55.2 - Le plan du tyran

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Troyd, de son côté, n’arrêtait pas de provoquer les passants et les gardes qui s’occupaient de lui. À chaque heure, un mage passait devant sa cellule et l’affaiblissait avec un maléfice, ce qui l’empêchait de regagner des forces. Ses pouvoirs étaient gravement affectés, mais il était toujours capable de se défendre physiquement. Le désir de tuer ne l’avait pas quitté, même après le dernier combat. Après s’être fait plaquer au sol par cette grosse andouille de marionnette, que les autres Markios avaient adopté, il avait juré qu’il se vengerait de tout ça.

Il était dans une fâcheuse situation et avait l’étrange sensation que sa déesse s’était jouée de lui. Perséphone n’abandonnerait jamais l’un de ses croyants entre les mains de ces infidèles ; du moins, c’était ce qu’il croyait. Il était persuadé que tôt ou tard, elle lui enverrait quelqu’un, un disciple ou bien une créature de l’au-delà, pour le sortir de cette prison. Si seulement il pouvait contrer les effets négatifs de ces nombreux maléfices… Il pourrait s’évader rien après avoir fait exploser un mur ou bien en tuant quelques-uns de ces stupides gardes…

Allons, mon gars… Faut que tu t’endurcisses, se dit-il.

Il s’allongea au sol et commença à faire quelques pompes. Au bout de cent, il stoppa un instant et prit un repos de quelques secondes avant de recommencer. Déjà, il arrivait à ressentir le mana qui coulait dans ses veines. Cette réserve de magie ne suffirait pas à causer le moindre sort offensif. Malgré tout, il se sentait rassuré que le voile lui permettait encore d’invoquer les forces spirituelles, pour lancer des sorts.

Et si j’infusais ma magie quelque part dans cette cellule ? pensa-t-il. Il me faudrait un réceptacle temporaire pour y stocker ma magie. Comme ça, les mages ne s’attendront pas à ce que je les attaque par surprise…

En théorie, cette idée pourrait bien lui servir, car il avait déjà vu Randell employer de cette technique, lorsqu’il créait des golems. Troyd était loin d’être un expert en sorcellerie, toutefois. Il pouvait faire apparaître des vents violents ainsi que des flammes extrêmement dangereuses, cependant il manquait de discipline. De plus, sa concentration était médiocre.

Randell lui avait expliqué à plusieurs reprises que l’art de la magie ne consistait pas seulement de détruire l’ennemi, qu’il fallait aussi l’apprivoiser comme une bête et en faire son alliée. Troyd n’avait pas compris les mots de son mentor, qui était mort quelques jours plus tôt. Tout ce qu’il avait à faire, par contre, c’était de se concentrer et de mettre en pratique ce qu’il avait appris jusqu’à ce jour.

Pendant qu’il faisait une autre série de pompes, Troyd essaya de concentrer la magie en lui jusqu’au bout de ses doigts. S’il fallait qu’il ensorcelle cette cellule, il commencerait par le ciment. Il respira lourdement, tandis qu’il essayait de faire ces deux choses à la fois. Les gardes passaient devant lui, sans se douter qu’il était en train de planifier son évasion. S’il réussissait son coup, il ferait éclater cet endroit et prendrait la fuite. Il fallait d’abord répandre du mana au sol et espérer que cela fonctionne. Le plan était de faire tout ceci dans la plus grande discrétion qui soit.

À en croire les dires de ces p'tits cons, je vais passer au tribunal d’ici trois jours, pensa Troyd. Ça me laisse assez de temps pour m’entraîner secrètement…

Vers une heure de l’après-midi, le meurtrier entendit des pas venir dans sa direction. Beaucoup plus rapide que le cliquetis des armures des gardes. Il y avait aussi des bruits métalliques ; un couvert en métal venait de taper un ustensile. Une odeur de bifteck lui chatouillait déjà les narines alors qu’on se mettait en face de sa cellule.

Un soldat était venu lui apporter son repas. Le prisonnier huma l’odeur de la viande, puis repoussa son assiette sous les barreaux.

— C’est votre dernier repas de la journée, dit l’homme de l’autre côté de la cellule. Vous devriez manger avant que ça devienne froid.

— Qui me dit que ce n'est pas du poison, cette fois ?

— Le Conseil ne vous ferait jamais une chose pareille, dit l’homme, qui fronça des sourcils. Vous devez passer devant un tribunal d’ici les prochains jours, nous devons vous garder vivant.

— Je n’ai pas besoin de leur charité.

Le soldat secoua la tête et soupira.

— Ça me chagrine que vous soyez tombé si bas, vous qui étiez jadis l’un de nos plus forts guerriers, déclara ce dernier. J’ai servi sous les ordres de Virgile durant plusieurs années, j’étais l’un des tous premiers capitaines, lorsque les brigades furent formées. Autrefois, je voulais être comme vous et diriger l’armée, pour le bien de notre nation… Quand je vous vois ainsi dans cette cellule, tout ce qui me vient à l’esprit, c’est du mépris et de la pitié.

— Je n’ai jamais eu le malheur de vous rencontrer, je suppose ?

— Jamais. De toute façon, ce n’est pas comme si vous alliez me reconnaître. Vous vous êtes toujours comporté comme une ordure, mais au moins, on pouvait compter sur vous pour lutter contre nos adversaires…

L’homme poussa une seconde fois le plateau de nourriture vers Troyd.

— Mangez, ou crevez, dit-il. Ça m’est égal.

Puis, il partit et laissa l’ancien général seul avec ses pensées et le plat de bifteck devant lui. On lui avait passé des ustensiles en plastique et une bouteille d’eau. Il se racla la barbe avant de prendre la fourchette du plateau ; il commença ensuite à piocher sur le morceau de viande, comme s’il contenait un danger quelconque. La curiosité du guerrier satisfaite, il prit une bouchée de pomme de terre, puis une gorgée de la bouteille. Il y avait un avantage d’être prisonnier aux cachots du palais présidentiel : les détenus étaient logés et nourris gratuitement.

Trois jours, se dit-il. Ça me donne trois jours pour faire de cette cellule une bombe… et m’évader… Je vais devoir continuer mon plan discrètement avec les mages qui font leurs rondes, toutes les heures… Ils vont bien finir par se douter que je trame quelque chose. Si je ne dors pas cette nuit, je serai probablement capable d’avancer tout cela plus rapidement… Tout compte fait, il n’est pas si mal ce repas…

Après avoir fini son plat, Troyd décida d’aller s’allonger sur sa couchette et finit par faire une sieste. Il trouvait cette situation de plus en plus ennuyante.

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