Chapitre 07 - Le Campement du Roi Calion

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En équilibre à l'arrière du cheval de Vorondil, Sauron s'apprêtait enfin à commencer sa propre vie, à faire ses propres choix et à suivre les chemins dictés par son cœur. Depuis sa naissance, sa vie n'était que moqueries, torture et humiliation. Il n'avait jamais haï sa mère pour autant et ne se posait que rarement des questions au sujet de son père. Il avait hérité de l'esprit de sa défunte mère. De ce fait, il ne s'accrochait que très peu au passé. Si mon père n'est jamais venu me chercher durant toutes ces années, je le laisserai tranquille. Si je le trouve un jour, ce ne sera que par pur accident et j'en serai tout de même heureux, mais sinon, je ne le chercherai avec aucune motivation, se disait-il la plupart du temps.

Après une petite heure de cheval, les deux jeunes hommes avaient traversé bien des plaines, chacune de couleur différente, le vert éclatant de l'herbe portée par le vent, le doré lumineux des champs de blé, et même un rouge sanglant rempli d'une certaine passion que des milliers de coquelicots avaient fièrement reflété. Soudain, Vorondil s'arrêta sur une petite colline, puis, tout en gardant son regard dirigé devant lui, il inclina légèrement la tête vers Sauron et lui dit :

— Voici où nous allons, le campement d'où je viens, l'armée du roi Calion.

— Je n'avais jamais vu une telle armée, répondit Sauron.

Pour être exact, Sauron n'avait jamais vu d'armée, quelle qu'en soit la taille. Là d'où il venait, il n'y avait ni roi, ni reine, ni gouverneur, il n'y avait pas de soldats, seulement quelques mercenaires. Le village d'Imrad n'avait jamais attiré l'attention de personne et ne le ferait sans doute jamais. Devant lui se trouvait une immense armée qui occupait des centaines, voire des milliers de mètres carrés. Il voyait tout depuis son perchoir. À leur droite, on pouvait apercevoir la petite ville d'Ellor, connue pour son hospitalité. En son centre se dressait une tour couleur argent qui régnait sur les habitants et que l'on pouvait apercevoir de très loin lorsque le soleil se reflétait sur ses murs. Elle était comme un phare pour les âmes égarées.

En un rien de temps, ils se trouvèrent déjà à l'entrée du campement. Plusieurs tentes en toile rouge étaient dressées autour d'eux, tendues par des grandes sardines en bois. Les chevaux des soldats, dénudés, se nourrissaient du peu de verdure qui n'avait pas été piétinée. Pendant ce temps, leurs maîtres dormaient, buvaient ou mangeaient autour d'un feu de camp qu'ils avaient mis en place pour accueillir la nuit qui commençait à pointer le bout de son nez. D'autres jouaient aux cartes tandis que ceux qui regardaient faisaient des paris sur le gagnant. Vorondil s'arrêta au milieu du campement, fit signe à Sauron de descendre, attendit qu'il soit à terre et fit de même. Ils entrèrent ensemble dans une grande tente luxueuse, bien plus confortable que celles dans lesquelles dormaient les autres soldats. Des bordures dorées étaient brodées sur la toile et un tapis de velours se trouvait au milieu, sur lequel étaient étendus plusieurs couchages. Vorondil ouvrit une petite malle, remua ses bras quelques secondes et en sortit un pantalon noir. Il continua de fouiller puis en extirpa un large chemisier, le reposa en affichant un petit sourire moqueur et en prit un autre un peu plus petit. Il se leva en tendant les vêtements vers Sauron.

— Tiens, prends ça. Tu peux te changer et te nettoyer avec l'eau qui se trouve là, dit-il en pointant du doigt un petit seau en bois dans un coin.

Vorondil enjamba les couchages et sortit de la tente. Sauron attendit qu'il soit parti avant de se changer avec les vêtements propres qu'il lui avait donnés. Il tira sur ses bottes pour les remettre, toujours par-dessus son pantalon, se barbouilla le visage, les bras et les mains avec l'eau afin d'être à nouveau présentable. Il inspira et expira d'un grand coup puis, sûr de lui, se dirigea hors de la tente. La nuit était déjà tombée, les feux de camp et les torches illuminaient le campement comme de petites lucioles. Assis autour d'un feu, sur des rondins de bois, se trouvait Vorondil accompagné de trois autres personnes. Sauron s'approcha et prit place à côté de lui. Il lui tendit un bol en terre cuite rempli d'un ragoût de lapin et de quelques pommes de terre encore chaudes.

— Voici mes compagnons, lui dit-il en désignant les hommes en face de lui. Nous voyageons ensemble, j'ai toute confiance en chacun d'eux. Cirth est le meilleur archer de tout le royaume, il a dû hériter de la vue d'un aigle, peut-être même de deux d'entre eux !

— Je ne rate jamais ma cible ! ajouta fièrement Cirth.

Autour de lui étaient assis trois hommes, tous vêtus du même uniforme que Vorondil, fait de métal et de cuir noir, d'une cape bleue avec capuchon et d'un foulard autour du cou pour dissimuler le bas de leur visage, ainsi que de canons sur les avant-bras. En partant de la gauche, on avait Cirth, l'archer le plus connu du royaume et de ses alentours, aussi grand que Sauron, les yeux gris clair qui se distinguaient à peine du blanc de ses yeux, une peau légèrement mate et des cheveux châtains en bataille. Ils portaient plusieurs bijoux en or blanc et en argent sur les oreilles qui lui donnaient un certain charme inhabituel. Ses flèches étaient faites d'un bois très noir et de plumes de corbeaux à leur extrémité, ce qui était particulièrement rare.

À côté de lui, en train d'aiguiser un sabre à l'aide d'une pierre en céramique, se tenait le plus grand d'entre eux, Narmacil. Il avait les cheveux d'un noir intense attachés dans le dos, formant une longue natte, et des yeux vert émeraude apaisants mais qui vous glaçaient le cœur si vous aviez le malheur de les croiser. Il portait un deuxième sabre dans son dos, de la même longueur et couleur que celui qu'il tenait dans les mains.

Enfin, tout au fond, était assis Rana, couteaux à la ceinture, le plus mystérieux d'entre eux, contemplant les flammes qui dansaient et perdu dans ses pensées. C'était un homme aux cheveux bruns tombant sur les oreilles, avec une barbe de plusieurs semaines et un regard poignant assez sombre.

Cette rencontre fut vite interrompue par un vacarme derrière eux. Une foule de soldats s'était regroupée en cercle, des cris de plus en plus forts résonnaient dans tout le campement, attirant la curiosité des plus éloignés. Sauron ne fut pas épargné, il était tout aussi curieux que les autres. Il posa son assiette sur le sol, se leva et se dirigea vers le troupeau. Quelque chose semblait intéresser les hommes. Ils étaient joyeux, criaient, pariaient et injuriaient. Ils étaient tous très agités. Grâce à sa carrure fine et à ses épaules musclées, Sauron réussit à se faufiler jusqu'à la première ligne. À peine arriva-t-il que du sang gicla dans ses yeux.

Histoire écrite par A.L MATHERS ♥ IG @a.l_mathers

Illustrée par Noémie DUMONT ♥ IG @la_noun

Corrigée par Mélany BIGOT



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