Chapitre 31

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Chapitre 31

La forêt avait beau être blanche et lumineuse, elle n’en n’était pas moins lugubre. Les légendes et superstitions allaient bon train, racontaient les massacres de peuples entiers par des créatures issus des plus terribles cauchemars. S’ils résidaient des jaguars, des serpents longs de plus d’une vingtaine de pas aussi voraces que des alligators, Kita ne pouvait prêtait foi à de tels boniments. Au moins, les dragons avaient existé et leurs descendants foulaient Naarhôlia. Plus qu’un mythe, c’était un fossile ressuscité. Griffons, djinn étaient issus d’un imaginaire collectif trop fertiles. Malgré tout, un mauvais pressentiment l’obsédait. La jeune femme sentait des centaines d’yeux invisibles se poser sur la patrouille tandis qu’ils écrasaient l’herbe translucide. Kita rompit un brin entre le pouce et l’index. Dévoilés par les rayons d’un soleil fatigué : un squelette aux droites ramures. Elle l’écrasa.

—Nous camperons ici ce soir, ordonna Reikoo.

Elle devinait leurs réticences malgré les rictus affichés par ses compagnons ; ils ne savaient rien sur cette forêt hormis que le danger rôdait. La question essentielle : sous quelle forme ? Des fauves à trois pattes, des oiseaux pourvus non de plumes mais de membranes, de mammifères myopes ? Ces derniers, Kita les craignait moins. A ses yeux, mieux valait terminer sous des pattes maladroites plutôt que dans l’estomac d’un prédateur. Ecrasée ou déchiquetée, voilà son choix ?

Alors que le camp s’établissait à l’orée de la forêt, Galtriel l’entraina à l’écart. Il souhaitait lui parler pour la première fois après son sauvetage.

—Je vous dois des remerciements.

—De rien.

—Je suis sincère. Sans vous, je serai mort. C’est pour ceci que je ne vous plaque pas contre un arbre, le couteau sur la gorge.

—Fort sympathique, ironisa-t-elle. J’ai failli me casser le bras pour sauver vos fesses.

—J’ai vu votre regard lorsque vous m’avez tenu. Vous étiez prête à me lâcher.

—Et je ne l’ai pas fait.

Elle croisa les bras sur sa poitrine, s’adossa à un arbre, un pied contre le tronc.

—Vous m’avez lâché et vous avez presque immédiatement raffermi votre prise. Pourquoi ?

—En quoi ça vous intéresse ?

—Vous n’avez pas voulu trancher les liens de Reikoo chez les cervidés.

—Il m’avait envoyé à la mort, protesta-t-elle avec véhémence. Je ne vous comprends pas, Galtriel. Je vous ai évité une chute dans le vide, c’est tout ce dont vous devriez vous soucier, non ? Je me serai contentée de simples remerciements.

Le guerrier s’approcha mais veilla à ne pas la toucher. Pour qui ne connaissait rien de l’amour, ils ressemblaient à des amants.

—Il y a quelque chose de pas net chez vous. Vous souhaitez maintenir la cohésion de notre groupe mais ne craignez pas de nous éliminer.

Kita leva les yeux au ciel, plus agacée que soucieuse de cette accusation si proche de la vérité.

—Vous dramatisez, Galtriel. Un peu plus et je croirai que vous me suspectez. Vous déduisez tout ceci de la faiblesse de mon pauvre petit bras ? Vous avez une imagination débordante, mon cher. Avez-vous pensé à vous reconvertit en troubadour ? Très bien payé si on est doué, à ce qu’y parait. Mon père ne lésinait jamais sur le salaire.

Alors qu’elle s’apprêtait à partir, il emprisonna son bras, la cloua à l’arbre de tout son poids. Leurs nez se touchaient presque. Loin de ressentir de la peur, elle murmura :

—Vous devriez reculer un peu. Ils croiront que vous m’embrassez.

Et tout sérieux retrouvé :

—Vous savez ce que je fais aux violeurs.

—Ils complotent contre vous. Je ne sais pas exactement de quoi il en retourne mais je me disais que vous devriez être avertie. En guise de remerciements.

Son souffle se bloqua dans sa trachée.

—De quoi parlez-vous ?

