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Le lendemain matin, on s’en alla à bord de notre voiture de location pour notre excursion touristique en mer, laissant Andreas en pyjama sur le pas de la porte. J’eus la réflexion que, décidément, même en pyjama, il restait beau…

On alluma la radio et on chanta à tue-tête sur la route du port, se moquant de l’épicier qui avait dû se tromper tant le soleil brillait et le ciel était d’un bleu éclatant. On déjeuna dans un charmant petit restaurant face à la mer et proche des docks. Pour la première fois depuis longtemps, j’eus un moment de complicité avec ma petite sœur. On se remémora nos bêtises d’enfance et nos chamailleries quand j’étais adolescente et elle encore trop jeune pour me suivre en soirée.

C’est le sourire aux lèvres et le cœur léger, qu’en début d’après-midi, on rejoignit le groupe de touristes sur les quais et embarquait pour une visite qui s’annonçait magnifique avec promesse de rencontre avec baleines, dauphins et vues époustouflantes.

En mer, le vent commença à souffler, le bateau commença à tanguer mais le capitaine en avait vu d’autres et souriait en regardant les enfants s’amuser à garder l’équilibre, ainsi que les quelques passagers restés figés sur leur siège de peur de repeindre le pont avec leur déjeuner.

Je m’éloignai du groupe et de ma sœur qui papotait avec un couple écossais et allai à l’avant du bateau. Je regardais le paysage défiler en respirant l’air marin avec un plaisir non dissimulé. Accrochée à la rambarde, je me laissais fouetter par les rafales et les vagues et me délectais de ce châtiment acceptant que les éléments me punissent des fautes que j’aurais éventuellement commises.

- Oh putain…, entendis-je derrière moi et il me vint l’envie d’étrangler cette personne qui venait interrompre ma purification.

Ma sœur, pâle, les yeux vitreux, s’approchait de moi la main sur la bouche, s’accrocha au garde-corps et essaya de respirer profondément.

- Je crois que je vais vomir, articula-t-elle difficilement.

- Et bien, vas ailleurs, lançai-je sèchement.

- Toi, ça va ? s’étonna-t-elle.

- Ben oui !

Mais allait-elle me laisser tranquille ?

Fanny hoqueta, se pencha rapidement en avant et vomit tout ce qu’elle put. Regrettant mon comportement, je lui tins les cheveux tout en lui frottant le dos. En me retournant, je me rendis compte que le bateau remuait énormément et vis presque tous les passagers en mauvaise passe. Les enfants pleuraient, certains adultes vomissaient et d’autres s’accrochaient à ce qu’ils pouvaient. J’avais été dans une autre dimension combien de temps pour oublier tout ce qui s’était passé autour de moi ? Le bateau avait même fait demi-tour sans que je m’en aperçoive.

En accostant, le capitaine fit des blagues sur le climat irlandais pour dédramatiser la situation tout en s’excusant pour l’excursion avortée.

La compagnie maritime nous offrit des collations. Le thé bien chaud nous revigora et on se mit tous à plaisanter et à rire de la situation.

Sur la route du retour en fin d’après-midi, je reçus un petit SMS de Carole, une amie qui me servait parfois d’espionne… un tout petit SMS qui se planta droit dans mon cœur : « Le bébé est né… c’est un garçon… Sois forte, je pense fort à toi… »

J’éclatai en sanglots. « Salaud salaud… » C’est tout ce qui me venait à l’esprit…

Fanny me prit le téléphone de la main, lut rapidement le message et jeta le combiné sur la banquette arrière. Elle ne dit rien, ne fit aucun commentaire et continua à rouler sur les belles routes encadrées par les murets de pierres sèches typiques d’Irlande.

Une fois calmée, la tête posée sur la fenêtre de la portière, je me mis à admirer ce paysage magnifique et sauvage. À droite de cette fameuse route qui longe le littoral irlandais, les plaines sauvages et isolées et à gauche les falaises majestueuses sculptées par les vents et l’océan. Le soleil pâle à l’horizon, voilé par la brume provoquée par les vagues, donnait une ambiance féerique et mystérieuse.

C’est là que je distinguai une silhouette au bord de la falaise. Un homme se tenait debout face au vent et à l’océan, restant immobile à quelques centimètres du vide.

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