L'école un monde cruel

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Issue d'un petit village, il n'y avait pas de choix pour l'école où l'on devait aller … Par le fait, les enfants rencontrés en première année de maternelle étaient les compagnons qui allaient nous suivre au moins jusqu'en CM2. Je n'ai pas eu de réel problème dans les premières années, mais les enfants grandissent et peuvent devenir aussi méprisants que méprisables … Je vous ai parlé de la réaction de ces filles un peu avant pour le décès de mon cousin, malheureusement ce n'était que le début de la chute en enfer … Vers mes 9 ou 10 ans, j'avais quelques kilos en trop, j'étais la fille des restaurateurs du village et la proie facile, puisque j'étais une fille gentille, calme, très sensible … Le profil parfait de la petite innocente qui allait se faire détruire mentalement car je n'avais aucune confiance en moi, la proie facile en fait !

Tout a commencé de manière étrange, un jour je suis arrivée à l'école, comme tous les autres matins, et je suis allée dire bonjour à ce que je pensais mes copines … Elles ne m'ont rien répondu et sont parties, comme si j'étais invisible … A ce moment-là, je me suis demandée ce que j'avais fait ou pas fait ? Qu'est ce qui avait bien pu se passer entre la sortie des classes la veille, et le lendemain matin. A l'époque, pas de réseaux sociaux, pas de téléphone pour échanger … on ne se posait pas la question en se demandant, est ce qu'elles se sont parlées hier soir ? Etc … et je remercie le ciel de ne pas avoir 10 ans en 2019 et revivre la même situation, ça n'aurait surement pas fini de la même façon !

Comme je le disais plus aucune parole, plus un regard, mais que s'est-il bien passé … Elles ne voulaient plus de moi à la cantine, plus de moi en récréation … Tout avait radicalement changé … elles étaient trois, je ne dirais pas leur prénom, ça ne servirait à rien, je ne fais le procès de personne dans ce livre, je raconte mon histoire et mes ressentis, rien de plus personnels que des ressentis …

Je me sentais seule, et elles me méprisaient tellement du regard, c'était insupportable, je le vivais très mal, et puis quelques jours après j'ai su que c'était par ce que je leur avais fait une grimace … Oh oui, la stupidité de l'enfant, tout le monde connaît cela un jour. Je n'avais pas fait de grimace ce jour-là, j'avais des tics avec mon nez et ma bouche à ce moment-là, si elles s'étaient intéressées un minimum à moi et si elles m'avaient un minimum regardé parfois, elles auraient su … Elles m'ont reparlé puis recommencé dès que l'occasion se présentait … Et puis certains garçons de la classe se sont mis aussi à se moquer, jusqu'à m'humilier … J'avais des critiques sur mon physique, sur le métier de mes parents et soi-disant ma vie de rêve car mes parents étaient à leurs comptes, ils étaient riches ! Encore une stupidité énorme ! Non seulement, ils n'étaient pas riches mais ils travaillaient deux fois plus que la plupart des parents des enfants de mon école !!! La plupart pour ne pas dire tous étaient en week-end dès le vendredi … alors que moi, les miens je ne les voyais pas durant ces deux jours, car ils travaillaient … Je n'ai jamais ouvert une fois la bouche face à ces mesquineries … Par peur ? Par pudeur ? Par honte ? Par mépris ? Aucune idée … Je sais que j'avais honte de ce que j'étais, car je n'étais pas à la hauteur de leurs attentes finalement, j'étais minable puisque c'est à moi qu'ils s'en prenaient … Je n'ai jamais rien dit à mes parents non plus … Les maîtresses n'ont rien vu … Je m'étais construit un masque très trompeur … Mes notes n'ont jamais chuté, mon comportement envers le corps enseignant ou mes parents ne changeait pas … Je ne voulais pas décevoir, je voulais être digne de mes parents qui eux étaient courageux et forts …

Alors j'ai supporté ces comportements pendant des mois, chaque jour, j'étais mise plus bas que terre … Et puis un jour mon masque est tombé, je suis rentrée à la maison en disant à ma maman que plus jamais je voulais retourner à l'école … Ce jour-là, elles s'étaient moquées de mon papa, de son physique et lui avaient fait un doigt d'honneur … Je n'ai pas supporté, ils avaient atteint bien plus que mon cœur mais ma famille, ma chair, mon sang, ma fierté, mon héros, mon papa ! N'ayant plus le choix, j'ai tout raconté, en pleurs, terrifiée, tellement mal dans ma peau …

