La quête abouti ?

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Plus de trois heures s’écoulèrent en silence. Elles cheminaient de plus en plus vite, sachant désormais reconnaitre les endroits à risque qu’elles contournaient sans grandes difficultés. Quelques amas de ronces, disposés çà et là tentaient de freiner leur course en s’agrippant à leurs épais pantalons - qui avaient remplacés leurs légers sarwells – mais, à moins de s’enfoncer suffisamment profondément ou de riper sur leurs chevilles dénudées, ils échouaient dans un bruit déchirant. La pente s’apaisait enfin. Contre toute attente, se mouvoir sur un semblant de plat n’était pas chose facile tant elles s’étaient accommodées au dénivelé abrupt. En regardant loin sur sa droite, Marie discerna un arrêt brutal de l’implantation des arbres, qui s’étendait en formant un demi-cercle. Il devait s’agir d’une clairière. Elle fit alors signe à Floriane de la rejoindre.

- « Allons voir par là-bas, formula Marie en effectuant un brusque mouvement du bras vers l’endroit désigné. Il y a une clairière, peut être que nous pourrions y trouver quelques informations. »

Floriane opina. Il s’agissait là de la première discontinuité qu’elles rencontraient dans le paysage. La probabilité qu’elles apprennent quelque chose de nouveau sur ce fameux protecteur dont elles ne connaissaient pour le moment que le visage – ce qui était déjà beaucoup – n’était donc pas nécessairement nulle. Elles se mirent alors à marcher perpendiculairement à leur trajectoire initiale et hélèrent leurs chiens pour le leur indiquer. Il devait être dans les cinq heures de l’après-midi et la nuit commençait déjà à tombait. Elles activèrent le pas. En parallèle de leur avancée, elles recherchaient un endroit suffisamment plat et abrité pour passer la nuit. Après quelques vingtaines de mètres, au détour d’un chaine centenaire, elles trouvèrent l’endroit parfait : un petit emplacement de deux mètres carrés entouré de vigoureux buissons qui seraient de parfaits coupe-vent. Elles devaient profiter de ce dernier moment de lumière naturelle pour installer leur campement. Elles déplièrent rapidement leur tente, installèrent leurs duvets et commencèrent à préparer le repas du soir. Elles s’occupèrent en priorité de leurs chiens qui depuis le lever du soleil n’avaient pas arrêté de courir une seule seconde. Pour cela, elles déposèrent les rations de croquette dans les gamelles prévues à cet effet et les placèrent sur le sol à plusieurs mètres les unes des autres pour éviter tout combat dans la meute. Là seulement elles appelèrent les affamés. Une fois l’excitation passée, elles purent se concentrer sur leurs propres repas. Elles allumèrent leur réchaud miniaturent et firent chauffer de l’eau. Au menu : couscous au fleur et pomme. