Chapitre 16 :

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Mathilde est en corvée de linges donc on se retrouve encore une fois tous les deux avec Nathanaël. On s’arrange pour être de corvée d’épluchages et il y a certaines personnes qui sont absentes de leur fonction donc nous nous retrouvons seuls dans un coin de la cuisine. Il y a deux salles, la salle où les personnes préparent et la salle avec les fours et les plaques de cuisson, les personnes qui coupent font tellement de bruit qu’en chuchotant ils ne nous entendraient pas, quoiqu’ils ne feraient même pas attention sans doute. Peut-être que Nathanaël s’en fiche d’ailleurs d’être écouté, beaucoup de personnes savent sûrement qui il est. Cela fait un petit moment qu’on épluche des carottes et je relève la tête vers lui, on est face à face.

Donc… tu n’as pas grandi dans les dortoirs, c’est ça ? demandé-je en reprenant une carotte.

Ouais, mais je n’ai pas non plus vécu dans la partie des adultes. Je ne connais pas cette partie-là du bunker, déclare-t-il en croquant dans une carotte qu’il avait mise de côté.

Comment ça ? Et les journées de tests ? Comment les as-tu passées ?

Je ne les ai pas passées, soupire-t-il en levant la tête pour s’assurer que je le crois bien, mais c’est compliqué. Je suis un enfant d’un chef des hauts-dirigeants, j’étais censé devenir hauts-dirigeants à mon tour donc je ne devais pas sortir de leur compartiment secret.

J’imagine mon enfance à sa place, et cela devait être hyper monotone. Certes, on voit toujours les mêmes personnes, on va toujours aux mêmes endroits, on ne change pas de milieux, mais lui… il avait beaucoup moins d’espaces que nous pour grandir, et il devait être entouré d’adultes et de peu d’adolescents. Au final, il avait dû avoir le même type d’entourage que moi.

Et… comment se fait-il que tu sois atterri là si tu devais être haut-dirigeant ? me renseigné-je alors qu’il continue de manger sa carotte en épluchant une autre. Tu as dû faire quelque chose de grave.

Tu ne crois pas si bien dire ! s’esclaffe-t-il en souriant. Moi aussi je me posais des questions sur ce qui se passait hors des bunkers et dedans. J’essayais donc d’obtenir des informations que seuls les hauts-dirigeants peuvent connaître… au final, j’aurais pu attendre de l’être pour les savoir, mais il y a quelque chose qui cloche et je veux toujours le découvrir.

C’est sûrement pour cela que je suis aussi ici, révélé-je en grimaçant alors que je venais de m’érafler la peau avec l’éplucheur. Mon père m’a dit qu’ils utiliseraient mes problèmes de colères pour m’envoyer ici.

Toi aussi, tu avais un traitement à prendre ? s’étonne Nathanaël en jetant des épluchures à la poubelle.

Je le prenais à mon insu, expliqué-je en arrêtant d’éplucher. Puis, mon père m’a révélé que je n’en avais pas vraiment besoin et qu’ils voulaient juste me calmer pour que je cesse de m’énerver car on ne savait rien. Cela doit sûrement compter pour toi aussi.

Nathanaël hoche la tête et apporte la totalité des carottes épluchées à ceux qui viennent de débarquer pour les couper. Nous avons fini notre partie du travail, nous n’avons plus qu’à déguerpir des cuisines. On se rend dans ma chambre et Mathilde n’est toujours pas rentrée. Je ne sais même pas où se trouve l’endroit pour nettoyer les vêtements, mais je le saurais quand mon tour viendra. Je m’installe sur mon lit et le jeune homme s’allonge sur celui de Mathilde en soupirant. J’examine l’éraflure sur mon index, ce n’est pas passé loin de saigner, mais au moins cela n’a pas été assez profond pour l’être. Je ne sais même pas si on a accès aux soins ici… les hauts-dirigeants seraient sans doute capables de nous en priver. Cela ne serait pas étonnant.

Je n’ai pas découvert grand-chose quand j’ai cherché, s’agace Nathanaël en tournant la tête vers moi en ramenant ses cheveux bruns en arrière. Ils ont compris avant ce que je manigançais… mais j’ai compris certaines choses.

C’est-à-dire ? le pressé-je en m’allongeant à mon tour.

Ce qu’ils cachent, c’est principalement sur les savants et l’asile.