—J’essayerai d’assurer vos arrières, d’en apprendre davantage parce que je vous dois la vie. Ne vous méprenez pas : nous ne sommes pas alliés et si je devais choisi entre un camp, vous savez lequel j’opterai.

Il recula, laissant une Kita dubitative le fixer avec des yeux ronds. Quelle force !

—Faites comme si de rien n’était. Moins vous serez expressive, moins vous serez en danger. Encore une chose, Kitaya : Masha est ma fille.

Sur cette révélation, il tourna les talons. La cavalière se figeait. Que faire maintenant ? Elle n’était pas même sûre de la véracité de ses propos et pourtant, cette information expliquait le brusque changement de comportement de ses compagnons. Certes, ils complotaient mais dans quel but ? L’assassiner ? L’abandonner ?

Cette Forêt Jaune était leur dernière étape avant le chemin retour. Quoi qu’ils aient prévus, l’issue était proche. Elle resterait sur ses gardes.

Si elle avait douté lors de leur périple, elle ne pouvait que se gausser de la futilité évidente de ce mot alors qu’elle portait surtout ses camarades- Galtriel compris- un regard des plus soupçonneux. Non pas de ces œillades physique qui trahissaient la moindre émotion mais une projection e l’âme, presque tactile. Elle ignorait qui croire. Ou qui ne pas croire. Si attaque il devait y avoir, ce ne serait pas dans l’immédiat. Divertir ce fichu dragon demandait des compétences qu’ils ne possédaient pas. Elle non plus d’ailleurs. Si un événement tragique se produisait, ce serait sur le chemin du retour dans les montagnes ou sur les territoires des tribus animales. Un endroit ou un décès n’aurait rien d’insolite.

Retourner au camp, s’asseoir avec eux, écouter leurs jacassements exigeait une force puisée du fond de son âme. Elle appela toute sa volonté pour ne pas déguerpir. Afficher un air jovial au lieu d’un regard meurtrier lui demandait une parfaite maitrise de soi. Soigner Arment lui coûtait à présent, la dégoûtait presque. Elle avait toutes les difficultés à ne pas retenir une grimace. Malgré son désir de cacher ces changements au plus profond de son être, la raideur de ses gestes ne trompa pas le guerrier expérimenté.

—Avez-vous peur du débouché de cette aventure, Kita ?

—J’ai hâte de rentrer, répondit-elle en toute bonne foi.

—Le confort de la maison est un luxe dont on ne rend compte qu’une fois parti.

—Si l’on est désiré.

—Ah ! Une femme qui vous embrasse le soir avec un faisan sur le feu.

Ses paroles amicales renforcèrent sa hargne. Comment osait-il la regarder dans les yeux et lui planter un couteau dans le dos ? Une pratique des assassins.

Ce que tu es, visiblement.

Je n’ai jamais trainé d’assassins.

Les fossoyeurs seraient tous des criminels dans ce cas ? Tu as tué deux personnes, peu importe où sont leurs corps.

Lâche-moi.

Regarde la vérité en face ! Es-tu pleutre ou stupide de les renier ?

Un peu des deux.

La voix éclata de rire tant et si bien que Kita ricana. Arment la dévisagea, plus interloquée qu’effrayée. La cavalière se mura dans le silence.

—Vous avez changé depuis notre départ de Cerralion.

—Heureuse que vous le constatiez.

Elle avait du mal à tenir ces discussions, échangeaient tout au plus quelques phrasées sans grands intérêts avant de se désintéresser l’un de l’autre, Kita usée et dédaigneuse de la tromperie dont elle était sujette et Arment par la gêne. Alors qu’ils s’enfonçaient dans la forêt, ils abandonnèrent tout faux semblant. Kita ne communiquait avec eux que par nécessité, prenant soin de glisser sur son visage le masque de la cordialité. Peu amusée par la comédie, elle détestait le revêtir et ne l’habillait qu’en de rares occasions.

