentant vainement de déceler où était la moquerie.

« Ce n'est rien d'autre qu'une mauvaise blague, soupira-t-il. Ce n'est pas le moment de...

— Aaron, ça n'a rien de drôle ! coupa-t-elle. J'ai le Hyara de la terre, depuis toujours.

— Quand comptais-tu me le dire ?! vociféra-t-il.

— Jamais ! J'espérais ne pas avoir à vivre comme ça, mais nous n'avons pas d'autre choix.

— Est-ce que tu sais ce que tout ça signifie, au moins ?

— Oui... répondit-elle, tête baissée.

— Je vais devoir expliquer à Mouse qui tu es, il va me tuer pour t'avoir laisser partir !

— Et que penseras-t-il si je reste là, à attendre que mes amies sacrifient leur vie alors que j'ai la possibilité de les aider ? »

Il resta muet.

« Aaron...

— Bien ! céda-t-il, désespéré. Je vais trouver des renforts, et lorsque Charly sera là, nous viendrons défendre votre île. Maïa... (il hésita) Je t'ai vu grandir. Mouse et toi êtes mes meilleurs amis, alors je t'en prie...

— Je ferais attention. » promit-elle.

Il acquiesça. Ce n’était pas un grand sentimental, mais il était loyal, et dévoué. Si celle qu'il considérait comme sa petite-sœur venait à se faire tuer, il ne se le pardonnerait jamais.

« Vous quatre, alors ? demanda Garett, tendant les mains.

— Nous quatre. » répondit Halia.

Ils formèrent un cercle en se tenant les mains, et la seconde d'après, leurs corps disparurent dans un silence parfait.

Autour d’eux se dressaient d’immenses conifères aux odeurs hivernales. Le froid, qui n’était en rien similaire à celui de la ville des humains, était plutôt doux, moins agressif. Inspirant un grand coup, Scarlet sentit un pincement au cœur la saisir. Alda lui avait manqué, bien plus que n’importe quoi. De la même manière, Halia se mit à sourire, observant le paysage naturel dans lequel elle avait grandi.

« Nous devrions nous presser. » intervint Garett.

Maïa, de sa curiosité presque maladive, avança dans la forêt, épiant chaque particule de cet endroit qui lui semblait mythique et irréaliste. Elle qui avait vécu en tant que citadine, n’avait jamais respiré d’air aussi pur. Sans s’en rendre compte, elle dépassa les arbres et se retrouva sur un sol mi-sableux, mi-terreux, à découvert total. Si un silence paisible émanait du village, l’ambiance se transforma rapidement en terreur générale. Très vite, une trentaine de femmes se retrouvèrent à prendre en joux la jeune métissée au visage ébahi. Flèches, dagues et couteaux et pointés vers elle, attendant des explications. Mais en l’air, elle recula jusqu’à se heurter le dos contre un tronc massif. Elle hoqueta, cherchant rapidement ses mots dans son esprit afin de se défendre, mais elle ne sortit rien d’autre qu’un bafouillis inaudible.

« Je… J’ai… Enfin je suis… Scarlet ? »

Une femme, au visage ridé et aux cheveux châtains emmêlés avança, les yeux brillants de fatigue. Elle posa son arc par terre, et tenta de se montrer amicale.

« Tu connais ma fille ? »

Sortit en trombe des feuillages, Garett accouru vers Maïa, essoufflé. Il avait essayé de la prévenir, mais elle avait eu le don de se mettre dans les ennuis ! Du haut de ses un mètre vingt-cinq, il afficha un air désespéré en apercevant l’armée de guerrières prêtes à planter leurs flèches dans le corps de sa nouvelle amie.

Il tourna le visage, cherchant sa mère du regard, jusqu’à ce qu’il l’aperçoive, à sa gauche, le corps courbé et les cernes creusées. Janet s’écroula à genoux sur le sol, incapable de prononcer un seul mot. Son fils était là, devant elle, en chair et os. Combien de fois avait-elle rêvé ce moment ? Était-elle encore dans un songe ?

