Chapitre 19: Ne ferme pas les yeux (3)

10 minutes de lecture

Peu de temps avant que mademoiselle Parker sorte de sa chambre d'hôpital et parte à la recherche de ses médicaments, Aurélie et son petit-ami étaient toujours assis dans le séjour. Ceux-ci poursuivaient le visionnage de leur film d'horreur, un moment qui s'annonçait tranquille pour le jeune homme. Mademoiselle Busby, qui sentait ses paupières devenir de plus en plus lourdes, se leva soudainement du canapé.

- Mets le film en pause, s'il te plaît. Je vais me faire une autre tasse de café, rétorqua-t-elle.

- Aurélie, c'est ta troisième tasse en moins de trente minutes et tu ne travailles même pas. Qu'est-ce qui ne va pas ? C'est à cause de ton cauchemar, n'est-ce pas ? dit-il en se levant à son tour du fauteuil.

Après son second tour à la cuisine, Jason s'était douté que sa petite-amie faisait de son mieux pour ne pas fermer l'oeil. Il en déduisit alors que cela devait avoir un rapport avec le mauvais rêve qu'elle avait fait la nuit précédente.

- Aurélie, parle-moi. Je t'ai déjà dit que j'étais là pour toi.

- Je le sais, Jason. Je sais que tu es là pour moi et je t'en suis sincèrement reconnaissante. Mais il y a des choses pour lesquelles tu ne peux absolument pas m'aider, à moins que tu aies un moyen efficace pour ne plus dormir.

- Écoute, il est vrai que je ne comprends pas totalement ce que tu traverses en ce moment...

- C'est justement ça, tu ne comprends pas ! Comment le pourrais-tu ? Tu n'es pas celui qui a été à la merci de cette chose ni celui dont le corps a été souillé, et encore moins celui qui ne peut pas dormir de peur d'en faire des cauchemars, dit-elle en l'interrompant et en haussant brusquement le ton.

Pendant quelques secondes, un lourd silence s'installa entre les jeunes gens. Mademoiselle Busby, qui venait de s'exprimer sous le coup de l'émotion, se rendit compte de ce qu'elle venait réellement de faire. Le faire culpabiliser de la sorte n'était absolument pas correct et elle le savait. Ce n'était pas sa faute s'il n'avait pas pu être présent quand ce malheureux incident se produisit dans le domicile de Chérone. S'il y avait une personne sur qui toute la culpabilité devait reposer, c'était bien évidemment sa meilleure amie. Elle était la seule responsable de toute cette situation et non Jason.

Quoi qu'il en soit, la jeune femme devait s'excuser et elle le savait. Cependant, au moment où elle s'apprêtait à le faire, elle fut brusquement interrompue par son petit-ami qui lui dit que ce n'était pas la peine.

- Je ne vais pas prétendre savoir ce que tu traverses, mais je sais que cela t'affecte énormément. Cependant, je ne pense pas que boire autant de café pour éviter de dormir soit la bonne solution. Tôt ou tard, tu finiras par t'écrouler de fatigue.

- Mais le plus tard sera donc le mieux, rétorqua la jeune femme dont l'expression faciale était désormais emplie de tristesse.

Cela énervait énormément Hampton de voir sa petite-amie faire ce genre de tête et être dans ce genre d'état, d'autant plus qu'il était dans l'incapacité de remédier à sa situation. Tout ce qu'il pouvait était de l'observer, de prendre soin d'elle du mieux qu'il pouvait, et d'attendre qu'elle s'en remette, si jamais elle parvenait à le faire.

Voyant qu'il n'avait pas de contre-argument, la jeune femme retourna dans la cuisine afin de se servir une nouvelle tasse de café. Pendant qu'elle versait le liquide noir dans son récipient, les lumières de la pièce se mirent soudainement à vaciller. Aurélie n'y prêta pas trop attention, se disant qu'il s'agissait sûrement d'un problème électrique. D'ailleurs, le phénomène s'arrêta comme il avait commencé, ce qui la conforta dans son raisonnement. Néanmoins, quelques secondes plus tard, cela recommença.

- Jason, les lampes de la cuisine ont un problème. Il faudrait peut-être vérifier le circuit électrique, rétorqua-t-elle.

La jeune femme n'obtint aucune réponse de la part de son petit-ami. Aurélie se dit alors que Jason ne l'avait pas entendu, ce qui était tout de même étrange du fait qu'il était censé se tenir debout à moins de trois mètres d'elle.

- Ja...son !

Alors qu'elle venait de se retourner afin de voir où se trouvait Hampton, mademoiselle Busby lâcha la tasse qu'elle tenait dans la main avant de se mettre à hurler de peur. Et pour cause, entre deux vacillements de lumière apparut un jeune homme qu'elle n'avait vu qu'une seule fois auparavant. Il s'agissait d'Andrew Tipney dont le corps était complètement livide et meurtri.

