Chapitre 43 : Cartes

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Loënia troqua son téléphone portable pour son livre, La princesse de Montpensier rédigé en 1662 par Madame de La Fayette. Le duc d’Anjou ? Le duc de Guise ? Mais qui était qui ? Que trouvaient-ils à la princesse de Montpensier ?

Ce jour-là, les rayons du soleil réchauffaient le jardin tout entier. Les roses étaient écloses, l’herbe bien verte, la marre reflétait le bleu du ciel et cliquetait gaiement. Plus loin, assise à l’ombre d’un arbre, Loënia songeait à mille choses. Vêtue d’une robe jaune, ses sourcils étaient froncés. Elle s’était réveillée, le matin-même, avec un affreux sentiment. Quelque chose allait se produire aujourd’hui, ou prochainement, et elle savait qu’elle ne pourrait pas l’empêcher.

Elle balaya de sa main les pétales d’un pissenlit qu’elle avait dispersés sur sa robe. Si un événement tragique devait arriver, elle souhaitait qu’il se produise au plus vite.

Après dix ans d’hésitations et alors qu’elle allait se lever, elle vit un nom s'afficher sur son téléphone portable : c'était Mélusine Corasone -la mère de Rashnoé.

– Bonjour Loënia, c’est Mélusine. Je me permets de te contacter car je n’ai aucune nouvelle de Rashnoé depuis hier soir. Je me disais que vous étiez ensemble puisque Matze m’a affirmé qu’il n’était pas avec lui.

L’angoisse transperçait la voix de la mère de famille.

– Il n’est pas avec moi, je suis désolée. Je peux essayer de l’appeler, si vous voulez. Il ne m’a donné aucune nouvelle non plus mais comme il n’est que treize heures ça ne m’a pas trop inquiété. Et Lent-Sorceler ?

– Nous sommes dimanche. La boutique est fermée. Je vais y passer, au cas où. Je t’inquiète peut-être pour rien mais je voulais savoir où était mon fils.

– Je vous comprends !

Loënia regarda partout dans le jardin, comme si Rashnoé allait jaillir de la marre ou des bosquets.

– Dites-moi quand vous serez à la boutique. Si je n’arrive pas à l’appeler non plus, je ferai un enchantement pour le localiser.

N’y tenant plus, elle prit son livre ainsi que son téléphone et se hissa sur ses jambes. Elle rejoignit le manoir à coup de rapides enjambées. Un porte parapluie fruste attendait près de la porte. Au palais, Braken et son père s’en servaient comme porte épée. Loënia l’évita et pénétra dans le salon.

Thaïs était en pleine discussion avec trois ou quatre autres vampires. Loënia le salua de la main. Le salon au style hétéroclyte, avec ses vieux tableaux et ses lampes modernes, était au bord de l’implosion. Des pelletées de vampires, hommes et femmes, piaillaient, ergotaient et disputaillaient. Elle ne prit pas le temps de voir si Malo ou Adrien étaient dans la pièce. Loënia se construisit un chemin entre les groupes difformes et agités. Elle composa le numéro de téléphone de Rashnoé tout en continuant son trajet à travers les corridors.

Elle s’enferma dans sa chambre. Son portable résonnait dans le vide. Rashnoé ne décrochait pas.

Elle scruta sa chambre. Ses yeux s’affolèrent. Son lit fait, sa commode couverte de livres, d’un chaudron, son épée dans le coin de sa chambre, le tableau de sa mère et réalisé par son père, le miroir posé au mur. Elle n’avait pas de carte. Plusieurs mappemondes trônaient sur les murs ou les meubles du bureau du meneur du clan.

Elle ouvrit l’un des tiroirs de sa commode. Elle en sortit du gros sel blanc ainsi que du noir. Elle saisit un morceau de sauge à moitié consommé et le posa sur son tapis.

Elle courut jusqu’au bureau d’Adrien. Là-bas, elle rencontra une foule de vampires qui attendaient de parler à son aïeul. Et si son pressentiment du matin avait un lien avec Rashnoé ? Elle eut envie de pleurer. Non, elle allait passer devant tout le monde immédiatement, ce qu’elle fit sous les protestations de certains. Elle s’excusa une fois, puis une deuxième avant de renoncer à les écouter.

Elle ouvrit la porte du bureau d’Adrien. Lui et Malo se retournèrent, l’air interrogatif. Ils comprirent tout de suite que quelque chose ne tournait pas rond.

