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C'est en sursaut qu'elle se réveilla, sur le canapé en face de la cheminée, épuisée et en sueur. Toutes les nuits, toutes les nuits c'était la même chose, elle revivais les derniers évènements avant le suicide de sa mère de façon chaque fois plus horrifique et étrange, les détails se mélangeant à ses souvenirs plus anciens, déformant la réalité et épuisant sa mémoire déjà fragile. Bientôt une semaine était passée et elle n'avait pas remis les pieds dehors, pleurant à chaque fois que son regard croisait un souvenir, les cadavres d'emballages de restauration rapide empilés sur la table basse. Elle fouilla dans sa poche et en sortit une carte totalement noire où était inscrit un numéro de téléphone : il était temps de trouver des réponses.

- Le Grand et Glorieux Maître M'Noko à l'appareil, comment je peux vous aider.

- Je souhaite prendre rendez-vous.

- D'accord, vous devez tout d'abord me faire parvenir un virement de 150€ pour vérifier que vous êtes une cliente sérieuse.

- Vous ne voulez pas d'abord savoir ce dont j'ai besoin ?

- Je suis le Grand et Glorieux M'Noko, je sais tout faire. Je peux vous faire parler aux morts ou retrouver un amour perdu, créer un sortilège d'entrave ou maudir vos ennemis. Je peux également vous dire votre avenir, attirer la réussite vers vous ou vous guérir du cancer et du Sida. Je vous envoies mon RIB et je vous retéléphone lorsque vous aurez effectué le virement, au revoir.

Quelques secondes plus tard elle reçu dans son application de messagerie les coordonnées du compte en question.

"C'est donc toi, l'escroc..."

En effet, les numéros correspondaient à ceux retrouvés dans l'ordinateur portable de sa mère et au compte sur lequel de nombreux virements exorbitants avaient été effectués par sa mère, et ce, depuis plusieurs années. Elle effectua, comme l'avait demandé ce qui semblait être lun marabout africain, le virement, tout en gardant trace de chaque interactions qu'elle pourra avoir avec cet homme. Iséa serait majeure dans quelques jours et elle n'avait désormais plus personne, elle se retrouvait complètement seule, dans une ville où elle ne connaissait personne, son coeur plein de haine, de colère et de tristesse, il fallait qu'elle trouve une raison à tout ça. Lorsque les pompiers étaient venus décrocher le corps de sa mère, avant de partir, ils lui avaient remis une lettre manuscrite de la main d'Anna, l'écriture n'était pas fébrile ou rapide comme les graffitis qu'elle avait pu trouver dans le carnet de sa table de chevet, mais étrangement calme, chaque lettre dessinée minutieusement, comme si elle se trouvait apaisée d'enfin terminer le calvaire qu'était sa vie.

Plutôt mourir que de supporter le fait de le voir t'emmener en enfer avec lui. J'ai toujours tenté de te protéger du démon, mais désormais il est à notre porte et je ne peux plus fuir. Tu seras majeure dans quelques jours et je ne pourrais plus te retenir à mes côtés. J'ai essayé tant bien que mal de t'apprendre tout ce que je savais, j'ai essayé de travailler à m'en détruire la santé pour être sûre que tu ne manques de rien, mais désormais je ne peux plus rien pour toi, pour nous. Je suis malade et je vais mourir, je ne supporte pas l'idée de terminer mes jours dans un lit d'hopital froid, entourée d'inconnus qui me dévisageront avec pitié ou méprise. Je ne veux pas devenir un poids pour toi, je t'ai causé assez de tort, j'en ai assez fait. Je suis désolée, ma fille, si tu savais comme je m'en veux, je t'aime tellement... Rien de tout ça n'est ta faute.

Iséa sentit les larmes remonter en elle. Elle aurait tellement désiré que ça finisse autrement, et même si elle n'aurait pu l'empêcher de commettre l'irréparable, elle aurait préféré que ses derniers instants en sa compagnie ne soient pas silencieux devant un repas qu'elle ne touchait que du regard.


"Maman... Comment as-tu pu penser que c'était la meilleure façon de me dire aurevoir ? Comment as-tu pu rester aussi froide et distante malgré le gouffre qui allait m'aspirer ?! Tu as été tellement égoïste... As-tu seulement pensé à moi un seul instant quand tu m'as regardé dans les yeux avant de partir..."

Ses pensées remplies de ressentiment s'évaporèrent à l'instant où son téléphone sonna.

- Bonjour, c'est moi, je peux vous voir demain après midi a 15 heures, à l'adresse que je vous envoies, ne loupez pas le rendez-vous, pas de décalage possible sans frais supplémentaires, merci, au revoir.

Et sur ce, il raccrocha, sans même attendre une quelconque réponse. Il était treize heures douze à l'heure où elle regarda la montre qu'elle portait au poignet. Il lui restait donc moins de vingt-quatre heures avant le dénouement final. Elle devait trouver une solution pour traverser la moitié du pays dans ce délai, mais pour l'heure, elle se concentra et se prépara à méditer quelques minutes. Elle remplissait ses poumons d'air et essayait de respirer en pleine conscience, lentement, laissant son esprit faire le vide, laissant toute sa frustration quitter les points de pression de son corps avec un petit instrument en bois, fait justement pour y appuyer. Elle devait, avant d'aller confronter celui qui était la source d'une partie du mal et du gouffre financier de sa mère, trouver d'avantage d'informations. Elle n'allait pas là-bas pour poser des questions, surtout aux vues de ce que ça lui aura coûté, mais bien pour le mettre devant le fait, l'enregistrer, et traîner en justice cet escroc de bas étages. "Rester concentrer", c'était la seule chose qu'elle se disait en montant les escaliers menant à l'endroit où elle avait découvert le corps sans vie. Elle entra. Tout en regardant le sol et en réprimant les émotions néfastes que lui inspirait désormais ce lieu, Iséa se diriga jusqu'à l'ordinateur fixe.


"09062002"

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