A l'abordage !

6 minutes de lecture

Émergeant de la brume, une côte se dessine : l'embouchure d'un fleuve leur fait découvrir ébahis la statue de la liberté, comme un symbole adressé par Freya. Osmund se dresse vers le ciel et déclare solennellement :

  • Les Dieux nous mettent à l'épreuve. Nous sommes aux pays des géants !


Fredegar toujours plus les pieds sur terre que l'âme tournée vers les Dieux, balaie d'un revers de main cette affirmation :

  • Arrêtons de mêler les dieux à tout.


Avant que la polémique ne s'installe à propos des Dieux, un navire de fer s'avance vers eux dans un bruit de tonnerre. Une voix métallique leur parvient :

  • Ici la police fluviale de New-York, nous allons monter à bord de votre … bateau, veuillez stopper et vous identifiez.


Les Vikings se regardent stupéfaits et Osmund de conclure :

  • Je vous l'avais dit, les Dieux nous mettent à l'épreuve !


Erik se lève vivement, risquant faire chavirer le Drakkar. Avec sa veste de loup, ses yeux bleus pâle et sa machoire carré, il fait forte impression :

  • Épreuve ou pas, pour une fois je donne raison à Osmund, les dieux ne sont pas étrangers à tout ça. Mais quoi qu'il en soit, jamais un Viking ne se laisse prendre son bateau !


Galvanisé par les paroles de leur compagnon, l'équipage se tourne vers leur chef pour en choeur hurler :

  • À l'abordage !


Asbjörn ne peut que se joindre à la voie générale et crier de concert :

  • À l'attaque ! Par Thor !

    Les grappins sont lancés sur le bateau de police qui est harponné et ramené contre le Drakkar. Les policiers stupéfaits n'ont pas le réflexe de dégainer leur arme face à la horde de barbares qui déferle sur leur pont.
  • Mais.., chef quels sont ces énergumènes ? — Ouais des p... de C... — Y'sont cinglés !


Tels sont les expressions qui fusent du côté américain entremélés aux hurlements des sauvages. Asbjörn fend le crâne d'un officier avec sa hache, tandis qu'Erik broie la cage thoracique d'un subalterne qui hurle de douleur. Le capitaine lance des demandes de secours dans la cibie, jusqu'à ce que la lance de Grimhild lui perfore l'estomac. Sa dernière parole se termine en borborygme. Osmund envoie gicler par dessus bord un gringalet qui tenait la barre. Alors qu'ils prennent possession du patrouilleur, Gunnolf découvre un pantin tremblant sous le cockpit :

  • Venez voir ! Il semble que les esclaves des géants prient aussi les Dieux.


Intrigué Osmund s'approche du policier tremblant :

  • Alors comme ça, umagi(1), tu pries aussi les Dieux ? Que leur demandes-tu ?
  • Je prie mon Dieu et je lui demande de rester en vie. répond d'une voie filante le pleutre.
  • LE Dieu... ? Tu veux dire que tu n'en as qu'un seul ? Ne connais-tu point tous les autres ? réplique Osmund ébahi.


Asbjörn met fin à cet interrogatoire en lançant le policier au milieu de l'eau.

  • Björn, Gunnolf et Thorketil faites un inventaire du bateau, Fredegar avec moi. — Hovding, il n'y a point de cargaison et pas plus de rames ! s'écrie Björn.


Pour en avoir le cœur net, Asbjörn descend en cale suivi de son second. Avant qu'ils ne soient revenus de leur stupéfaction, un grondement sourd ébranle l'embarcation. Craignant un retour de tempête, tous les Vikings se précipitent dans la cabine. Ne voyant pas le ciel s'obscurcir, ni le vent se lever, petit à petit ils ressortent de leur abri.

  • C'est un Jötun(2) ! Regardez, il a pris l'aspect d'un insecte. affirme Osmund
  • Loki est à l'oeuvre. clame Gunnolf.
  • Ce n'est pas un insecte qui va me faire peur, tonne Fredegar tout en se saisissant d'une corde.
  • Il a raison, renchérit Erik en bandant son arc en direction de l'hélicoptère.
  • Cette fois c'est sûr les dieux nous ont donné une mission sacrée en nous projetant dans le monde des géants, conclue Osmund.
  • Moi, je vous dis que Loki n'est pas loin derrière... sentance Gunnolf .
  • Laisse Loki chez les nains et préoccupe-toi plutôt du combat. Ce n'est pas parce que le grand loup bleu à manger tout ton troupeau qu'il faut attribuer chaque fait étrange à Loki, répond Fredegar.


