Chapitre 2

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L’Esper crut alors que sa peau s’enflammait, ignorant de son mieux la souffrance, Tobias fila droit vers le récif dans un nouveau bang supersonique. En un battement de cils, le jeune homme fut sur le récif, tandis que les monstruosités marines commençaient à jaillir de la galerie. Dès l’instant où Tobias cessa de bouger, les premiers monstres lui sautèrent à la gorge, bien décidés à le déchiqueter.

L’Esper agit sans vraiment penser et tissa un sort, un ouragan de lames psychiques se déchaîna sur le récif. Les monstres déjà sortis de la caverne furent mis en pièces comme des feuilles de papier dans une déchiqueteuse. Tout chose tentant d’entrer dans le maëlstrom subissait le même sort, cependant cela ne jugulerait pas l’afflux d'ennemi éternellement.

Tobias Crow était vraiment au bout cette fois, soit il s’en sortait soit il échouait, il n’y avait pas de compromis. L’Esper laissa son corps et son esprit agir d’eux-mêmes, il canalisa une quantité gargantuesque de puissance tellurique et l’énergie dévastatrice transita dans son corps. Ses tatouages s’enflammèrent il crut que chaque parcelle de sa peau était marquée au fer rouge. De loin on aurait pu le prendre pour un braséro de flammes bleu azur. Le jeune homme ne sut jamais combien de temps exactement rassembler l’énergie tellurique lui prit, mais lorsqu'il atteint sa limite il crut que son corps allait exploser. La tornade mystique perdait en force et les monstres recommençaient à l’encercler.

Alors sans attendre une seconde de plus, Tobias frappa le récif de toute sa puissance, comme un marteau frappe un clou l’énergie de l’Esper s’abattit sur la masse rocheuse. Les monstres présents à la surface furent littéralement vaporisés sur place, ne laissant que des cendres de leur passage.

Le rocher marin se fissura de toutes parts, Tobias sentit un éboulement dans la galerie sous-marine. La première partie de son plan était accomplie, le plus dur restait à faire. Rassemblant la plus petite parcelle de force encore présente dans son corps au bout du rouleau, l’Esper invoqua alors une myriade de chaînes d’énergie pure pourvues de crochets et de pieux. Les liens mystiques s’enroulèrent autour de la roche comme le python enserrant sa proie, avant de se fondre dans le récif comme des fantômes. Immédiatement après, l’ama rocheux se couvrit de glyphes, un sceau venait de se former.

À l’œil nu le récif restait inchangé, mais à l’échelle moléculaire le changement était plus que visible. Chaque roche, chaque parcelle minérale, et même les cadavres des horreurs abyssales fusionnaient, obstruant à jamais le tunnel sous-marin. L’énergie afflua pendant plusieurs secondes avant que le sceau ne s’efface, et alors seulement les tatouages de Tobias cessèrent de luire. Épuisé, vidé de toute énergie, le jeune homme tomba à genoux sur la roche trempée, et malgré ses efforts pour rester éveillé, il perdit connaissance.

***

À la suite de leur rencontre avec l’étrange individu qui se faisait appeler « l’Esper », les deux journalistes étaient plus que décidés à le suivre et à faire la lumière sur les événements qui se déroulaient dans ce sinistre village. Suivant à nouveau la trajectoire de l’individu masqué, Sarah et François s’enfoncèrent dans les ruelles de la vieille ville. Tentant de faire le moins de bruit possible, ils alternaient les sprints et les passages au ras des murs. Sarah ne cessait de commenter ce que son collègue filmait durant leur progression. C’est alors qu’ils se rapprochaient de la plage, qu’un véritable coup de tonnerre retentit. Le sol trembla, Sarah crut devenir sourde, et François chancela. Les deux comparses se regardèrent, et sans rien ajouter ils foncèrent vers la plage au pas de course.

Aussitôt arrivé sur le sable ils furent alors témoins d’une scène plus surréaliste encore que tout ce qu’ils avaient vu jusqu’à présent. Une véritable comète longeait la côte balayant tout ce qui se trouvait sur sa route.