L'apparition soudaine du jeune homme dans la cuisine de Jason effrayait énormément Aurélie, d'autant plus que des tentacules sortaient de chacun de presque tous ses orifices et entailles hormis sa bouche bien évidemment. À l'intérieur de cette dernière se trouvait une paire d'yeux qui n'avaient rien d'humain et qui fixaient intensément la jeune femme. Face à cette vision d'horreur, mademoiselle Busby ne put alors s'empêcher de faire quelques pas en arrière avant de trébucher et se couper avec un des morceaux de tasse qui traînaient sur le sol.

- Aurélie Busby, s'exprima Andrew avec une voix d'outre-monde tout en tendant sa main vers la demoiselle.

Terrifiée, mademoiselle Busby le supplia à de nombreuses reprises de ne pas s'approcher. Elle n'avait pas envie de revivre ce qui s'était passé dans la chambre de Chérone. Cependant, elle savait que si ces tentacules venaient à la toucher, cette horrible expérience se reproduirait. Aurélie devait donc fuir, mais étant beaucoup trop effrayée, elle était littéralement paralysée devant cette chose.

Les tentacules qui sortaient du corps d'Andrew n'étaient plus qu'à quelques centimètres de la jeune femme. Cette dernière, qui avait les yeux fermés et suppliait toujours la créature de ne pas s'approcher, appréhendait déjà les horribles choses qui étaient sur le point de lui arriver. Cependant, ce malgré toute attente, son corps commença à être secoué d'avant en arrière. Elle entendit ensuite une voix familière, celle de Jason qui ne faisait que l'appeler. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, elle rendit compte qu'il s'agissait bel et bien de lui et non pas de la créature qui avait imité sa voix.

- Jason, ne le laisse pas s'approcher de moi s'il te plaît ! s'exclama-t-elle par la suite.

- Qui, Aurélie ? Qui je ne dois pas laisser approcher ?

- Le monstre à tentacules dans son corps !

Hampton ne comprenait pas ce qui se passait. Quelques secondes auparavant, Aurélie se servait tranquillement sa troisième tasse de café et l'instant d'après, il l'entendait hurler dans la cuisine. Ne la voyant plus, il s'était précipité dans la pièce uniquement pour la découvrir assise sur le sol avec une entaille dans la main. Il lui avait alors demandé ce qui se passait, mais cette dernière avait agi comme si elle ne le voyait absolument pas.

- Aurélie, il n'y a personne d'autre à part nous deux dans l'appartement. Regarde ! rétorqua le jeune homme.

Le jeune homme ne savait pas ce qu'elle avait bien pu voir, mais la terreur qu'il observait dans les yeux de celle qu'il aimait était bien réelle. Se pourrait-il qu'elle ait fait un cauchemar éveillé ? Pour Jason, c'était la chose la plus probable, sinon comment expliquer qu'Aurélie ait vu quelque chose et lui non ?

- Il...il était pourtant là. Jason, je t'en supplie, tu dois me croire. Je te jure qu'il était là il y a quelques instants, je ne suis pas folle.

- Je te crois, je te crois. Mais nous devons d'abord nous occuper de ta blessure sinon elle risque de s'infecter.

Ce fut à ce moment précis que mademoiselle Busby remarqua qu'elle avait une entaille au niveau de la main. Elle avait été tellement surprise et effrayée par la soudaine apparition d'Andrew Tipney qu'elle ne s'était pas rendu compte qu'elle s'était blessée avec un morceau de sa tasse à café. Jason aida donc Aurélie à se relever avant que les deux prennent la direction de la salle de bain où se trouvait le kit de soin.

-----*-----

De retour à l'hôpital, mademoiselle Parker se trouvait dans une situation quelque peu délicate. Elle avait fini par être surprise par les membres du personnel qui lui demandaient désormais de fournir des explications vis-à-vis de sa présence dans les couloirs du bâtiment. Et comme un problème en attirait toujours un autre, les parents de la jeune femme firent leur apparition.

- Chérone !? Qu'est-ce qui se passe ici ? rétorqua monsieur Parker.

- Chérie, je croyais que tu te reposais. Que fais-tu hors de ta chambre ? Est-ce que tout va bien ? poursuivit Agatha.

Madame Parker était visiblement inquiète pour sa fille. D'ailleurs, quelle mère ne le serait pas si elle venait à croiser son enfant dans les couloirs d'un hôpital alors qu'elle avait parlé avec elle dans la chambre dudit hôpital une dizaine de minutes auparavant ? La situation ne pouvait pas être plus compliquée pour Chérone, d'autant plus que ses deux parents étaient désormais impliqués.

- Maman, papa, je...