Soudain la même voix métallique surgit de l'insecte comme elle était partie du bateau :

  • Ici la police de New-York, rendez-vous sur le champ ou nous vous abattrons ! Je répéte...
  • Si les dieux nous ont envoyé au pays des géants c'est sûrement pour éprouver notre bravoure, ils ne nous laisseront pas tomber, il faut les prier, propose Osmund en mettant genoux à terre. Il est aussitôt suivi par Gunnolf. Thorketil et Björn font de même ainsi que Dankard qui exprime en vers ce que pense la troupe :


Odin notre père à tous

Tu nous a doné un défi

Que nous relevons ici

Par ta gloire aide-nous
L'ennemi est inconnu

Et le risque est grand

Nous sommes fourbus

Combattre les géants

Pose des problèmes

Que toi seul peut résoudre

Frappe la terre de ta foudre

Victoire en nos cœurs amène

Odin notre père à tous

Tu nous a donné un défi

Que nous relevons ici

Par ta gloire aide-nous

Osmund essuie discrètement une larme, Björn félicite Dankard pour sa noble prière, Gunnolf prend un air extasié et Grimhild reste pensive son épée à la main ; les souvenirs affluent : elle revoit son mari partant à la guerre en compagnie de leur fils, tous deux fiers et dignes. Ils ne sont jamais revenus. Depuis ce jour Grimhild s'est consacrée au combat avec une telle hargne, que même les soldats les plus aguerris ont fini par la craindre. Elle croit aux dieux, mais en veut particulièrement à Odin de ne pas avoir fait revenir près d'elle ses deux seuls amours ; aussi depuis lors, chaque prière faite au père, la replonge dans sa souffrance, et lorsque Grimhild souffre ses ennemis ont du mouron à se faire. Seul Fredegar semble ne pas goûter au mysticisme général.
Un officier, jumelles rivées aux yeux, exprime plus son point de vue qu'un rapport :


— On dirait une secte moyenâgeuse. Il semble qu'ils aient pris possession du bateau de nos collègues, dont on n'a aucune nouvelle.

— D'où sortent ces illuminés ? enchérit un second.

— Faites les tirs de sommation, coupe le commandant.


Des éclats volent alentours des Vikings, faisant des trous dans l'eau, égratignant la vedette de police.


— Une fois de plus rendez-vous, couchés, mains sur la tête.


Erik à cette annonce part d'un éclat de rire relayé par toute la troupe.


— Les géants ne manquent pas d'humour, conclut Asbörn.


Aussitôt Erik lance une flèche enflammée en direction de l'hélicoptère, hélas celle-ci retombe piteusement dans l'océan sans toucher l'insecte. Thorketil projète avec force sa lance, et là succès, elle se fige dans le flan de la bête qui perd son sang jaunâtre. Frédegar fait un nœud coulant avec la corde lestée de pierre et l'expédie. Le nœud tournoie dans les airs et se fixe aux pattes du moustique le faisant tanguer dangereusement.


— Chef ! Les terroristes nous tirent dessus, s'affole un policier.

— Le réservoir est touché on perd de l'altitude, annonce le pilote.

— Les fous nous attirent à eux, on est foutus ! crie un autre.

— Sautez, sautez à l'eau tous ! C'est un ordre. clame le lieutenant.


Dans un désordre indescriptible les policiers sautent à l'eau pendant que le lieutenant demande de l'aide par radio.
Lorsque l'hélicoptère touche la navette fluviale, le lieutenant se trouve face à la face rougeoyante d'Erik, qui lui écrase la gorge avant de le jeter à l'eau.


— Devant cette victoire mes frères, rendons hommage aux Dieux qui nous ont permis de vaincre nos tous premiers ennemis en terre de géants, déclame Osmund toujours prêt à se tourner du côté des Dieux.

— Hélas ce ne seront pas les derniers. dit fredegar que les bondieuseries énerve.

Où étaient les Dieux lorsque sa douce Ludovika souffrait pour donner vie à un fils mort ? Où étaient les Dieux lorsque les loups ont ravagé les troupeaux ovins de son fils Karl? Où étaient les Dieux quand la deuxième femme de son chef s'est faite tuée par un ours aux crocs sanglants ? Non, Fredegar ne croyait plus aux Dieux, même s'il devait reconnaître que cette aventure était plutôt fantastique.
















1indigeant

2Personnifie les forces de la nature; Opposé aux hommes et dieux

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire ennkhala ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0