Les deux reporters virent alors ce qui se tramait sur la digue. Redressant son micro, Sarah prit alors la parole :

« Mesdames et messieurs, ici Sarah Rochelle qui vous parle en direct de la crique de Val-Insmmoth. Comme vous pouvez le voir, ce qui se déroule sous nos yeux est absolument incroyable. L’individu nommé « l’Esper » semble se diriger droit sur la digue où un groupe d’individus aux allures de secte semble s’être alliés aux monstres ayant attaqué la ville. Pour moi il ne fait plus aucun doute que ces gens ont joué un rôle dans l’arrivée de ces créatures et « l’Esper » semble bien décidé à les stopper. »

La jeune femme continua ainsi à commenter la scène, jusqu’au moment où le récif s’illumina comme un sapin de noël. La silhouette de l’homme masqué sembla s’embraser comme une allumette, une violente secousse partit du récif ébranlant la plage et le sol se fissura de toutes parts. Puis tout s’arrêta aussi brutalement que cela avait commencé.

***

Tobias reprit connaissance et manqua de s’étouffer en reprenant sa respiration. Toussant à plusieurs reprises, le jeune homme mit plusieurs minutes à remettre ses pensées en ordre. Il se rappela alors ce qui venait de se produire, et alors seulement il prit conscience de son environnement. Sur la plage se trouvaient les deux journalistes qu’il avait rencontré un peu plus tôt dans la Val-Insmmoth, une petite foule de civils et de policiers arrivait à leur suite, et dans le ciel juste au-dessus de l’eau un hélicoptère de la police braquait un projecteur sur lui et le récif.

L’Esper devait faire vite, il devait s’extirper de ce bourbier sans perdre une seconde. S’il restait une minute de plus, les forces de l’ordre ne le laisseraient pas partir. Puisant dans ses réserves tant qu’il le pouvait, Tobias invoqua la marche aérienne et alors que ses muscles semblaient se déchirer sous l’effort, il se mit à courir au-dessus de l’eau salée. Il arriva sur la plage et alors qu’il s’approchait des bâtiments, un coup de feu retentit. Tobias eut à peine le temps d’élever une barrière magique autour de lui, mais son état de fatigue était tel qu’il ne put que bloquer le projectile au moment où il touchait son crâne. Le jeune homme perdit l’équilibre sous le coup de l’impact, il entendit un craquement avant de s’écraser lourdement sur le sable. Tobias se redressa, à présent à genoux sur la plage, il constata avec horreur que son masque de cuir avait été déchiré et arraché par la balle. Sans qu’il puisse réagir, plusieurs civils le prirent en photo tandis que le caméraman le filmait.

Puisant de toutes ses forces dans son pouvoir, le jeune homme paniqué s’enveloppa d’un voile d’illusion sous les yeux ébahis des spectateurs, et alors que les cris de peur et de surprise fusaient en tous sens, Tobias en profita pour quitter la plage en chancelant.

Fuir, fuir, c’était la seule pensée qui résonnait dans l’esprit du jeune Crow, tandis qu’il se faufilait dans les rues désertes de la ville dévastée. Arrivant à peine à maintenir son invisibilité, il fut incapable d’utiliser la marche aérienne et il dut regagner le sentier de terre qu’il avait descendu il y a quelques heures à peine, et pourtant Tobias eut l’impression que cela c’était produit il y a des mois.

L’Esper se hissa en traînant des pieds jusqu’au sommet de la pente, puis il s’enfonça dans les bois et ce ne fut qu’une fois bien éloigné de la périphérie de Val-Insmmoth qu’il sortit son portable. Il s’en servait peu, estimant qu’il s’agissait d’un moyen de communication à la sécurité peu fiable. Mais dans l’immédiat il s’agissait d’une situation désespérée et il avait besoin d’aide. Il n’y avait au total que trois numéros enregistrés sur ce téléphone : celui de sa patronne, de sa mère, et celui de Marie Roche. Mettant en actions ses phalanges aussi vite qu’il le pouvait, Tobias envoya deux messages à sa mère et à Marie.

« Maman,

La menace est écartée, mais les choses ont dérapé, considère que mon secret est découvert. Je crains fort de devoir lancer le protocole ERMITE. Je rentre à Val-Pin, lance une réunion de crise. »

« Marie,

À L’AIDE !!! La menace est stoppée mais la situation est hors de contrôle. Protocole ERMITE. »

Les deux missives envoyées, Tobias ouvrit son smartphone et en retira la carte SIM ainsi que la batterie, s’assurant ainsi une invisibilité totale. Puis, il se remit en marche et trouvant une large souche d’arbre, s’assit en tailleur sur le bois mort. Alors seulement, le jeune homme relâcha ses muscles. La fatigue rendit son corps lourd comme de la pierre et il sombra alors dans un état de semi-sommeille, son esprit restant à l'affût des présences autour de lui.

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