Qu’est-ce que c’est étonnant ! Non, très clairement cela ne m’étonne pas, mais je m’étais toujours demandée combien de secteurs les secrets touchent. Maintenant, je sais que cela n’englobe pas tout. Et c’est d’ailleurs encore plus déroutant. Je me demande si un jour on pourrait les percer à jour, mais ce qui m’inquiète le plus, c’est que peu de personnes sont au courant… les secrets qu’ils dissimulent sont-ils aussi horrifiques que cela ?

Est-ce que tu es déjà sorti de l’asile depuis que tu y es ? questionné-je en fronçant les sourcils.

Tu es malade ! On ne peut pas sortir d’ici à moins d’organiser un énormément plan sur des semaines et des semaines… après, il y avait un vieux qui disparaissait toute la journée et revenait pour manger et dormir. Nous n’avons jamais su ce qu’il faisait.

Alors pourquoi ai-je eu la chance de sortir d’ici pour aller dans le quartier des savants ? Il y a forcément quelque chose qui ne va pas quelque part. Je partage donc mon petit passage secret chez les savants, et Nathanaël faillit bien en tomber de sa chaise. Même si sa fonction était censée être plus spéciale, cela n’est jamais arrivé à ses amis, ni même à Mathilde. Il y a quelque chose de spécial, peut-être pas parce que c’est moi, mais car le métier de savants est rempli de mystères. Cela, tout le monde le sait. Je remarque une lueur dans le regard de Nathanaël et il ouvre la bouche avant de la refermer. Les savants que j’ai vus, m’ont bien fait comprendre que j’ai le droit de travail avec eux si je le souhaite. Je n’ai pas donné de réponses, car j’ai du mal à envisager tout cela, toutes ces violences faites à des gens que je n’ai jamais vus auparavant… c’est une chose de regarder, s’en est une autre de les faire. Damien ne peut pas expliciter mais il m’a affirmé que c’est compliqué…

Nathanaël referme bien la porte et s’assoit à côté de moi avec un regard si sérieux que je crains un nouvel excès de colère. Sauf qu’il sourit et me prend par les épaules pour me secouer doucement. Mathilde n’est pas là pour surveiller ce qu’il manigance, et je ne le connais pas assez pour que l’on puisse deviner. Il me presse un peu plus les épaules et soutient mon regard.

Écoute-moi bien Constance, souffle-t-il en jetant un coup d’œil vers la sortir. Tu es la chance que l’on attend depuis des mois, voire des années pour certains !

Attends… veux-tu vraiment que j’accepte de me former en tant que savante ? lâché-je surprise en laissant paraître ma stupeur.

Réfléchis ! Tous les secrets sont là-bas ! Absolument tout, puis des personnes disparaissent de l’asile et ne reviennent plus jamais, même, il y a des rumeurs mais beaucoup me paraissent invraisemblables. D’habitude, ils meurent ici ou on les voit se faire exécuter. Peut-être qu’on trouverait des réponses.

Quelles rumeurs ? m’intéressé-je en dégageant les mains de Nathanaël de mes épaules.

D’autres personnes serviraient de rats de laboratoires, et d’autres seraient retournés dans l’autre communauté, informe le jeune homme sans y croire. Si tu acceptes, on peut trouver des informations.

Mais… commencé-je hésitante puis ferme. Damien m’a dit de ne pas me mêler de cela.

On s’en fout de lui, il n’est pas avec nous. Il ne peut pas comprendre. Tu dois accepter Constance, répète-t-il comme s’il voulait que cela rentre dans mon cerveau et que cela n’y ressorte plus.

Je ne lui dis rien, mais je ne veux pas délivrer de réponses trop tôt. Le chef des savants m’a dit que j’ai tout mon temps, qu’il a besoin de plus de scientifique avec lui. Mais il ne pense sûrement pas que j’accepterais pour cela…

On te fera rencontrer Morgan lorsque Mathilde reviendra de corvées de linges, programme Nathanaël. Il fait partie de notre groupe et nous protège des autres. Il est considéré comme trop dangereux donc on ne peut le voir que dans sa chambre. Il reste toujours en isolement donc on ne le voit jamais. Il mange et vit dans sa salle. Donc… il est un peu spécial.

Étrangement, même si c’est lui qui me dit cela, je ne suis pas très rassurée à l’idée de rencontrer leur ami. Déjà que j’ai le chic de me mettre les gens à dos même s’ils sont gentils et que je n’ai strictement rien fait, je dois absolument faire profil bas si je le rencontre.

Peut-être que c’est important. Peut-être que je peux obtenir des informations, mais malgré tout, c’est mon choix, rien que mon choix. La décision me revient, et personne ne peut choisir à ma place.

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