– Je peux t’emprunter une carte ?

Adrien hocha la tête en lui tendant la première qui lui vint. Elle était jaunie et cornée mais cela lui convenait parfaitement. Elle le remercia d’un geste du menton et s’en fut aussi vite que cela était possible. Elle repassa devant la file de vampires sans les voir. Elle courut jusqu’à sa chambre sans s’inquiéter de fermer la porte derrière elle.

Elle étala la carte sur le tapis. Elle dessina un cercle fait de sel blanc autour de la mappemonde puis versa quelques pincées de sel noir sur le Finistère. Elle s’assit sur le sol froid et posa ses mains dès deux côtés de la mappemonde.

Rien.

Elle aurait dû visualiser l’endroit où il était ; elle aurait dû humer les odeurs qui l'entouraient ; elle aurait dû ressentir la chaleur de l’été ou la fraîcheur de l’appartement de son petit-ami ou la tiédeur de Lent-Sorceler ; elle aurait dû, elle aurait dû.

Rien.

Elle abandonna son enchantement sur le sol, et prit si vite son téléphone portable qu’il lui glissa des mains. Il tomba sur le sel noir. En reprenant son outil numérique, elle vit que le sel avait formé une croix sur la carte.

Elle se releva et composa le numéro de Mélusine, la mère de Rashnoé.

– Je n’arrive pas à le ressentir. Mon enchantement s’est avéré inutile.

Silence.

– Le mien également, Loënia.

Elle donna un coup de pied dans le sel qui s’agita dans l’air avant de retomber platement sur le tapis.

– Nous allons le retrouver, reprit la mère. Je vais prévenir Audric et nous allons faire tout notre possible.

– Je suis désolée, si nous n’avions pas monté ce groupe, si je ne l’avais pas incité à me rejoindre…

– Ne tirons pas de conclusion hâtive, ma puce. Rashnoé est intelligent et très solide.

La jeune femme hocha la tête.

– Je vous laisse, je vais poursuivre les recherches dans mon coin.

– Je te rappelle bientôt, fit Mélusine avant de raccrocher.

Les mains de Loënia tremblaient si fort qu’elle eut du mal à appuyer sur la poignée de sa porte. Elle fit quelques pas avant de s’appuyer contre le mur.

Où était Rashnoé ?

Pourquoi n’avait-elle pas pu le repérer ?

Cela pouvait s’expliquer. Il pouvait être dissimulé par un sortilège. lI pouvait également être très faible. La troisième possibilité était qu'il soit mort et Loënia refusait d'y penser. Pourquoi l’aurait-on kidnappé ? Pourquoi lui ? Était-ce à cause des actions que le groupe avait menées ? Il était connu en tant que boutiquer, certes, mais la célébrité de Braken, Raison ou Loënia dépassait largement la sienne. Et s’il s’était simplement coupé du monde ? Après tout, peut-être qu’il voulait prendre quelques jours pour se reposer. C’était possible. Bien que Rashnoé n’aurait jamais volontairement laissé ses proches s’angoisser pour lui.

Loënia sentit un courant d’air dans son coup et se redressa. Un vampire venait de passer à côté d’elle. Elle tourna la tête, le couloir était vide.

Elle continua son avancée jusqu’au salon principal. Avant d’y entrer, elle avait déjà senti que tout le clan était amassé à l’intérieur. Adrien vint vers elle.

Peu importe ce qu’il se passait, elle n’avait pas le temps de le gérer. Il fallait qu’elle sorte de cette demeure et qu’elle aille chercher de l’aide.

Elle ne s’était pas trompée, tout la tribu semblait réunie. Une clairière s'était naturellement creusée, où se trouvait Adrien et une femme que Loënia avait déjà croisé au manoir. La fée progressa dans la pièce, les vampires la laissèrent passer. Elle brisa le cercle, Adrien était à quelques pas d’elle.

– Loënia, je te présente Feilli.

La vampiresse sourit d’un air carnassier à Loënia qui sentit aussitôt ses doigts crépiter.

Heyyyyyyyyyyyyyyy,

Let me tell you that nous approchons vraiment de la fin de mon manuscrit et que je n'ai pas encore rédigé la suite.

Que pensez-vous de Feilli ? A-t-elle véritablement kidnappé notre cher Rashnoé ? Est-elle si diabolique ?

Je vous embrasse,

(Buvez de l'eau),

Jane Anne

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