CHAPITRE 5 : JULIAN

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" An angel's smile is what you sell
You promise me heaven, then put me through hell
Chains of love got a hold on me

When passion's a prison, you can't break free"

Bon Jovi - You Give Love A Bad Name - Slippery When Wet - 1986

 Je ne sais pas combien de temps je suis resté assis par terre, j'essaye de me relever, il faut que je retourne à la soirée. Je sèche mes joues, je suis vidé, je n'ai plus rien en moi, je suis une caisse vide qui marche vers le bar. Thomas est occupé à danser, Hugo et Jenni aussi, Hector est à table avec ses filles. Jackson vient à ma rencontre. J'ai demandé une bouteille de vodka, cela me fera du bien d'oublier, même si je sais que c'est un leurre, jamais je ne l'oublierai, jamais.

— Julian arrête, cela ne changera rien.

— Je sais que tu as raison, mais j'ai besoin d'un verre.

— Julian, arrête de boire et réagit. On part lundi seulement.

— Que veux-tu que je fasse ? Vous partez, je vous aiderai à mettre vos bagages dans la voiture, je lui réponds d'un air sarcastique.

— Tu me prends pour un con ?

— Ne me parle pas sur ce ton, Jackson !

— Pourquoi ? La femme que tu aimes est sur le point de partir. Elle t'aime aussi. Tu attends quoi ? Tu es le pire des connards que je connaisse.

— Jackson ! Je t'interdis de...

— De quoi ? De dire que tu es un connard ? C'est le cas, ma sœur t'aime et tu es trop con pour le voir. Merde, bouge ton cul au lieu de te saouler la gueule, c'est tellement plus facile de s'enfuir que de faire face.

— Ça suffit ! Dégage ! Je t'interdis de me parler comme cela !

— Pourquoi ? Je dis la vérité et la vérité fait mal, très mal. Tu n'es qu'un connard de première.

 Je n'ai jamais fait cela, je ne me suis pas souvent battu, ce n'est pas dans mon tempérament. Je ne suis pas belliqueux, mais je me retourne et je l'empoigne par son col de smoking. Thomas intervient quelques secondes après.

— Et les gars, cela suffit ! Maintenant !

 Je le lâche, si une personne peut me faire arrêter quelque chose, c'est Thomas. Sa voix m'a toujours apaisé.

— Il se passe quoi entre vous ? questionne Thomas.

— Rien ! nous répondons en cœur.

 On est au moins d'accord sur un point. Thomas se retire, Jackson aussi. Moi je prends ma bouteille de vodka. Jessica est sur la piste de danse avec un idiot qui lui a déjà écrasé les pieds plus d'une fois.

 Je me dirige vers Thomas, je lui dis que je vais faire un tour, qu'il ne m'attende pas pour rentrer.

— Pas de question Thomas, pas de question. Merci.

 Je lis de la souffrance dans son regard. Je suis malheureux, il l'est aussi. On fonctionne comme cela chez nous, et le pire dans l'histoire c'est que je n'ai jamais pu me confier à lui. Comment j'explique à mon frère, à mon double que je suis amoureux de sa fille ? Comment je lui annonce cela ? Je m'éloigne du groupe et en quittant la salle, je tombe sur un groupe de trois filles, une blonde, une brune, une rousse. Elles savent qui je suis, forcément. Je m'installe dans leur groupe, nous sortons et j'appelle un taxi. Boris me voit, je lui dis que les autres sont encore présents. Je rentre par mes propres moyens. La limousine taxi arrive et nous nous engouffrons à l'arrière. Je fais passer la bouteille de vodka, il faut que je boive, que j'oublie. Je ne connais même pas le prénom de celle qui est sur mes genoux. Elle est occupée à me déshabiller, elle m'embrasse, elle est impatiente, elle veut plus, beaucoup plus. Elle se déshabille. J'ai pris un préservatif dans ma poche, je l'enfile sur mon membre raide et dur et je la pilonne. Ses deux copines sont en train de baiser sur la banquette en face de nous. Cela me dégoute, je me dégoute, un animal en rut, c'est tout ce que je suis. On se rhabille quelques minutes après. Les deux autres ont donné l'adresse d'un motel et la limousine nous dépose devant une chambre. Je paie le taxi et nous rentrons dans ce motel miteux. J'aperçois mon reflet dans le miroir, je me répugne. La rousse passe ses mains sur mon corps, enlève ma veste de smoking, passe devant et se frotte contre moi. Elle ou une autre, cela n'a aucune importance, la baise est un exutoire comme un autre. J'ai baisé avec la rousse, j'ai baisé avec la brune, puis la blonde nous rejoint et nous baisons à quatre.

 C'est dégeulasse, vraiment dégeulasse. Je me sers de ces filles, comme de toutes celles qui sont passées dans mon lit. Je n'en veux qu'une, une seule et unique et c'est en pensant à Jessica que je jouis enfin. Je suis pathétique, à en pleurer. Les filles se sont endormies, je me lève, vais prendre une douche. Mon reflet dans le miroir m'offre un visage décomposé. Je suis crevé, malheureux. J'appuie mon front contre mon reflet et je repense à Jackson. Il a raison, je suis un connard, un connard de première. Les jets d'eau chaude me font du bien. Mes larmes coulent le long de mes joues et cela m'apaise. Je m'habille, repasse dans la chambre, elles sont endormies toutes les trois. Je ne connais toujours pas leur prénom, quel crétin je suis. Je sors mon portable et j'appelle un taxi. Il sera là dans dix minutes. Je mets mes chaussures, prends mon portefeuille et laisse mille dollars sur la commode. Je sais qu'elles veulent mon numéro de portable, mais il n'en n'est pas question. Je n'ai jamais eu une liaison sérieuse, pour la bonne et simple raison qu'aucune femme ne supporte de se faire appeler par le prénom d'une autre lorsque je fais l'amour avec elle. Enfin faire l'amour, cela me fait sourire, je n'ai jamais fait l'amour. Je baise dur et fort, mais je suis incapable de faire l'amour. Je sais que j'en serai capable lorsque cela sera avec la bonne personne, et la bonne personne m'a annoncé qu'elle partait.

 Je me rends compte que j'ai toujours été amoureux de Jessica. Elle était haute comme trois pommes et elle faisait de moi ce qu'elle voulait. S'il avait fallu que je vende mon âme au Diable, pour elle, je l'aurais fait. On ne s'est jamais posé de questions, on était présent l'un pour l'autre. Elle et moi contre le monde entier. Aucune n'a jamais fait battre mon cœur comme elle peut le faire. Et je suis tellement con que c'est maintenant qu'elle me dit qu'elle est sur le point de partir que je comprends que toutes ces petites choses vont me manquer. Qui mangera un morceau de ma tarte au citron ? Je déteste cela, mais j'en prends toujours afin de pouvoir la lui donner. Elle partage toujours son moelleux au chocolat. Qui va me préparer une mousse au chocolat moitié lait et moitié noir ? Chez qui je vais m'installer le soir ? La chambre à côté de la mienne sera vide. Qui se mettra dans mes bras le soir lorsqu'il fait beau et que nous partageons un transat ? Qui va me préparer mon petit café noir bien serré ? Je sais bien que toutes ces choses, je peux les faire moi-même, mais aucune n'aura le même goût. Ce que fait Jessica est pour moi et pour moi seulement.

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