Malgré la voûte des feuilles, un vent froid serpentait entre les arbres la nuit pour la glacer jusqu’au sang. Le bruissement des végétaux avait tout d’inquiétant, les ombres dansaient au rythme d’un ardent bal porté sur des fréquences inaudibles pour l’ouïe humaine. Les oiseaux voltigeaient sur les branches, les narguaient de petits yeux vicieux. Kita détestait cette forêt où de bruits sourds et longs, presque trainants lui rappelait les ondulations d’un serpent. Dans les montagnes, hormis les sommets se découpant sur les visages des lunes, les ombres mourraient. La bourrasque chantait-elle certes à tue-tête, riait de leurs organismes si fragiles, au moins était-elle sincère. La Forêt la trompait. Pour affronter la froidure, la dresseuse ramena ses genoux contre sa poitrine, caressait son bâshki dont les ronflements discrets la rassurait et se forçait à fermer les paupières. Elle pensait que dormir la calmerait. Elle avait tort. Des cauchemars pullulaient : une nuit ses compagnons l’abandonnaient dans un trou, la suivante, Keïdan emprisonnait ses bras alors qu’Arment l’égorgeait, elle s’éveilla en sursaut à l’instant même où elle rendait l’âme après une longue agonie à tenter de stopper l’hémorragie. La troisième nuit, elle rêva que Galtriel la trompait pour l’humilier. La cavalière jaugea celui-ci acceptable. Sans s’en rendre compte, Kita plongeait dans la paranoïa. Chaque geste devenait un indice et plusieurs indices la conduisaient à une piste. Plus que se refermer sur elle-même, elle devait étrangère à ses compagnons. Galtriel vint la trouver un jour où ils progressaient dans une tourbe.

—A quoi jouez-vous ? Gronda-t-il.

—Moi, je joue ? J’attends qu’ils m’assassinent.

—Je n’ai jamais évoqué un assassinat.

—Au moins avec une lame, je verrais Khéor arriver. Si tant est qu’il existe, cet enfoiré. L’attente me tue petit à petit.

—Ferol et Arment vous ont entendu parler, Kitaya.

—Je ne parle pas seule. Je lui parle à elle.

Elle tapota ses tempes.

—Elle me dit de me méfier de vous mais ça vous le savez déjà.

—Quoi ? Reprenez-vous ! Rusez, bon sang. Montrez-leur que vous indispensable.

—Inutile de se leurrer. Ils connaissent ma valeur. Là n’est pas le problème.

La jeune femme pinça les lèvres. Sa voix sifflait sans s’exprimer, après Reikoo, elle aussi la testait. Tous doutaient d’elle. Tous.

—L’attente me tue. Je les entends causer entre eux sur la meilleure manière de me liquider, même si je ne les vois pas. Je les entends. Ils chuchotent mais ils ignorent que j’aie l’ouïe fine.

—Vous délirez…

—Chut ! Taisez-vous. Ne les entendez-vous pas ? En ce moment même, ils complotent. Ah, les rats !

Galtriel se pencha discrètement avant de lui adresser un regard sombre.

—Ils ne parlent pas, Kitaya. Ils sont tous espacés d’au moins deux pas.

—Bien-sûr que non, ils ne communiquent pas entre eux par voix verbale. Pas avec leur bouche, du moins. Vous ne les écoutez pas car vous me causez. Tout dans leur posture les trahit. Je lis leurs pensées.

—Bordel ! Vous méritez des claques, jeune fille.

—Même les vôtres.

—Quoi ?

—Vos pensées, je peux les lire. Vous pensez que je suis une ignorante qui gazouille comme un rossignol. Vous en même sûr. Non, taisez-vous. Je sais ce que vous allez me dire et je peux vous certifier que vous avez tort.

Plus aucune bannière n’existait. Sa bouche formulait des mots auxquels elle ne songeait pas. A sa voix physique se mêlait des inflexions, des accents de la personne, de l’entité qui l’habitait. Elle traînait en fin de phrases, sifflait presque.

Qui était Kitaya Undoriel ? La Trempe-Egouts de ces trois dernières années ? La pleutre, la trouillarde, l’alcoolique ? Ou cette voix ? La sienne, en réalité. La migraine la saisit. Elle agrippa son crâne entre ses mains, ses doigts se courbèrent, ses lèvres s’étirèrent en une hideuse grimace.

—Va-t’en ! Laisse-moi…

Elle cracha cet ordre avant de gémir. Elle n’en pouvait plus, ne supportait plus. Quoi précisément, elle l’ignorait. La cavalière savait seulement qu’une présence parasitait son esprit, le gangrénait. De ses yeux révulsés, presque fous, elle fixait Galtriel comme s’il pouvait l’aider en lui fendant le crâne.

