Chapitre 2 :

13 minutes de lecture

Angelo DeNil :

Je fais le tour de la petite maison pour être sûr de ne rien avoir oublié, je n'aime pas m'absenter.

J'ai préparé mes médicaments pour six jours, je serai de retour dans quatre mais préfère voir large. Les repas sont prêts et emballés dans le congélateur, pour ma sœur et maman, en supposant qu'elle quitte le canapé. Idem, six jours. Les affaires d'école de Loli sont prêtes et en évidence sur son bureau pour qu'elle pense à les mettre dans son sac. Bon, visiblement tout est nickel. Je jette un coup d'œil à ma piaule, le lit n'est pas fait mais ça attendra mon retour. Mes yeux voyagent un peu partout et se posent finalement sur mon sac, ouvert et vide, par terre derrière une pile de livres.

Merde, merde...

Ce n'est pas nickel du tout finalement. J'ai pensé à tout préparer pour la maison, mais j'ai zappé mon foutu bagage. J'attrape deux-trois fringues qui traînent dans ma chambre et les fourre dans mon sac de cours sans prendre la peine de vérifier s'ils sont propres. Je n'ai pas eu le temps de faire une machine cette semaine, il ne reste plus grand-chose de portable dans mon placard. Tant pis, il y aura bien une blanchisserie dans l'hôtel dans lequel on va loger.

Non ?

J'en sais rien.

Ça me gonfle déjà.

— Tu sembles très stressé, Angelo. Tu es sûr que ça va ? demande Loli au pas de la porte de ma chambre.

Je sursaute, je ne l'avais ni vue ni entendue. Cette gamine est un ninja. Je lui fais face, elle m'observe de ses grands yeux bleus qu'elle a hérités de notre mère. Les miens sont bruns, comme notre père.

— Je m'inquiète pour toi, tu es certaine que tu ne veux pas que je reste à la maison ? Je peux toujours annuler, dire que je suis malade, genre une gastro ou je sais pas.

Elle soupire puis secoue rapidement la tête.

— Non, tu y vas. Tout va bien se passer, ne te fais pas de soucis.

— Mais je peux...

— Tu y vas, me coupe-t-elle. Tu ne vas pas toujours annuler tes plans pour t'occuper de nous.

— Ce n'est pas ça. J'ai peur que tu n'arrives pas à gérer maman.

— Tu pars quatre jours, pas trente. Je sais comment je dois faire avec elle, c'est pas nouveau.

— Je sais. Je sais, mais je devrais quand même rester, persisté-je.

Elle lève les yeux au ciel et fait demi-tour. Je ne sais pas où elle va, mais la porte d'entrée claque quelques secondes après son départ. J'attrape le reste de mes affaires que je fourre dans mon sac. Je fixe l'horloge et mon cœur s'accélère. Il ne me reste plus que deux heures pour finir de tout préparer avant de partir. Je n'ai pas de permis, pas de voiture et aucun voisin pouvant me conduire au lycée alors comme chaque jour je vais me contenter des transports en commun. Prendre un bus, pour ensuite passer dix heures dans un second. J'adore.

Je rejoins le salon après une douche rapide et froide de surcroît. Nous n'avons pas les moyens de payer les réparations du chauffe-eau. Ça fait quatre mois que l'eau est glacée dans cette maison délabrée.

Maman est affalée sur le canapé, les yeux à peine ouverts et un filet de bave coule au coin de ses lèvres. Je déteste ça. J'examine ce qui se trouve sur la table basse, dans l'espoir de déceler ce qui l'a mis dans cet état. Je ne vois que des paquets de cigarettes vides et un flacon de médocs. Je ne suis pas convaincu que ce soit suffisamment efficace pour la rendre amorphe, ce ne sont que de simples antidouleurs. Elle a sûrement déjà tout planqué dans les chiottes avant que le trip ne lui monte à la tête, comme si j'étais con au point de ne pas savoir qu'elle se pique dès qu'elle ouvre les yeux. Je ne suis vraiment pas confiant de laisser Lolita seule ici pendant mon absence.

La porte s'ouvre et le visage amical de Simona me sourit. Derrière elle, Loli m'observe avec une lueur diabolique au fond des yeux.

— Alors comme ça tu hésites à te rendre à cette sortie ? demande la voisine d'une quarantaine d'années.

— Ce n'est pas une sortie, c'est un voyage. Je ne serai pas là avant plusieurs jours et regarde l'état de maman, soupiré-je en tendant le bras dans sa direction.

— Tu sais bien que je passe tous les jours, et que si ça ne va pas Loli peut venir me chercher à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit. Je serai là si Bérénice devient ingérable.