« Mère… »

Il peinait à la reconnaître. Lorsqu’il avait quitté Alda, elle était encore une femme distinguée, aux cheveux lisses tirés en arrière, à l’allure fière, froide et forte. Elle ressemblait davantage à Serafinet, sa grand-mère, qu’à celle qu’il avait connu.

Scorpio, Halia et Scarlet firent leur apparition ensuite, espérant de tout cœur qu’aucun des deux ne s’étaient mis dans le pétrin, mais il fallait croire que c’était bien pire que ça. Par défense, Scorpio attrapa ses couteaux, ce qui ne fit que renforcer la barrière agressive qu’avait formé les femmes de l’île. Halia se contenta de patienter, le cœur battant, que sa mère n’apparaisse pour la tuer de ses propres mains.

Scarlet, quant à elle, observa Janet, plus frêle que jamais, trembloter les yeux humides en passant le regard sur ses enfants tour à tour. Elle passa le bras sur l’épaule de son petit-frère, comme soutient émotionnel, ne sachant si elle devait prendre sa mère dans ses bras ou la laisser ici, choisir leur sort.

Derrière le cercle de guerrière s’éleva une couronne en bois de cerf, qui avança en silence, les pas légers, jusqu’à se découvrir aux intrus. Elle posa sa main fine sur l’épaule de Janet, et se planta face aux étrangers, reconnaissant les Jones, puis enfin sa propre fille, Halia Haffdóttir, la princesse d’Alda.

Sous le regard de Maïa, qui ne cessait d’admirer la beauté et la prestance de cette femme qui dirigeait cette île, elle observa avec froideur celle qu’elle avait mise au monde presque vingt-deux ans auparavant, et qui l’avait trahie. Mais comment paraître digne, même avec une couronne, lorsqu’on a devant soi ce que l’on a prié des jours et des nuits durant ? Elle, la Reine Willa, s’était agenouillée des heures entières, mains sur le sol, souhaitant à la Déesse corps et âme de protéger sa fille, coûte que coûte, et de la ramener en vie sur le rivage. Voilà qu’elle était ici, face à elle, plus forte que jamais, comme si elle était prête à prendre son destin en main.

« Votre Altesse. »

Halia se courba légèrement, suivie de Scarlet, Garett, puis des deux autres qui tentèrent une révérence peu gracieuse.

« Ne te peine pas à respecter les règles, jeune fille, tu les as déjà toutes enfreintes. »

Avant de partir, elle aurait eu peur de se confronter à la colère de sa mère. Ce jour-là, elle était plus sûre d’elle que jamais.

« Je demande Kyrié Aelius, gardienne des lois. » lança Willa d’une voix claire.

La concernée s’avança. Sa peau de chocolat illuminée par les rayons du soleil mettant en avant le tatouage encré de sa tempe jusqu’à son crâne rasé, elle se présenta, droite comme une pique, à la droite de sa reine.

« Nous n’avons pas eu de cas comme celui-ci depuis des siècles, reprit Willa. Quelle est la sentence ? »

Les yeux arrondis, Kyrié regarda la dirigeante avec surprise. Elle était une guerrière, une femme qui respectait les règles. Pourtant, elle savait que sa reine connaissait la réponse à cette question, et elle peinait à croire qu’elle ferait cela à sa propre fille.

« La pendaison, Votre Altesse. » répondit-elle, peu sûre.

Willa acquiesça.

« Vous serez donc pendus à l’aube demain matin. En attendant, enfermez-les à la frontière des marécages. »

Janet hurla, suppliant de ne revenir sur la décision. Ils étaient ses enfants, ils étaient là, en vie, elle ne permettrait jamais une telle chose. Mais elle était fatiguée, elle n’avait pas dormi durant des semaines. Avant, elle aurait été capable de retenir l’armée entière de guerrière, mais elle était bien trop faible pour se lever.

Willa leur tourna le dos, sans demander son reste, sans trahir la moindre émotion, et s’éclipsa, laissant les femmes ligoter ceux qu’elle traitait comme intrus, ignorant les pleurs de Janet, qui eut été autrefois la seule amie qu’elle n’avait jamais eue.

