Chapitre n°9 : Menace

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Les cours avaient repris depuis quelques temps, nous nous étions croisés avec Eliott, mais rien de plus. Il était toujours pressé ou tout bonnement aux abonnés absents. J’avais des questions à lui poser, des choses à clarifier. Déjà par rapport à Arthur, le sujet qui me dérangeait le plus. Il me lançait des regards en biais dans les couloirs ou à la cantine sans pourtant venir me parler. Cette impression de présence qui m’observe me suit jusqu’à chez moi. Je n’ai jamais le sentiment d’être seule. Le froid du mois de janvier semble encore plus mordant qu’en décembre. Mon bonnet sur la tête, plaquant mes cheveux blonds bouclés de chaque côté de celle-ci me permettait de ne pas perdre la chaleur de ma tête. On a tous connu cette personne qui nous a dit que la chaleur se perdait par la tête. Dans mes bottes brunes, je glisse sur les plaques de verglas puis sur la neige. Quel sport ! Mais cette profonde habitude, celle de rentrer chez soi le soir en sortant du lycée, est perturbée. Je l’ai vu du coin de l’œil que quelqu’un me suit. Heureusement, je suis devant chez moi, je me retourne sèchement mais il n’y a personne. J’ai rêvé ?

Cette nuit est compliquée. Je me réveille pour la troisième fois, le noir m’englobe et je me sens étouffer. Je tourne la tête vers la seule lumière de mon réveil qui affiche trois heures du matin. Je me lève, le t-shirt XXL me couvre jusqu’à mi-cuisse et un courant d’air me fait frissonner. La fenêtre est ouverte, mais aucun souvenir de l’avoir laissé comme tel. Il y a un enchaînement de choses étranges, d’abord cet homme qui me suit puis la fenêtre. Il faut arrêter là. Je ferme cette maudite fenêtre et descends les escaliers avec la souplesse d’un chat, sans un bruit. Mon chien semble aussi avoir été dérangé puisqu’il est devant la porte assit et la regarde. Il tourne la tête vers moi dans un couinement. J’ouvre la porte et il s’engouffre dehors sans que j’aie le temps de l’arrêter. Il aboie de toutes ses forces puis reviens aussi vite qu’il était parti.

***

Je toque à la porte de chez Eliott. Ma mère m’a déposé cette fois-ci et j’espère ne pas avoir à le regretter. La porte s’ouvre sur le visage de mon ami. Ses cheveux d’un brun sombre s’étoffent d’un reflet presque roux comme le soleil. Je le vois à son visage, il ne s’attendait probablement pas à me voir débarquer un samedi matin chez lui alors que je ne lui ai pas parlé depuis presque un mois.

« Diane ? Qu’est-ce que tu fais là ?

-Tu m’attendais non ? »

Il me prit dans ses bras. Je n’aie pas su comment réagir d’autre que de lui rendre son geste. Il m’invite à entrer, et me propose à boire, il se faisait justement du café. J’en prends donc une tasse.

« Lucie et moi avons parlé, dis-je assise sur le canapé de la maison qui semblait extrêmement vide.

-Et qu’est-ce qu’elle t’a dit ?

-Qu’elle ne nous en voulait pas et elle nous a donné sa bénédiction.

-Parce qu’on en avait besoin ?

-Eliott, s’il te plaît. Je sais ce que tu en penses, tu ne dois rendre de compte à personne, mais c’était important pour moi. Tu as tous les droits de ne pas prendre son avis en considération, mais pour c’est important. »

Il acquiesce, visiblement satisfait de ma réponse et il me rejoint sur le canapé pour m’embrasser. Ses lèvres m’avaient manqué, leurs goûts de café était prononcé mais ça n’enlevait rien à leurs saveurs. Il me fit alors visiter la maison pour de vrai cette fois-ci. Il commença par la cuisine là où j’avais vu Arthur et Lucie discuter puis la salle à manger, majestueuse et en parfait accord avec l’esprit de la maison. Il poursuit en me montrant la serre à l’arrière, par laquelle j’étais entrée par effraction, je l’avoue. Il en rigole d’ailleurs quand je lui explique comment j’avais pris Lucie en filature jusqu’ici et comment j’étais entrée pour le rejoindre.

« Tu sais, tu pouvais sonner »

Cette réflexion me fait rire mais je sais que je n’aurais pas pu. Pour la bonne et simple que raison que si c’était Arthur qui m’avait ouvert les choses ne se seraient pas passées de la même façon. Il m’emmène à l’étage où il me montre la salle de bain, nous passons devant la chambre d’Arthur. C’est le moment de lui demander des réponses.

« Pourquoi dois-je le fuir ? Dès qu’il apparaît j’ai l’impression que tu veux me le cacher ou me cacher tout court.