J'acquiesce. C'est vrai qu'on peut toujours compter sur elle. C'est un peu notre mère de substitution.

— Je ne sais pas...

La femme aux cheveux coupés au carré s'approche de moi et attrape ma main. Je la suis sans résistance et me laisse tomber sur le lit quand elle me bouscule pour que j'y prenne place. Le matelas n'est plus très confortable, les ressorts me rentrent dans les fesses quand je suis assis. Simona récupère la chaise sous mon bureau, je l'ai réquisitionnée de la cuisine pour réussir à faire mes devoirs ailleurs que sur la petite table bancale. Elle s'installe face à moi, la poitrine écrasée contre le dossier en bois, une jambe de chaque coté de l'assise où la paille se fait la malle.

— Écoute, mon bichon, je sais que tu fais tout pour protéger ta petite sœur et tenter de prendre soin de ta mère. Mais par moments, il faut que tu décroches un peu. Tu dois aussi penser à toi.

— Je pense souvent à moi, fais-je remarquer en hochant la tête.

— Ah ? C'est quand la dernière fois que tu es allé au ciné ? Ou au fast-food avec tes amis ?

Je ne l'ai jamais fait ! Elle le sait.

— Nous n'avons pas beaucoup d'argent, Simona, soupiré-je. Avant ça, je dois gérer le budget nourriture, les factures, mes médicaments et les cours pour Loli et moi. On n'a même pas d'eau chaude ni de chauffage.

— J'en ai bien conscience, et c'est pour ça que tu dois aller à cette rencontre sportive. Quand tu auras fini tes études tu pourras te trouver un bon job dans un journal et ne plus être contraint de compter chaque pièce pour acheter du pain.

— Tu vas trop loin dans l'avenir. Je suis en deuxième année de lycée, après ça il y a l'université et je ne sais même pas si je serai capable d'en trouver une potable. En plus le journalisme ne m'intéresse pas et je suis bon à enfermer, peut-être même que je serai mort dans un coin d'ici-là.

— Pourquoi as-tu pris des cours dans un établissement qui se consacre aux sports et aux reportages dans ce cas ? demande-t-elle incrédule. Et cesse de dire de telles choses.

— Apparemment c'est un truc de famille.

Elle hoche la tête et se penche légèrement.

— Tu vas aller à cette sortie scolaire. Je vais veiller sur ta sœur et Bérénice. Loli est maline, elle n'a plus six ans, Angelo. Elle saura se débrouiller.

Avoué vaincu, je hoche la tête. Je ne vais pas débattre avec elle, ça ne servirait à rien puisqu'elle finit toujours par avoir le dernier mot.

— Allez, je vais te préparer un petit en-cas avant que n'arrive l'heure de partir.

J'accepte sans résistance. Mon ventre gargouille, affamé. J'ai pensé à préparer ce qu'il fallait pour ma petite sœur mais je ne me suis pas nourri. D'ailleurs je me souviens pas du dernier repas que j'ai avalé. Je crois avoir grignoté des chips hier midi.

Loli est folle de joie à l'idée que je parte. Si je ne la connaissais pas si bien je pourrais penser qu'elle n'attend que ça pour profiter de la maison et faire la fête. Au fond je sais bien que non, déjà parce qu'elle n'a que quatorze ans mais aussi parce que sûrement personne ne voudrait entrer ici. C'est délabré, trop petit et en plus notre mère est une toxicomane dépravée.

— Tu as fait le bon choix, je suis sûre que tu vas passer un bon séjour, s'enthousiasme Loli.

— Ouais super, j'adore être entouré de sportifs à la cervelle ramollie par les stéroïdes.

— C'est à ça que consistera ton travail, faut que tu t'y habitues.

— Petite peste, râlé-je en lui tirant la langue.

— Très mature.

— À la hauteur de ta puérilité.

— Bon, vous avez terminé ? s'amuse Simona. À table !

Sans me faire prier je me précipite vers la table bancale de la cuisine, les papilles en éveil. Ça a l'air appétissant même si je n'arrive pas à définir de quoi il s'agit.

— C'est quoi ? demande Loli en m'arrachant les mots de la bouche.

Notre voisine s'installe près de moi pour manger. C'est la moindre des choses, elle s'occupe de nous plus que notre mère.

— Pain perdu, tomate et pesto. J'ai fait avec les restes du frigo.

— C'est coloré, s'amuse ma petite sœur.

C'est avec un appétit non feint que j'engloutis les tartines garnies qui composent mon assiette. J'avais vraiment faim et si Simona n'avait pas revêtu sa toque de cheffe, j'aurais filé l'estomac vide. Comme très souvent, finalement.

— Bon, je dois y aller les monstres, j'ai le mien a récupérer au solfège et ma fille à la danse, déclare notre voisine en déposant un bisou sur mon front et un sur la joue de Loli.

