Mémoire (Writober jour 22)

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Je l'aperçois déjà au milieu de sa campagne, assise sur sa petite chaise en métal sans âge qu'elle déplace au gré du soleil, de l'ombre et de son humeur. Je profite de cet instant pour l'observer, caché derrière la maison donnant sur la route sinueuse du village. Elle m'attend, comme tous les mois. Elle sait qu'elle pourra laisser libre cours à ses pensées éparses, comme quand on souffle sur un vol-au-vent. Elle aime ma raconter des souvenirs de sa jeunesse que je connais déjà par coeur mais, pour lui faire plaisir et parce qu'elle ne s'en rend pas compte, je lui fais croire que je les entends pour la première fois. Alors, doucement, je m'avance vers elle et me penche pour embrasser sa joue ridée. Elle sent le savon. Le type de savon qui ressemble à celui qu'on utilisait à l'école élémentaire : ovale, jaune, et qui moussait beaucoup. Elle me sourit en silence et je m'installe sur la chaise qu'elle m'a réservée. Après quelques minutes, elle tourne ses yeux rieurs et enfantins vers moi.

- "J'avais peur que tu sois en retard, ma chérie. Tu vois, j'ai ramassé les pommes, aujourd'hui. Ton papi m'a demandé de lui faire une tarte ! Et puis, tu sais, il est tellement gentil que je peux bien lui faire plaisir ! Le boulanger n'a pas livré le pain, ce matin, c'est bizarre. Je devrais demander de ses nouvelles à M'ame Da Silva, tu sais, la petite toute mignonne qui vit dans la maison toute rose à côté ? Elle bien mignonne, cette petite ! Et puis bien élévée ! Elle est passé hier pour discuter un peu avec moi. Parce que, tu sais, la solitude, c'est redoutable ! Et depuis que je n'ai plus Lucien... Je ne savais plus si tu venais ce soir ou la semaine prochaine, mais je suis bien contente que tu sois là !"

Ce n'est plus la saison des pommes. Mon papi nous a quittés. Le boulanger ne livre plus le pain à domicile depuis longtemps et s'est vu contraint de prendre sa retraite sans avoir trouvé de repreneur pour son commerce de proximité. Madame Da Silva a déménagé.

Soudain, mon aïeule me prend la main et son regard s'accroche au mien. Une lueur fugace le traverse, comme à chaque fois qu'elle me Voit à nouveau.

- "Ma chérie, tu me ressembles..."

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