Le lendemain de toutes ces révélations, ma maman est allée à l'école, elle a voulu parler à ces filles mais à part rire, elles ne savaient rien faire, la maîtresse n'en revenait pas de ce qu'elle entendait de la bouche de ma maman. Elle n'avait rien vu, rien entendu, rien remarqué … et pourtant, cela durait depuis plusieurs mois … Après ça, je ne voulais plus y aller et je ne changeais pas d'avis, maman m'a emmené chez le docteur de la famille, il m'a ausculté, on a parlé ...J'étais en dépression … à 10 ans, j'avais déjà touché le fond, j'étais blessée, meurtrie, mise à terre. Le meilleur dans tout ça, j'avais su et pu le cacher pendant des mois … Pourquoi ne rien avoir dit ? Pourquoi je n'ai pas alerté de mon mal être … Aujourd'hui, je sais que c'était une grosse et monumentale erreur, mais à l'époque je n'ai pas voulu que ce soit dit, papa et maman avaient des choses importantes à régler, mon petit frère avait besoin de voir sa grande sœur forte à l'école …

J'ai eu tort, pour toutes les personnes qui subissent du harcèlement, enfants, ado, adultes, peu importe, vous n'êtes jamais seuls face à ça, parlez, libérez-vous, c'est important. Tout ceci laisse des traces, la confiance en soi est réduite à néant, personne ne mérite d'être traité comme cela, qu'importe que vous soyez en surpoids, maigres, riches, pauvres, que vous n'ayez pas le dernier téléphone sorti ou les supers chaussures à la mode … Aucun être humain ne mérite d'être rabaissé, croyez en votre force et en vous, sans ça, il est trop simple de nous faire croire que c'est nous qui avons un problème et que c'est nous qui devons-nous remettre en question, mais c'est faux !

Savoir se remettre en question est une très belle qualité, mais nous ne devons pas le faire systématiquement, ce n'est pas forcément nous qui sommes fautifs ! C'est la société, les gens, l'éducation que nous avons reçue …

La honte nous empêche de parler, les seuls mots qui nous viennent sont « je suis nulle », « je suis incapable », « ces gens ont raison », « j'ai honte, je vais passer pour une moins que rien ». Et nous nous auto-flagellons, et nous nous construisons une barrière et un mur bien solide autour de nous, pour cacher toute cette souffrance, toutes ces blessures … Et un jour c'est la goutte de trop, des jeunes ados, ou voire plus jeunes, mettent fin à leurs jours pour ne plus souffrir … Mais ce n’est pas la bonne solution ! Ils laissent derrière eux des parents, une famille, des personnes proches qui les aiment plus que tout … Des personnes qui peuvent les aider, les entourer, les consoler et même faire tout ce qu'elles peuvent pour les sortir de cet enfer, veiller à ce que ça ne se reproduise plus jamais. Ce qui est important, et primordial c'est de soigner ses blessures comme il faut, ne pas croire que l'on va s'en sortir seul ou qu’une séance chez le psy suffit, parfois cela peut prendre plusieurs mois, voire années, et ne jamais vraiment se refermer, ressortir plus tard sur des situations qui nous rappellent la honte d'autrefois. Ne jamais se laisser sombrer de nouveau, le harcèlement il faut en parler, de n'importe qu'elle sorte qu'il soit, il laisse des traces indélébiles qu'il faut guérir pour en faire une force et ne jamais retomber dans nos travers. Cela peut paraître difficile, et long mais nous ne vivons aucune situation par hasard, nos rencontres, bonnes ou mauvaises ne sont jamais des coïncidences. Nous venons au monde pour vivre tout cet ensemble d'événements, pour combattre et guérir de ces blessures profondes. Cela ne veut pas dire que c'est une faiblesse, ou que nous ne sommes pas capables de nous défendre, c'est juste la preuve que nous devions vivre cette histoire pour se confronter à ça et pouvoir guérir … Si nous ne traversons pas ces problèmes, si nous fuyons ou abandonnons, nous le revivrons automatiquement plus tard dans notre vie, elle essaye juste de nous faire comprendre que c'est en gagnant la bataille, que la guerre avec cette blessure sera terminée ! Si cela parait flou, et je peux comprendre, ce n'est pas évident à comprendre, pour avoir cette conclusion, j'ai lu des livres qui m'ont permis d'appréhender autrement cette phase de ma vie, et ça m'a changé, j'ai pu mûrir là-dessus, aider à mon tour, et veiller au moindre signe autour de moi pour ne pas reproduire la même erreur, ou que cela arrive dans mon entourage.

À la suite de tout ça, mes parents ont voulu me changer d'école puisque je ne voulais plus y retourner. La seule qui acceptait les élèves en cours d'année, plus précisément en Avril était une école privée à 15 minutes de chez moi. J'ai donc terminé mon année de CM2, loin d’elle, et j’ai espéré guérir de ce mauvais passage de ma vie. Mais je n’ai rien oublié, et aujourd’hui je suis fière, car j’ai pu évoluer sur ce sujet du harcèlement, en face une force plutôt qu’une honte, une faiblesse.

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