3.2 - Flint et Gabriel

5 minutes de lecture

— On n'arrête pas de me rejeter, c'est trop pour moi, ajouta Flint. J'aimerais qu'on me donne ma chance... Ils n'ont pas idée à quel point ça me plombe le moral. Ça rendrait n'importe qui dépressif, à la longue... Pas vrai ? Parfois j'ai l'impression de subir un confinement.

— Mm hmm...

Flint fit une courte pause avant de retourner son regard en direction de la ville. À travers la grande fenêtre de sa chambre, il voyait les citoyens rôder près du quartier marchand. Il reconnut Misaki et un vieux brigadier qui discutaient devant la grande fontaine, au centre des kiosques. Ceux-ci s'approchèrent ensuite du palais, mais il ne put voir où ils se rendirent par la suite.

— Tu sais, ça me fait penser au moment où tu as finalement accepté mes sentiments amoureux, avoua Flint, en regardant son confident. Tu n'as pas idée à quel point j'ai été heureux de voir, que toi aussi, tu voulais de moi.

— Ce n'est pas tous les jours qu'un gros lard apprend qu'on est fou de lui, tu sais ?

— Oui. Mais moi je t'aime comme tu es, avec tes qualités comme tes défauts... Pourquoi le Conseil ne peut-il pas faire la même chose avec moi ?

— Cette comparaison est étrange, mais je l'admets, j'aimerais bien qu'on te donne une opportunité de faire tes preuves.

Gabriel ressentait beaucoup de nervosité dans la voix de son fiancé. Il se dit qu'il devrait faire attention à ce qu'il dirait par la suite, car il ne souhaitait pas lui faire de mal. Tout le monde, chez les Markios, était au courant de sa grande sensibilité.

Le blond se tourna en direction de son partenaire avant de lui demander :

— Alors pourquoi ne demandes-tu pas à papa de me laisser ma propre brigade ? Il t'écouterait toi. Ils te font beaucoup plus confiance qu'à moi.

Gabriel soupira et haussa les épaules.

— C'est plus compliqué que tu le penses, mon chou, dit-il. Je ne suis qu'un ancien serviteur pour ta famille. Je n'ai aucune opinion politique à offrir au Conseil, sauf en cas d'urgence... Et tu sais bien que ton père ne veut que te protéger...

Flint plissa des yeux et fit une moue qui en disait beaucoup pour le colosse.

— Je sais, c'est injuste... rajouta Gabriel.

— Maman, si elle était toujours vivante, me donnerait plus de permissions, j'en suis certain, dit son interlocuteur qui se rapprocha du lit.

— Oui, mais elle ne voudrait pas que tu mettes ta vie en danger. Nous savons déjà tous à quel point tu as tendance à être légèrement casse-cou...

— Oh, n'en rajoute pas. Tu es de mon côté, oui ou non ?

Gabriel savait que les choses allaient bientôt empirer, mais il devait faire en sorte de calmer les ardeurs de son fiancé. Il avait beau être attaché à celui-ci, il avait promis à Artael de garder son fils en vie et en sécurité. Flint manquait de maturité et mettait le blâme de son mauvais comportement sur les autres.

— Chéri... tu as vingt-six ans. Tu ne crois pas qu'il serait temps pour toi de prendre exemple sur Nash ? Tu as encore beaucoup à apprendre de lui, puisqu'il est un excellent guerrier et un fin stratège... Je me dis que le Conseil a pris la bonne décision de te mettre dans la Septième Brigade. En plus... on va être ensemble, donc...

L'effet fut immédiat. Comme s'il venait de recevoir une gifle à son ego, Flint se raidit telle une planche à repasser, une larme coula le long de sa joue. Il sortit de sa chambre, le pas lourd et la tête basse. Ce n'était pas la première fois que Gabriel lui brisait le cœur ainsi, à cause de propos moralisateurs, mais il savait que son fiancé ne voulait que son bien. Il lui pardonnerait d'ici à quelques heures, même si ces paroles lui avaient fait mal. Il avait une expression macabre. Le gros barbu se mordit les lèvres. Encore une fois, il avait gaffé.

Moi et ma grande gueule... pensa-t-il. Mais c'est vrai quoi ! Flint devrait prendre plus exemple sur son oncle... Qui de mieux pour lui enseigner comment gérer une brigade ?

Après avoir réfléchi à tout cela, Gabriel se contenta d'aller rejoindre son amant, dans les couloirs, silencieux.

Sur le point de quitter le palais après s'être débarrassé de son flacon de whisky, Nash croisa son neveu, Kyran, près de la porte d'entrée. Ce dernier revenait d'une courte pause sur le grand balcon où la plupart des employés allaient se reposer après une longue journée de travail.

Pourquoi ne suis-je pas étonné qu'il ait des papiers du bureau avec lui ? pensa le capitaine. Il devient aussi accro au travail que son père.

Kyran ne faisait pas partie des brigades, cependant il travaillait comme un membre associé du Conseil et prenait des notes pour eux durant les rencontres avec des clients importants. Un jour, il remplacerait son père lorsque viendrait son temps. Il était aussi l'un des bibliothécaires du palais, lorsqu'on n'avait pas besoin de ses services. Contrairement à son frère, il s'entendait bien avec son oncle.

— Kyran, mon neveu adoré ! s'exclama Nash en s'approchant de celui-ci.

— Oh ? Tonton Nash ! Je ne t'avais pas vu. As-tu rencontré ta nouvelle équipe ?

— Oui. J'en déduis que tu viens de voir Flint et son fiancé passer, n'est-ce pas ?

— Ces deux-là sont inséparables... Mais mon frère avait sale mine. Que s'est-il passé dans la salle, au juste ?

— Rien en particulier, tu sais comment est Flint. Il nous boude encore parce qu'il n'a pas le droit d'avoir sa propre brigade.

Le jeune homme à la longue chevelure blonde, attachée en queue de cheval, passa sa planchette porte-papier sous son aisselle gauche, puis se prit le haut du nez du bout des doigts. Nash avait remarqué qu'il faisait toujours cela lorsqu'il réfléchissait. Il était facile à différencier de son frère. Beaucoup plus mature, détendu et surtout, il s'habillait plus professionnellement. Il avait aussi des lunettes de lecture et sa chevelure était beaucoup plus longue, similaire à celle de son père.

— Mon imbécile de frère n'a pas encore compris qu'il manque cruellement de jugeote pour quoi que ce soit, soupira Kyran. Je ne comprendrai jamais ce que Gabriel lui trouve. Enfin, ce n'est que mon avis. Mes sœurs et moi n'avons plus besoin de ses services, mais notre cher nounours semble mieux placé que quiconque pour s'occuper des bêtises de Flint.

— C'est cruel, ce que tu dis, mais tu as raison, répliqua le capitaine. Il n'est pas étonnant que vous ayez mis ces deux-là dans mon équipe.

Kyran reprit sa posture initiale, avant de poursuivre :

— Papa sait à quel point il est difficile de gérer Flint et ses sautes d'humeur... Alors, il a préféré que ça soit quelqu'un de la famille qui le prenne en charge. Gabriel ne se serait pas senti à son aise ailleurs qu'avec des gens qu'il connaît déjà, alors s'il est avec mon frère, ça nous arrange. J'espère que tu ne nous en voudras pas.

— C'est déjà pardonné. J'espère simplement que ton frère obéira à mes ordres.

— Moi de même... Par contre, là je dois te laisser. J'ai des trucs importants qui ne peuvent pas attendre. On se reparlera plus tard.

Annotations

Vous aimez lire TeddieSage ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0