—Ca suffit, petite sotte !

Sa joue brûla avant qu’elle ne vit le coup partir. Sa tête roula sur ses cervicales.

—Cesse de lutter, tu me rends folle. Respire !

Kita inspira. Les doigts sur son visage, elle dévisageait l’homme-arbre furieux.

—En vous conduisant de la sorte, c’est ma vie que vous mettez en jeu. Psychotez si ça vous prend mais laissez-moi en dehors de ça.

Ses paupières papillotèrent. Quelques pas plus loin, les quatre hommes les attendaient.

—Comportez-vous normalement sinon c’est moi qui vous ferais taire à jamais.

—Comment être sûre que vos propos sont fondés ?

—Qu’est-ce que j’ai à gagner de votre mort ? Vous ne représentez aucun danger.

—Et pour eux ?

—Je ne sais pas.

Mentait-il ? Kita donnerait cher pour le savoir, tous les acculer et repartir, seule, avec les trois gemmes. Galtriel la double. Une chose était sûre : même si elle lui avait sauvé la vie, elle ne pouvait le compter comme allié.

La Forêt puait de mystères, recelait de charmes insoupçonnés et de créatures issus de la fertile imagination d’un enfant : félins volants, oiseaux à la longue crête tachetée de jaune, dégarnies de plumes et curieuses bestioles inoffensives ressemblant à des poissons prolongés de pattes, pourvues de poumons et d’une épaisse langue rose. En en avait d’ailleurs le goût : sa chair fondait sur sa langue, savoureuse et gorgée d’eau.

—J’espère qu’il n’est pas toxique, plaisanta Ferol. De tels animaux développent souvent des armes invisibles.

Ce qui ne semblait pas être le cas de cette race. Aucune maux de ventre ne la handicapait le lendemain et plus que tout, la sensation de satiété l’accompagna toute la journée. Les prédateurs ne divergeaient pas plus ici que dans le reste des territoires Horziens : ils s’effrayaient à la vue du feu, restaient hors de portée des lames étincelantes et des larges mouvements de bras d’intimidation de ses compagnons. Et nulle trace du dragon. Reikoo s’impatientait des résultats de ses recherches qui frôlaient le néant. Elle avait bien essayé de lui expliquer que « les dragons sont morts » et « les indigènes se méprennent. Que peut-on espérer des sauvages ? » Ces arguments avaient beau la tenir en vie, ils agaçaient Reikoo.

—Aidez-moi ! Selon vous, où suis-je censée fouiller ?

—Là où vous reconnaitrez des traces de dragons. C’est pour ceci que ma Dame vous a offert une place dans notre patrouille. A mon avis, vous être incapable de les reconnaître !

—Je ne peux pas en inventer où il n’en n’existe pas.

—Cherchez mieux. Il y en a forcément quelque part.

Ces propos, ils se les échangeaient plusieurs fois entre un lever et un coucher de soleil. Kita ne trouvait aucune trace du dit dragon. Si un dorakkar possédait son confort au minimum dans un box long de plus de six pas et large de cinq, elle n’osait imaginer la place que requérait un lézard géant adulte, dix fois plus grands que les leurs animaux domestiqués. Elle en référa à Reikoo qui balaya son explication (scientifique et expérimenté) d’un revers de main. Alors, elle chercha. Plus les cycles se succédaient, plus elle s’alignait sur de petits signes. La cavalière affirmait que le monstre était plus petit qu’un dorakkar et facilement maîtrisable avec de bonnes ressources. Des nouvelles qu’ils accueillirent avec joie. Si la dresseuse suspectait toujours autant ses compagnons, elle eut l’intelligence d’afficher de faux sourires sur ses lèvres. Depuis son altercation avec Galtriel, sa paranoïa restait intacte, s’amplifiait même. Elle apprit à fondre ce masque sur ses traits, à amadouer sa suspicion de promesses. Elle les nourrissait, attisait les braises d’une folie naissante.