À cet instant, l'infirmière lui coupa la parole afin de s'adresser directement au docteur March. Elle lui dit notamment qu'elle avait surpris la demoiselle dans les couloirs et précisa même que cette dernière hurlait en prétextant être poursuivie par l'obscurité.

- Chérone, est-ce que ce qu'elle dit est vrai ? questionna monsieur Parker.

La jeune femme nia tout en bloc. Et pour cause, elle n'avait pas envie que les gens la prennent pour une folle, surtout pas ses parents. Ce n'était pas le moment pour elle de se faire interner. Toutefois, sa prestation ne convainquit pas son auditoire, surtout sa mère qui lui demanda de nouveau ce qu'elle faisait hors de sa chambre.

- Je rentrais à la maison. Cet endroit me rend mal à l'aise, répondit-elle.

Bien évidemment, c'était un mensonge, mais c'était toujours mieux que de leur dire qu'elle cherchait à se procurer illégalement des médicaments contre le sommeil. À ce moment, le docteur March intervint en s'exprimant sur le fait que cela n'allait pas être possible.

- Tant que nous ne savons pas pourquoi vous avez fait cette crise dans votre chambre, nous ne pouvons pas vous laisser quitter cet hôpital, continua-t-il.

- Pas besoin de procéder à des examens supplémentaires. Je me porte à merveille. Voyez par vous-même.

À cause de l'intervention de Chérone, non seulement le docteur March sut que cette dernière n'était pas totalement inconsciente quand son collègue et lui se trouvaient dans sa chambre, mais ses parents apprirent également pour les examens supplémentaires, ce qui les étonna grandement.

- Monsieur et madame Parker, navré de vous rencontrer dans de telles conditions. Je suis le docteur March et je suis actuellement en charge du cas de votre fille...

- Ce n'est absolument pas nécessaire, rétorqua nerveusement Chérone en coupant la parole au médecin.

La manière dont elle se comportait intrigua suffisamment Agatha et Harold qui demandèrent au docteur March ce qui se passait réellement.

- Nous n'en savons rien justement. Votre fille a été admise dans nos locaux pour ce qui s'apparentait à une crise d'épilepsie. Cependant, nous n'avons détecté aucune hyperactivité électrique dans son cerveau lors de nos premiers examens. J'aimerais donc garder mademoiselle ici, du moins le temps de déterminer ce dont elle souffre vraiment.

- Je vous ai déjà dit qu'il en était hors de question ! hurla la jeune femme.

Le comportement de Chérone surprit tout le monde, notamment ses parents qui n'avaient pas l'habitude de voir leur enfant agir de la sorte. À cause de cela, son père, Harold, se vit dans l'obligation d'intervenir en lui disant de baisser d'un ton et qu'il s'agissait d'un sujet important.

- Non, papa, je ne me tairai pas...

- Chérone ! rétorqua madame Parker devant la soudaine insolence de sa fille.

- Je suis une adulte et, en tant que tel, c'est à moi de décider de si je veux faire des examens supplémentaires ou pas. Et ce que je veux en ce moment, c'est rentrer chez moi, poursuivit-elle.

Tout le monde fut pris de cours par l'intervention de la jeune femme. Pour le docteur March, il n'y avait rien qu'il pouvait. Comme elle venait de le dire, elle était une adulte. De ce fait, sans consentement, il se retrouvait dans l'incapacité d'effectuer sa série d'examens. Il essaya alors de lui expliquer les risques d'une telle décision, mais celle-ci ne voulut rien entendre. De leur côté, Agatha et Harold ne comprenaient pas pourquoi leur unique enfant agissait de la sorte. Tout ce que ces gens essayaient de faire était de veiller à sa bonne santé. Se pourrait-il qu'elle se drogue ? Cette question leur traversa l'esprit à ce moment. C'était pour eux la seule explication à son étrange comportement.

- Eh bien ! Vu la tournure que les évènements prennent, je me vois dans l'obligation de respecter la volonté de mademoiselle Parker. Nous ne conduirons donc pas d'autres examens, dit le docteur March.

Mademoiselle Parker fut très soulagée d'entendre cela. Cependant, ce n'était qu'un problème mineur contrairement à ce à quoi elle devait réellement faire face. De plus, elle s'en voulait également d'avoir haussé le ton contre son père, sa mère, et le médecin qui faisait uniquement son travail, mais elle n'avait malheureusement pas le choix.

Maintenant que cette situation était réglée, la jeune femme abandonna le groupe sans dire un mot ni lancer le moindre regard à ses parents. Elle ne pouvait ni leur parler ni les regarder droit dans les yeux, pas après ce qui venait de se produire. Néanmoins, au plus profond d'elle, elle s'excusait pour son comportement. Elle avait juste quelque chose de plus important à faire. Sa survie en dépendait.

A suivre !!!

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire ElijahEva ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0