Ardent malentendu

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Jess fronça les sourcils, et un instant son esprit fût pris d’un vertige : venait-elle de rêver tout ce qui venait de se passer ? Était-elle réduite au fait de fantasmer sa première fois, prisonnière d’un étrange rêve lucide ultra-réaliste ? Elle soupira, passa une main sur la peau de pêche du bas de sa fesse gauche : elle remonta luisante d’un mélange de sperme coagulé et de mouille. Cela devait répondre à ses questions…

Bille en tête, partagée entre l’énervement contre ce gars qui fuit honteusement après l’orgasme, et la drôlerie de la scène – était-il tellement puceau qu’il ne supporterait pas que je le regarde après qu’il se soit laissé aller à ses pulsions ? – Jess prit la décision d’aller directement le confronter dans le salon. En soi, la remontrance qu’elle s’apprêtait à faire à Mathieu n’était rien d’autre qu’une manière déguisée de s’approcher à nouveau de lui et, potentiellement, de rempiler pour cet acte tant désiré auquel elle avait enfin droit. Elle voulait sa dose de bite, encore.

Elle sortit nue, sans prendre la peine de s’essuyer ou d'enrouler un linge autour de sa taille, et obliqua à l’angle de sa chambre vers le minuscule salon où la lueur vacillante d'une télévision lui indiqua qu'il avait repris son zombifiant jeu vidéo. Elle fondit sur le canapé, celui-là même où elle avait pour la toute première fois vu son chibre démesuré tandis qu’elle feuilletait innocemment son volume des Tommyknockers. Propulsé comme un bolide, elle déboula en face de lui, et les informations prirent un certain temps à s’agglomérer dans sa cervelle : Math était bel et bien là, mais entièrement habillé, un casque sur les oreilles et les yeux mi-clos, comme s’il somnolait depuis quelques dizaines de minutes déjà. Dans sa tête, un levier d’urgence s’enclencha et ses pieds prirent le contrôle : DEMI-TOUR DES QUE POSSIBLE ! Mais elle n’eût guère le temps de pivoter sur ses talons que déjà il ouvrit grands ses yeux et, pris de stupeur, sursauta devant le corps nu de Jess, tout en remontant le col de son sweatshirt jusque sous son nez.

Elle l’aurait dégoûtée qu’il ne s’en serait pas pris autrement…

Jess ressentit une décharge électrique dans le bide – ce n’était pas lui, Jess, fais face à la vérité, ce n’était pas lui !, beuglait la voix dans sa tête, une voix qui paraissait elle-même paniquée – mais la seule stratégie de défense qui lui parut soutenable fût l’attaque.

- Tu te fous de ma gueule ?

Il haussa les sourcils, sans mot dire, prenant bien garde à ce que ses yeux ne descendent guère plus bas que le triangle formé par ses deux yeux et sa bouche. Était-elle la première fille qu’il voyait à poil dans la vraie vie ?

- De quoi tu parles ?

Elle soupira, plantant ses bras contre ses flancs.

- Sérieusement, tu vas jouer l’innocent ? Faire comme si tu n’avais rien fait ?

- Sérieux je sais pas de quoi tu parles Jess.

Elle rougit, mais ne se démonta pas.

- Fous toi pas de ma gueule, Math…

Il craqua avant même qu’elle ne finisse cette dernière phrase, et un instant elle crût qu’il allait chialer tant sa voix déraillait.

- Chu désolé…, geigna-t-il. J’abuse de ouf, je sais. Mais c’est arrivé deux fois, trois fois max. Pas plus. Et j’en avais vraiment besoin Jess, fin… Faut pas le prendre comme ça !

Les traits de son visage se crispèrent, elle n’aimait pas la tournure que prenaient les évènements. La petite voix devenait de plus en plus difficile à taire.

- De quoi tu parles enfin ?

- Mais quand je te mate, j’suis désolé… Je pensais pas que ça te dérangeait. Je pensais même que ça t’excitait.

- Tu me mates ?

Math se figea à son tour. Son visage devint blanc et ses lèvres se mouvaient difficilement, tant elles luttaient contre les tremblements dont elles étaient les victimes.

- Ce n’est pas de ça dont tu parlais ?

Jess fit trois pas, jusqu’à être à moins d’un mètre de lui. Ce n’était vraiment pas lui ! Mais la rengaine interne fût interrompue par une pensée parasite autrement plus puissante : tu veux une bite, t’en as une sous la main… Sers-toi ! Elle hésita, puis se pencha. Le globe de ses seins imposaient aux muscles oculaires de Math un sang-froid sans pareil pour résister au réflexe de se planter sur ce qui s’offrait à lui, mais malgré cet effort, son cerveau n’eût aucun mal à dessiner avec une acuité exceptionnelle la vision périphérique floutée de cette poitrine somptueuse. Et presqu’aussitôt, l’érection timide provoquée par la vision de sa coloc tant fantasmée se transforma en pieu indissimulable, bombant visiblement son pantalon de jogging gris dans le prolongement de sa cuisse gauche. Jess sourit.

Une de ses mains se posa sur ce sexe piégé par une camisole de tissu chiné.

- Alors comme ça tu me mates par le trou de la serrure ?

Il grimaça.

- C’est si mal ?

Elle serra légèrement ses phalanges, tout en imprimant un imperceptible mouvement de va-et-vient. Imperceptible pour tous, mais pas pour Mathieu qui se sentait encore un peu plus durcir sous ses doigts.

- Tu faisais quoi, derrière la porte ?

Ses cheveux mi-longs tombèrent sur son front, tandis qu’il baissa la tête. Il ne répondit pas, forçant Jess à se jeter dans un jeu de devinettes peu complexe.

- Tu te branlais ?

- Tu crois que je faisais quoi bordel ? T’as vu le corps que tu as ?

Elle sourit, sans vraiment le vouloir. C'était la réponse qui lui fallait.

- Qu’est-ce qu’il a mon corps ? Tu peux le dire tu sais…

- T’es jolie, répondit-il.

- Seulement jolie, c’est vraiment ça que tu voulais dire ?

Il garda un instant le silence, puis ajouta :

- T’es super bonne putain Jess. Et tu le sais. Tu le sais… Et j’ai terriblement envie de te baiser depuis l’instant où t’es entrée dans cette putain de coloc.

Elle mentit :

- Moi aussi… ça tombe bien.

Sa main lâcha son sexe pour lentement remonter jusqu’à l’élastique qui le maintenait plaqué contre ses abdominaux. Lorsque la pulpe de son doigt passa entre le tissu et la chaleur brûlante de son ventre, lorsqu’elle imagina son index frôler la carapace de muscle formée par ses abdominaux – ceux qu’elle avait eu loisir d’apercevoir, puis d’imaginer et fantasmer en de nombreux rêves érotiques – elle fondit en mouille. Elle tira d’un coup sec sur son training, et sa bite s’en extirpa comme un diable à ressorts en claquant contre la peau sous son nombril.

Sans lâcher son emprise, elle s’agenouilla devant lui. Elle jeta un bref coup d’œil vers son visage, il paraissait excité et en même temps terriblement effrayé. Lorsqu’elle le prit en bouche, la peur sembla s’évaporer de son être.

Si l’un ou l’autre aurait été capable de garder un peu de sang froid face au bouillonnement d’hormones dont ils étaient les victimes, sans doute auraient-ils vu l’immense œil globuleux, presque luisant, qui les observait impudiquement depuis la baie vitrée du salon.

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