— Les monstres, s'exclame ma sœur une fois la porte d'entrée refermée derrière Simona. Elle pense que nous avons encore cinq ans.

— Arrête ça, pas de sarcasme avec elle. On serait dans la merde si elle n'était pas là.

— Ça va, je rigolais. Détends-toi.

Je soupire en attrapant les couverts sales pour les déposer dans l'évier.

— C'est vrai, pardon. Je suis un peu à fleur de peau.

— Je sais, dit Loli en commençant la vaisselle. Mais arrête de trop te prendre la tête, si tu angoisses tu vas te déclencher une crise. Tout se passera bien.

Je grogne pour toute réponse et m'approche du canapé où repose Bérénice. Je ne fais pas attention aux bruits que je fais et laisse claquer la semelle de mes Vans usées contre le parquet qui grince. De toute façon elle n'entend rien, perdue dans un autre univers, rempli de seringues et de poudre blanche. Je laisse mes fesses reposer contre la table basse et me penche vers elle pour vérifier qu'elle respire toujours. Si un jour son cœur s'arrête, je promets de la tuer une seconde fois avant qu'on ne l'enterre. Elle n'a pas le droit de nous infliger un truc pareil. Je l'aime trop pour qu'elle m'abandonne. Ça me brise le cœur parce que nous ne l'avons pas toujours connue comme ça. À une époque, qui me  paraît dater d'il y a une éternité, c'était une femme magnifique qui respirait la joie de vivre. Là, elle respire tout court et c'est déjà une bonne chose.

Je passe mes doigts dans ses cheveux emmêlés et je les retire rapidement par peur de lui faire mal en tirant ses mèches. Elle ouvre la moitié d'un œil et m'observe, le regard morne. C'est le maximum d'attention qu'elle peut me donner quand elle est comme ça, alors même si elle ne comprendra sûrement pas ce que j'ai à dire, je le dis quand même :

— Je vais m'absenter quelques jours, maman, pour le lycée. Je reviens vite mais en attendant Loli et Simona seront là pour veiller sur toi.

Je ne sais pas si je l'imagine, mais sa tête oscille presque imperceptiblement. Je prends ça pour un " Ça marche Angelo, amuse-toi bien. " mais évidemment ce n'est pas le cas. Elle n'a rien assimilé du tout.

Je prends sa main entre mes doigts, sa peau est froide. J'y dépose un baiser et recouvre son corps d'un plaid poisseux qui traîne au bout du canapé. La première chose que je ferai en rentrant c'est faire tourner la machine à laver jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul linge sale dans cette maison.

Je jette un coup d'œil à l'horloge, il est l'heure pour moi d'y aller. Si je loupe mon bus, le prochain ne passera qu'une heure plus tard. Autant dire que si c'est le cas, je foire mon voyage. L'idée m'effleure l'esprit un court instant puis finalement j'attrape mon sac à dos et le fait basculer sur mon épaule après avoir vérifier que mon carnet à la couverture en cuir s'y trouve. Si je l'oublie, je ne survivrai pas à ces quelques jours loin de la maison.

Quand j'arrive près de Loli qui sèche la vaisselle, j'agrippe ses épaules afin de la faire pivoter dans ma direction. Elle m'observe de ses yeux bleus et attend que j'ouvre la bouche.

— Je te fais confiance, Lolita. Si maman commence à s'agiter, tu cours chercher Simona. Tu restes chez elle jusqu'à ce qu'elle se calme et que tu ne risques plus rien.

Elle hoche la tête, je continue :

— Les repas sont au congélo, tes cours sur ton bureau. Quand maman sera un peu plus clean, tu lui rappelleras où je suis parti parce que je suis sûr qu'elle n'a absolument rien pigé.

— Oui, oui et encore oui. Arrête ! Je vais m'en sortir, dit-elle avec aplomb.

Je n'en doute pas une seule seconde en réalité, je sais qu'elle en est capable. Le souci c'est que notre mère est tellement instable qu'on ne sait jamais vraiment à quoi s'attendre, un peu comme avec moi finalement. La seule différence c'est que je n'ai pas besoin de drogues pour devenir dingue, je le suis de naissance.

— J'appelle sur le fixe dès que j'arrive à l'hôtel, lui assuré-je.

— Parfait. Allez, maintenant pars.

— Toujours aussi aimable.

— Dégage d'ici, Angelo DeNil et ne reviens pas avant quatre jours. C'est assez aimable pour toi ?

— Carrément, Lolita DeNil, je préfère ça, plaisanté-je.

— Plus sérieusement, dépêche-toi tu vas louper ton bus, dit-elle d'une voix douce. Et essaie de t'amuser.

— Compte sur moi, déclaré-je même en pensant le contraire.

Je la prends dans mes bras et l'enlace plus longtemps que nécessaire avant de quitter la maison.

Enfin sur le parking du lycée, je reste en retrait le temps de reprendre mon souffle. Ce foutu bus était déjà stationné à son arrêt alors que j'étais seulement au bout de la rue. J'ai dû courir et faire de grands signes pour qu'il ne parte pas sans moi. J'ai eu le droit à un regard mauvais et une petite réflexion du chauffeur disant que l'horaire c'est l'horaire et que la prochaine fois il ne m'attend pas. Je n'ai pas pu respirer convenablement parce que ce truc était bondé de monde. Je déteste les transports en commun.

Affalé contre les barrières du lycée, j'observe tous ces cons de footballeurs se comporter comme des gorilles. Sérieusement, Noël ne doit pas beaucoup m'apprécier pour me foutre avec ces nazes.

De loin, je guette ces sportifs entourés de leurs nanas et leurs supporters à deux balles. Comme s'ils étaient tous de grandes stars du sport alors que nous sommes encore que de simples lycéens.

— Salut, Lolo, s'exclame la voix guillerette de mon amie. Je pensais être seule sur ce voyage.

— Ma Rose, salut. Non je suis là aussi, réponds-je sans la regarder quand elle s'installe près de moi.

Roselyne est une petite brunette aux cheveux courts, avec une épaisse mèche qui lui barre le front. Elle est jolie, a de fins traits et des lèvres bien dessinées. Elle pourrait trouver quelqu'un aisément mais les crétins de notre bahut ne s'intéressent qu'aux sportives, nous, les journalistes on ne vaut rien à leurs yeux.

— Ça me fait un peu peur, c'est la première fois qu'on va commenter un match ailleurs qu'au lycée. Tu ne stresses pas toi ?

Je hausse les épaules, à vrai dire ce qui m'angoisse le plus ce n'est pas de parler devant une foule inconnue, c'est de laisser Loli à la maison. Si j'avais pu, je l'aurais prise avec moi.

— Non, ça va. C'est pas fort compliqué en soit.

— C'est normal un DeNil n'a pas peur de grand-chose.

Je grogne, agacé. Je n'aime pas que l'on perçoit mon nom comme étant une fierté. Je ne suis pas comme eux, comme mes grands-parents ou mon oncle. En réalité, je ne sais même pas qui ils sont. Je ne sais pas qui je suis.

— Oh, les intellos, hurle Judas Bloom, bougez-vous, on part dans cinq minutes.

Je le regarde de travers, je n'aime pas ce type. Je n'aime personne, mais Bloom encore moins que les autres. C'est le gardien des Lions, l'équipe de foot du lycée. Un gros crétin que j'ai envie de cogner dès que je l'aperçois. Il se croit malin mais n'est qu'un idiot fini à la pisse. Tous ces compères se marrent, pourtant nous ne sommes pas forcément intellos, c'est simplement qu'ils sont très cons. Il ne faut pas être futé pour courir après un ballon pendant quatre-vingt-dix minutes.

Roselyne et moi, avançons doucement jusqu'aux bus. Il y en a deux, un autocar de voyage qui comporte pas mal de places et un plus petit, style navette.

— Rosalie, tu grimpes là dedans, indique le coach Murray en montrant le plus grand véhicule. DeNil, dans celui-là.

— En fait, c'est Roselyne, monsieur, rectifie ma meilleure amie.

— C'est pareil, on va pas chipoter.

J'observe la brune qui grimace et me fait sourire. Elle me tape dans la main, sachant pertinemment que je déteste les accolades et tout ce qui concerne le contact humain. Je hais la terre entière, crache au visage du premier qui s'approche trop près de moi. Si je suis doux avec Loli, je suis aussi aimable d'une porte de prison devant les autres. Il est même probable que cette fameuse porte soit plus délicate que je ne le serai jamais. Je ne souhaite pas me mélanger, j'ai bien trop de merde à supporter. Mon unique amie est Roselyne, les autres, je les emmerde prodigieusement.

— Bon, à dans dix heures, m'indique-t-elle en souriant.

Je hoche la tête et me dirige vers le second car qui ressemble plus à un van qu'autre chose. Avant de monter, j'examine les visages, regarde avec qui je vais partager mon trajet. Je retiens une injure en voyant le coach prendre place, ainsi qu'un surveillant, ce con de Judas Bloom et le crétin de Marx.

Génial ! Ce trajet va être très long, je vais sûrement me buter en court de route... Heureusement que j'ai mon carnet pour me tenir compagnie avant ma mort imminente.

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