Le soleil, caché par les nuages qui avaient repris leur chemin dans le ciel, se coucha sur l’océan. La prison des marécages servait autrefois aux criminels les plus sérieux. A la frontière entre les deux régions, la cage s’enfonçait peu à peu dans la boue, jusqu’à ce que les prisonniers soient totalement ensevelis. Elle n’avait pas été utilisée depuis des années, si ce n’est des siècles, si bien que les barreaux avaient été rouillés par le temps.

Leur affinité n’était d’aucun secours. La gardienne des prisons en tout genre, Isy Polska, était une femme sans aucun cœur, qui n’avait enfanté que pour s’attirer une gloire qu’elle ne pouvait mériter. Elle n’avait jamais éduqué ses enfants, elle ne les avait même pas aimés. Certains doutaient même de son désir d’être mère, mais peu imaginaient la possibilité qu’une femme – quel que soit son rang – aient d’autres ambitions que d’enfanter. Elle était froide, sans cœur, et surtout, elle avait l’affinité d’oubli. Avec elle près d’eux, les Hyaras étaient comme endormis, donc impossible à utiliser.

Ne leur restait qu’attendre une pendaison prochaine.

Garett exprima sa culpabilité la plus profonde, dans des sanglots qu’il ne put contenir. Scorpio ne prononça pas un seul mot. Dans la nuit froide, leur sort fatal semblait plus proche que jamais. Et il n’avait aucun rapport avec Charly.

Une ombre, puis deux, approchèrent. Isy, qui s’en était rendu compte, attrapa son arc et visa les intrus, mais elle n’eut le temps de tirer. Son corps s’écroula sur le sol. Halia et Scarlet reculèrent au fond de la cage. Si les hommes de Charly étaient déjà là, l’île était en danger.

La lune fit sa place à travers les nuages, éclairant le visage des inconnus. L’un d’eux avait une couronne, typique, en bois de cerf majestueux. Intriguée, Halia fronça les sourcils.

« Mère ? »

C’était bien elle. Willa Haffdóttir, traversant la région forestière jusqu’aux prisons avec Kyrié.

« C’est moi. » murmura-t-elle en insérant les clefs pour déverrouiller les cages.

Le cliquetis fit écho dans la nuit.

« Je n’avais pas l’intention de vous pendre.

— Pourquoi ce spectacle alors ? s’étonna Halia.

— Tu comprendras quand tu seras reine que je ne peux déroger aux règles établies.

— Mais les contourner…

— Si personne ne le sait, ça ne peut nuire à l’ordre. »

Elle esquissa un sourire enfantin que sa fille ne lui reconnaissait pas.

« Avant que vous ne vous échappiez, reprit-elle, je dois savoir pourquoi vous êtes revenus. Vous connaissiez pourtant les règles…

— Votre Majesté, s’enquit Maïa d’un ton solennel un peu trop prononcé, nous sommes ici pour vous prévenir d’un danger. »

Les yeux de Willa s’arrondirent.

« La Déesse de la Nature m’envoie son châtiment, soupira-t-elle. J’aurais dû m’en douter.

— Il ne s’agit pas d’une quelconque divinité, madame, répondit Scorpio, cette fois avec trop de familiarité qu’il n’en était convenable. Un homme est actuellement en mer pour vous tuer. »

La reine esquissa un sourire moqueur.

« Un homme ? répéta-t-elle, amusée. Que pourrait donc bien faire un homme face à nos guerrières ?

— C’est un humain, mère, ajouta Halia. Un humain s’étant fait implanter le Hyara d’absorption. Il est en route, avec une armée, et il compte bien vous réduire en cendre jusqu’au dernier.

— Implanté ? Entends-tu par là que vous avez rencontrés les descendants hyaratiques d’Ulrich et Frank Krause ?

— J’ignorais que tu connaissais leur histoire…

— Tu n’es pas la seule à avoir passé ton adolescence dans les bouquins, révéla-t-elle avec un sourire bienveillant. Il n’y a pas un seul livre sur cette île que je n’ai pas épluché.