Elle ne parlait plus à haute voix, non. Trop dangereux. On risquait de l’entendre. Alors, elle chuchotait sous cape, se mordillait les lèvres pour retenir un fou rire. Kita ne s’en rendait pas compte, elle ignorait que ses camarades la considéraient comme une paria, une dérangée à l’esprit perverti par les Kelpies. Ils disaient qu’elle avait « ravalé » son chagrin, « ravalé » jusqu’à perdre la raison. Peu importe. Dans quelques cycles, ils seraient débarrassés d’elle. Des idées courraient dans son esprit et comment savoir que cette hypothèse parmi une centaine d’autres était la bonne ?

Enfin, une aube, elle repéra des traces. Toute joyeuse, elle avertit ses compagnons. Son bâshki, lui, se trémoussait sur ses épaules, peu convaincu par cette affaire. Qu’elle aurait dû l’écouter mais la voix l’aveuglait. Dans sa bouche, le goût de la victoire éclot. La cavalière se voyait affronter le dragon, voilà qu’elle y croyait à présent !, à mains nues. Ils scanderaient son nom telle une héroïne. Elle déchanta le soir-même tandis que les branches translucides aux fines veinules orangés ondulaient au-dessus de sa tête.

Le serpent. Il a disparu entre les montagnes

Sa mise en garde sonnait creux.

Tu t’inquiètes pour rien. Lance-de-Fer l’a blessé.

Il attaquera encore.

Nous ne l’avons pas vu dans les montagnes.

Raison de plus pour se méfier.

Rembrunie, Kita roula sur le flanc. Elle rêva du monstre cette nuit : de ses crocs s’enfonçait dans sa chair, lapait son sang, la contaminait, la goûtait. La jeune femme se réveilla en sueur. Tâches de Myosotis ne ronflait pas. Il gardait le camp, dressé sur ses deux pattes, l’œil aux aguets. A la lueur du feu, une forêt ressemblait à une autre avec ses ombres et ses cris qui semblaient les mettre en garde contre un destin funeste. La dresseuse entendait un raclement de gorge, proche du vacarme qui faisait une rivière. Alors que le soleil brillait, les bois étaient lumineux, plus proche d’un rêve d’enfant avec ce tapis de givre blanc (une légère couche de glace, l’informa Reikoo) que des songes envoyés par Riuk. Le Dieu des souvenirs n’existait pas, ce n’était que la transposition des expériences humaines sur des arbres. Pourtant, la jeune femme la craignait. Ce blanc avait tout de malveillant. Dans sa culture, c’était la couleur de la mort, de l’autre-monde. Personne, hormis Reikoo ne portait de blanc. Un jaune lumineux encore, le soleil favorisait autant la vie que la détruisait. Elle parlait de bois mais ce n’en n’était pas. Ces arbres arboraient des branches aux ramifications si épaisses qu’elles semblaient couvertes d’un voile. Le sentier, quand il y en avait un, était à peine visible.

Après une demi-journée de marche le lendemain, ils atteignirent une colline bordée de grottes artificielles, creusées jusqu’au cœur de la terre par des peuples ayant vécu bien avant leur naissance. Les plus petites, étroites à fines fentes, dérangeaient Kita. Elles l’oppressaient. La jeune femme s’approcha d’une, se pencha et plissa les yeux pour sonder la fine griffure de ténèbres que recouvraient plusieurs pans de roches. Elle hoqueta. La dresseuse jurait avoir vu un œil améthyste barré d’un rectangle noir et animé d’intentions les plus malveillantes. Il lui sembla apercevoir l’éclat blanc de longues rangées de dents. Pris, la bouche s’ornait de ce qui se rapprochait d’un… sourire ?

—Je crois avoir vu quelque chose, les avertit-elle.

—Beaucoup de démons ont élu domicile dans ces grottes, lui expliqua Ferol. Regardez.

Il enfonça son poignard dans le trou et le ressortit indemne.

—Ils ont peur de nous. Et avec raison.

Kita continua son enquête, inspecta les autres cavernes. Les grosses, ventrues, répondaient aux échos de ses camarades, les moyennes abritaient des créatures à l’apparence de cerfs avec un troisième bois au milieu du front. Ses roches l’attiraient plus que de raison. Elle tâtait leurs flancs à la recherche d’indices et la chance lui sourit : elle en découvrit ! De petites zébrures marquaient la roche. Fière, elle pivota vers ses compagnons, toussa pour attirer leur attention :

—Messieurs, voici notre attestation finale : tanière du dragon.

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