-Tu ne dois juste pas l’approcher c’est tout, vu le râteau que tu lui as mis.

-Rectification, le râteau que tu m’as forcé à lui mettre parce que tu m’as enlevé dans ta voiture.

-Effectivement. »

Et il en profita pour ne pas répondre à ma question. Ils cachent quelque chose, l’un comme l’autre.

Une fois encore, Eliott m’a mis à l’écart. Nous devions nous faire une soirée en amoureux hier soir mais il a tout bonnement annulé à la dernière minute. Il m’a juste envoyé un message d’excuse et a changé de sujet comme d’habitude. Mon téléphone sonne dans mes mains. Ma mère, à côté de moi sur le canapé, me regarde d’un air réprobateur, la sonnerie cachant le son de sa série. Je m’empresse de remonter dans ma chambre et décroche.

« Allô ?

-Oui, c’est Lucie. Sors je suis devant, on va au café. »

Et elle a raccroché. Je m’habille en vitesse, mes cheveux bouclés tombent en cascade dans mon dos et s’agite dans tous les sens lorsque je me précipite vers le salon, descendant les escaliers à toute vitesse.

« Doucement Diane ! crie ma mère.

-Lucie est devant, je peux sortir s’il te plaît ?

-Pas tard.

-Merci ! »

Mes bottines enfilées, je cours rejoindre mon amie dehors. Sur le trajet je lui raconte à quel point je suis soucieuse du fait qu’Eliott me mette à l’écart. Elle avait totalement accepté que je lui raconte mes histoires même si par moment je me sentais un peu gênée de les lui raconter. Mais c’est ma meilleure amie, elle le sait, alors elle me laisse lui raconter.

« Je ne sais pas. Arthur est totalement normal. Il est dans ma classe, je le vois souvent pour pas dire tous les jours. Je ne vois pas ce qui cloche. Si ça se trouve, c’est ton mec qui a un problème.

Je sais qu’elle fait référence à sa méprise même si elle la met sur le dos d’Eliott.

-Je ne sais pas trop, il faudrait que je pose directement la question, mais il finit toujours par trouver un subterfuge pour ne pas répondre.

-Tu n’as qu’à chercher directement avec Arthur non ? Si Eliott ne te répond pas, parle en directement à la personne concernée. »

Ce conseil était précieux et je comptais bien l’appliquer.

La cloche du café sonne lorsque l’on passe la porte. On a dû marcher un bon moment, mais le réconfort familier de l’endroit me réchauffe rapidement du vent intrépide qui soufflait dehors. Madame Rebecca nous accueille avec un sourire ravi. C’est vrai que nous n’étions pas aller là-haut depuis près d’un mois. Lucie commanda un café liégeois pour changer et moi un café latte comme à mon habitude. On s’assoit donc sur la table près de la vitre et on commence à discuter. Elle avait pleins d’histoires à me raconter sur des expériences de chimie qui terminent en explosions ou la dernière bagarre devant le lycée. Je me sentais tellement loin de ça. J’ai surtout l’impression que rien n’est normal. Lucie a l’air de garder une certaine distance entre elle et moi. La petite cloche discrète d’habitude attire mon attention. Un visage familier pénètre dans le café.

« Lucie excuse-moi une seconde.

Elle s’arrête de parler hébétée que je lui coupe la parole. Elle était de dos à la porte, normal qu’elle ne l’ait pas vu entrer.

-Arthur, je peux te parler ?

Bien que je l’aie remarqué, il semblerait que ce ne soit pas son cas. Son regard devient soudain froid et ses yeux verts semblent se dresser comme des piques qui pourraient me tuer.

-Dehors.

Il sortit aussitôt me rejoindre lorsqu’il eut commandé son café.

-Tu sors avec mon frère, blondinette.

-Oui, effectivement, répondis-je sur la défensive.

-C’était pas une question. Alors déjà tu me mets un lapin, et ce avec mon frère. Tu sais que personne ne m’a jamais fait ça.

-Je suis désolée Arthur. J’ai des raisons de ne pas être venue.

C’était pas très vrai ça. C’est Eliott qui avait ses raisons.

-Je m’en fous blondinette. Tu me fuis dès que j’approche et Eliott ressemble à un chien de garde dès que ton nom sort de ma bouche. Je te ferais payer de m’avoir humilié, toi comme Eliott. »

Sur ce, il va récupérer son café et repasse devant moi avant de partir dans sa voiture.

Je rejoins Lucie qui nous avait vu derrière la vitre mais d’après ce qu’elle dit, elle n’a rien entendu de l’intérieur. Je ne sais pas quoi en penser et si je dois le dire à Eliott. Tout ce que je sais, c’est que je dois comprendre qui est Arthur.

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