— Est-ce qu’il y a un moyen de lui enlever ce Hyara ?

— Oui, mais pour se faire, il faudrait que les jumeaux à l’origine de cette implantation puissent recommencer l’opération.

— Il n’en reste qu’un seul en vie…

— Alors je crains qu’il ne reste qu’à le tuer.

— Nous avons essayé, lâcha Scarlet. Mais il s’empare de notre affinité et les retourne contre nous. Il faudra bien plus que nos Hyaras pour le tuer. Il faudra une armée, toute une armée.

— Nous en avons une, répondit Willa, confiante.

— Une véritable armée. Votre Altesse, je connais nos principes et nos convictions, mais il faudra faire une exception.

— Qu’entends-tu par-là ?

— Entraîner hommes et femmes au combat. »

Elle éclata d’un rire franc.

« Très drôle, jeune fille, vraiment très drôle.

— Ce n’était pas une blague, ajouta Halia. Scarlet a raison, nous ne pourrons survivre si seule la moitié de la population se bat.

— Si ce n’est pas une blague, c’est une offense ! s’exclama la reine sur un ton un peu moins jovial.

— Il nous reste une journée, à peine, avant qu’il ne franchisse la barrière invisible qui protège Alda. Nous devons employer toutes les ressources nécessaires pour l’arrêter avant qu’il n’en reste plus rien.

— Je comprends pourquoi tu ne voulais pas être reine, vociféra-t-elle. Tu es incapable d’appliquer les coutumes de notre monde.

— Ce n’est pas une question de principes mais de survie ! s’emporta la princesse avec désespoir. Vous ne connaissez pas cet homme, ni ce dont il est capable. Nous avons traversé l’océan, échappé aux humains malveillants, trouvé des stratagèmes pour réduire son influence sur sa ville, et nous avons fait la guerre. Avez-vous déjà tué, mère ? Avez-vous déjà réellement combattu dans le sang et les cris ?! »

Willa resta sans voix. Sa fille avait-elle réellement fait tout ça ? Sa chair, à l’aspect réservé et à la sensibilité exacerbée avait-elle réellement fait face à l’horreur ? Son cœur battait la chamade. Qu’avaient fait les humains d’Halia ? Une rage sans nom saisit le corps sage de la reine de l’île. Si cet homme, quel qu’il soit, avait du mal à sa fille, il allait en payer le prix.

« Bien, céda-t-elle d’une voix froide. Nous allons former tout adulte à cette guerre, et protéger les enfants. Mais s’il a touché à un seul de tes cheveux, Halia, je veux sa tête sur une pique. »

D’un commun accord, les prisonniers des marécages acquiescèrent, sortant tour à tour de leur cage respective. Les nuages s’écartèrent, laissant place au croissant de lune brillant, qui illumina leur visage. Garett, qui se sentait enfin utile, ajouta :

« Nous avons des alliés, chez les humains. Ils ne seront pas de trop. »

Willa se tourna vers lui.

« J’espère que vous leur faites confiance. »

Scarlet pensa à Aaron. Pouvait-elle se fier à lui ? Certainement. Elle n’avait pas repensé à cela depuis bien longtemps. Finalement, elle ne regrettait plus autant de lui avoir laissé la vie sauve.

« Ils en sont digne, Votre Altesse, répondit-elle alors.

— Ils ont plutôt intérêt. »

Il restait une longue heure avant que les premières lueurs du jour n’éclairent le ciel d’Alda. Ce moment offert était comme une rédemption, une pause, un calme nécessaire pour rallier le corps et l’esprit. Garett, s’étant téléporté dans la ville pour prévenir les Mambas Noirs et le groupe d’Hécate, il ne restait que les quatre femmes aux Hyara élémentaires, observant l’étendue d’eau qui s’offrait à elles. Un silence paisible planait sur cette plage calme. Et sans le savoir, toutes pensaient au même avenir.

Un avenir sans Charly.

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