Chapitre I-2

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Le danger venant de l’Est, les dragonnes avaient instinctivement pris la direction opposée. Elles planaient depuis plusieurs heures, écoutant les bruits des combats qui se perdaient au fur et à mesure qu’elles prenaient de la distance. Tascah brisa le silence :

  — On va où exactement ?

  — Le plus loin possible, répondit sa sœur.

  — Tu comptes pénétrer dans le Royaume de l’Ouest ? s’enquit Misava.

  — Je compte aller là où nous serons en sécurité, alors s’il faut passer la frontière, nous le ferons, fit Azira en soupirant.

 — Mais c’est de la folie ! s’étrangla la dragonne. Il faudrait traverser la mer, on ne l’a jamais fait !

  — Nous n’avons pas le choix !

Tascah acquiesça d’un grondement sourd. Les dragonnes volèrent encore un moment dans la nuit, mais la journée de chasse avait dépensé beaucoup de leur énergie et elles durent se poser un moment pour se reposer.

  — Je reste de garde, dit Misava, on ne sait jamais, si les guerriers nous poursuivaient jusqu’ici…

  — Je prendrais le deuxième tiers, dit Tascah.

  — Tu me réveilleras pour le dernier, compléta Azira en commençant de se rouler en boule.

Sa sœur la rejoignit et se coucha dos à elle, formant une grosse masse bleue indistinctes pendant que Misava se perchait en haut d’un gros arbre pour monter la garde.

Malgré ses yeux perçants, elle ne distinguait presque rien dans la nuit noire. Elle voyait tout juste la végétation autour d’elle, et mêmes les deux lunes avaient décidées de se cacher. Quant à son village, elle ne parvenait même pas à voir le grand feu qui avait été allumé plus tôt dans la soirée. Elle soupira en changeant de position, luttant pour garder les yeux ouverts.

Une heure et demie plus tard, elle vint secouer Tascah.

  — Hum, quoi ? fit-elle, pas réveillée, avant de se souvenir. Oh, c’est bon, je me lève. Tu as veillé combien de temps ? lui demanda-t-elle à voix basse pour ne pas réveiller sa sœur.

  — Une heure et demie, répondit Misava. En dormant trois heures chacune, on pourra facilement reprendre la route au matin.

  — Trois heures ? Nous n’avons jamais dormi aussi peu avec tant d’efforts à faire.

  — Je ne pense pas que les guerriers se soucient de dormir. Il faut partir le plus vite possible. Trois heures, c’est le minimum possible.

  — Je sais, soupira la dragonne bleue en baillant. Va dormir, je prends le relais.

Misava alla se coucher aux côté d’Azira.

Des dragons entraînés pourraient se contenter de deux heures de sommeil, se dit Tascah, songeuse, mais on ne l’est pas. J’espère que les guerriers de l’Empereur Noir ne nous ont pas suivis, sinon ils auront vite fait de nous rattraper.”

Elle se posa en haut de l’arbre et réveilla sa sœur une heure et demie plus tard. Elle en profita pour lui expliquer qu’après mure réflexion, elle s’était dit qu’elles devraient prendre moins de temps au repos.

  — Pourquoi pas, du moment qu’on arrive à suivre le rythme, lui répondit Azira. Nous verrons demain suivant notre forme, si tu veux. Allez, va dormir.

Sa sœur alla se coucher en boule aux côtés de Misava, soucieuse de la tournure des évènements. Allaient-t-elles rentrer un jour ? Azira disait que oui, mais elle n’en était pas sûr. Après tout, la guerre ne durait jamais qu’une nuit. La dragonne s’inquiéta soudain pour ses parents. Visiblement ils savaient se battre -or jamais elle n’avait entendu parler d’entraînement au combat- et il y aurait déjà eu un affrontement avec le Sud quinze ans plus tôt, vers la Mer du Fond… Azira, Misava et elle allaient bientôt naître alors. Tascah trouva enfin le sommeil, mais elle s’endormit accompagnée de sombres pensées.

L’aube n’était pas encore tout à fait là quand Azira réveilla ses deux amies. En silence, elles reprirent la route.

  — On devrait s’arrêter pour manger, dit alors Misava. Nous n’avons pas eu le temps hier, et nous ne tiendrons jamais à ce rythme.

D’un commun accord, les dragonnes se mirent alors à chercher une quelconque proie à manger.

  — Là, à droite, dit Tascah.

Les amies aperçurent un troupeau de daimes. Parfait. Cela les rassasierait assez sans devoir trop chasser, ces proies possédant une chair très nourrissante. Chassant en groupe, elles eurent tôt fait de tuer assez de gibiers pour elles trois. Elles mangèrent sans grand appétit, puis soucieuses de ne pas se faire rattraper, elles reprirent la route. Elles volèrent ainsi plusieurs heures jusqu’à devoir se poser, trop fatiguées pour continuer. Elles se mirent à l’abri dans un bosquet traversé par un petit ruisseau. Elles durent boire longtemps pour ne plus ressentir une impression de soif.

  — J’espère vraiment ne pas avoir à traverser la mer du Fond, lâcha Tascah.

  — Pour ça il faudrait déjà être sûr de ne pas être suivies. Et je n’ai pas vraiment envie d’attendre de les voir arriver sur nous avant de prendre une décision, répliqua Misava.

  — Vous pensez vraiment y arriver ? Voler aussi longtemps sans manger et sans repos ?

  — On y arrivera, lui assura Azira. Nous nous reposerons au bord de l’eau pour être le plus en forme au moment de traverser et…

Elles furent interrompues par un bruit ô que trop bien familier. Des dragons approchaient. Deux ou trois, pas plus, mais les trois dragonnes n’avaient pas envie d’essayer de voir si elles pouvaient avoir une chance de les battre en combat. Il suffit d’un regard pour qu’elles prennent leurs décisions et s’envolent à l’unisson. Une fois en l’air, elles aperçurent effectivement trois dragons en armures noires voler vers elles. Elles avaient bien été suivies !

  — Les lâches… gronda Misava. Qui a bien pu leur ordonner de tuer tout le monde, et même de poursuivre des éventuels survivants de toute façon incapables de se battre ?

  — L’Empereur Noir, qui veux-tu que ce soit ? répondit sèchement Tascah. Allez, il faut se dépêcher !

Elles accélérèrent l’allure jusqu’à leur limite et purent ainsi maintenir à une distance respectable leurs poursuivants. Cependant si elles parvenaient à rester à bonne vitesse, elles n’avaient pas l’endurance des guerriers entraînés. Elles aperçurent une ligne bleue au bout d’une demi-heure à peine.

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