Chapitre 5, partie 2 :

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Will Marx :

Les minutes s'écoulent, je ne bouge pas, ne parle plus. Je reste silencieusement dans mon coin, attendant que le temps passe et que mon corps se calme.

Seigneur, je vais l'étrangler.

Mon palpitant est enragé, ma peau est brûlante. Je me sens nauséeux, un peu étourdi également.

J'ose me tourner dans sa direction après ce qui me paraît avoir duré une éternité. Le ciel commence à légèrement s'éclaircir, il doit être très tôt. Je regarde mon téléphone, il est cinq heures du matin. Angelo a la tête sur son sac et le corps recroquevillé. Les genoux pliés contre sa poitrine, il est allongé en position fœtale. Je ne sais pas s'il dort mais je ne tente plus de parler. Je crois que j'ai bien compris le message. La sympathie, avec lui, je peux oublier.

Quand le soleil pointe enfin, que j'arrive à distinguer ce qu'il se passe à plus de vingt centimètres, je regroupe mes affaires et jette un énième regard à DeNil qui ronfle légèrement. J'ai la sensation de passer mon temps à l'observer, cette pensée me désespère.

Je suis épuisé, je n'ai pas fermé l'œil, davantage perturbé après son petit manège idiot. Certain qu'il dort, je me permets de retirer mon manteau pour me défaire de mon tee-shirt humide de transpiration et enfiler un pull propre. Il fait super froid, pourtant j'ai sué pendant des heures. L'air glacé me fait frissonner quand il rencontre la peau nue de mon torse. Je remets mon blouson, passe une main dans mes cheveux pour les replacer correctement et soupire en observant les alentours. On doit reprendre la route.

Bon sang, je suis si fatigué...

Je scrute Angelo, détaille son visage dans la clarté du jour. Ses lèvres gonflées sont entrouvertes et laissent échapper ses ronflements. Ses traits sont tirés, ses mèches blondes barrent son front et ses sourcils sont froncés. Même quand il dort il semble faire la tronche.

J'hésite à l'abandonner à son triste sort, partir de mon côté pour essayer de me sortir de cet endroit. Mais finalement, la raison me rattrape, mon pied tape doucement sur sa cuisse pour le réveiller. Si je m'en vais seul, le pourcentage de finir fou est probablement plus élevé. Quoique... après ce qu'il a fait, il risque sûrement de me rendre barge en très peu de temps si l'envie lui prend de recommencer.

Il est désormais trop tard pour moi d'opter pour la meilleure solution puisqu'il grogne en ouvrant les paupières.

— Tu veux quoi ? crache-t-il en cherchant mon regard.

Je détourne la tête. Maintenant, qu'il fait clair ma gêne est encore plus présente. Je fouille dans mon sac, en sors ma trousse de toilette pour récupérer ma brosse à dents.

— Il fait jour, faut qu'on se bouge, dis-je la bouche pleine de dentifrice.

— T'as perdu ta bonne humeur à ce que je vois. T'es pas du matin ? s'amuse-t-il en se brossant à son tour les dents.

— Ta gueule, DeNil.

— Oula, dur le réveil.

— Pour se réveiller il faudrait déjà avoir dormi, râlé-je.

— Ah merde, je pensais que tu aurais rêvé de moi.

Mes joues s'enflamment et je lui tourne totalement le dos pour ne pas qu'il le remarque. Il m'énerve.

— Je pensais que tu ne m'aimais pas. T'es contradictoire.

— Je ne t'aime pas, en effet. Par contre t'es assez drôle quand t'es embarrassé.

Désormais hors de moi, je lui fais face précipitamment. Ma main s'abat contre son épaule et le plaque contre un tronc d'arbre. Il lève la tête, me regarde de ses grands yeux marrons, un sourire amusé collé sur ses lèvres esquintées.

— Tu vas trop loin ! Ne t'avises plus de me toucher, Angelo, sinon je te casse la bouche, grincé-je les dents serrées.

— Énervé le William, c'est prometteur.

Je le maintient plus fermement, son visage grimace quelques secondes quand son dos s'enfonce contre le bois, mais son air provocateur reprend vite le dessus.

— Je ne le ferai plus, tu es tout ce que je méprise. Mais ça a eu le mérite de fonctionner, t'as plus ouvert ta gueule après.

Je le lâche et recule d'un pas alors qu'il a toujours le visage levé vers le mien.

— T'inquiète pas, tu ne m'entendras plus mais maintenant bouge-toi le cul sinon je ne t'attends pas.

— Pas de soucis, Willy, on peut y aller.

Il récupère ses affaires, met son sac sur l'épaule et nous reprenons la route. Nous avançons silencieusement, sans se lancer un seul coup d'œil et tout en mettant une distance de deux mètres entre nous. Il ne râle plus, mais par moments il ralentit, me contraignant à l'imiter pour ne pas le semer. Il n'est vraiment pas très endurant.

Bien que je n'apprécie pas qu'il soit véhément lorsqu'il s'adresse à moi, ce silence est pesant. Nous zigzaguons entre les branches et les arbres, évitons les insectes et nous retournons à chaque bruit suspect. Je ne sais pas quelles bêtes se promènent dans ces bois mais pour le moment hormis les entendre, nous n'en avons croisé aucune. J'ai l'impression qu'on tourne en rond, ça m'agace. Mon téléphone n'affiche toujours aucune barre de réseau. C'est décourageant. Ça fait déjà quatre bonnes heures que nous évoluons dans la forêt. Le soleil brille, c'est apaisant en soit, mais rien ne change, le décors reste exactement le même.

— Putain, Will ! s'exclame soudainement Angelo qui marche devant moi.

Il s'arrête précipitamment, ce qui me fait heurter son dos. Je le stabilise pour ne pas qu'il tombe et m'éloigne rapidement.

— C'est quoi ton problème, encore ? grogné-je. Qu'est-ce qu'il y a ?

Il se retourne, lève les yeux pour rencontrer les miens. Un sourire illumine son visage et je dois avouer que c'est étrange de remarquer qu'il ne tire pas la tronche.

— Le van ! Il est là-bas ! dit-il avec enthousiasme. On a retrouvé les autres.

Seigneur.

Je suis du regard le doigt qu'il pointe dans la direction du véhicule et soupire de soulagement. Nous ne somme pas sortie d'affaire mais au moins on ne sera plus obligé de se supporter l'un-l'autre. D'un pas décidé, je reprends la marche, talonné de très près par Angelo mais mon assurance se dissipe rapidement à mesure que j'approche. Je ralentis, cette fois c'est DeNil qui me fonce dessus.

— Pourquoi tu t'arrêtes ?

— Je crois qu'on a un problème...

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