— Nous sommes arrivés.

J’émergeais lentement, encore sous l’effet du tranquillisant. La lumière du soleil me brûlait les yeux, et mes jambes étaient encore engourdies.

— Ça va aller ?

Je dis difficilement "oui" puis descendis de la voiture. Je rentrais chez moi et me jetais sur le canapé sous l’effet de la fatigue.

Il n’y avait aucun bruit. Rod n’était pas là.

Je le cherchais dans le reste de la maison, mais je ne le trouvais pas. Je ne l’entendais pas non plus.

Pourquoi ne voulaient-ils plus le tuer ? Pourquoi m’avaient-ils laissé rentrer chez moi sans surveillance ? Combien de temps étais-je parti ?

Je regardai l’horloge. Il était 15 heures. Presque un jour s’était écoulé, dans le meilleur des cas.

Je fis le point sur ma situation. Si je comprenais bien, ils avaient confondu Rod avec une créature mortelle surnaturelle, alors qu'en réalité, Rod pouvait même leur être utile pour traquer cette bête. Ils avaient quand même envoyé une équipe pour le brûler, mais ça aurait été une erreur que nous devions empêcher. Un samedi ordinaire, en somme.

J’imaginais que par la suite, ils allaient me “proposer” de travailler pour eux : j’en savais trop, et j’avais un outil.

Après environ un quart d’heure, je décidai d’appeler l’agent. Il décrocha immédiatement.

— J’allais vous appeler. Je ne sais pas si vous avez de la chance ou pas du tout, mais votre chien a blessé les trois officiers qui étaient chargés de corriger l’illégalité, mais pas assez pour les tuer. En tout cas, votre chien n’est pas mort, et il n'est effectivement pas ce que nous pensions qu'il était.

— Attendez… plus lentement, s’il vous plaît.

— Je vous envoie des coordonnées. Retrouvez-moi là. Vous êtes en état de conduire ?

— Je crois.

Je raccrochai, pris un verre d'eau et montai dans ma voiture. Je réglai le GPS aux coordonnées que j’avais reçues. Quelques minutes plus tard, j'étais arrivé dans un terrain vague.

Je vis Rod, mais il était attaché avec une épaisse chaîne. Il semblait plus agressif que d’habitude.

— C’est votre chien ?

— Oui, répondis-je.

Je m’approchai.

— Hey Rod. Désolé de pas t’avoir écouté.

Je commençais à parler à un chien. Sans le contexte, j’aurais envisagé de consulter un psychologue.

— MONSTRE.

— Quoi ?

Je fus surpris. Rod aurait pu croire que je l'avais abandonné, et aurait pu m'en vouloir de ne pas l'avoir écouté, mais de là à me traiter de monstre…

— DANGER. FUIR. PARTIR.

Ses mots résonnèrent violemment dans ma tête. J’eus l’impression qu’un marteau me frappait brutalement depuis l’intérieur de ma tête.

— Qu’est-ce qui ne vas pas ?

— EUX PEUVENT AIDER. PARS.

Je compris que Rod était effrayé, mais pas ce qui l’apeurait autant.

— ARR…

Il n’eut pas le temps de finir sa “phrase.” Soudain, sa taille quadrupla, la chaîne céda. Ses yeux brillèrent, et de nombreuses plaies s'ouvrirent sur divers endroits de son corps. Du sang gouttait.

Rod était devenu une créature tout droit sortie de films d’horreur.

— Désolé, mais là votre chien est mort ! On doit partir ! cria l’agent, pour que je l’entende.

Mais j’étais pétrifié.

— Arrêtez de me tuer, dit "Rod" aux agents, d'une voix caverneuse et en dehors de ma tête. Ou je continuerai à vous tuer.

— Hermand ! On a déjà perdu des hommes à cause de lui ! Vous ne pouvez pas survivre !

Il poursuivit :

— Vous allez mourir !

Ce mot me fit réagir. Je me retournais et commençais à fuir.

Trop tard.

J'entendis un râle derrière moi et tout devint rouge. Mon corps entier me brûlait.

Je m’effondrai et me tordis de douleur.

Je pus voir la créature me fixer, et ses yeux briller plus intensément.

J’eus un liquide au goût métallique dans la bouche.

J’entendis des os craquer.

Le rouge devint noir.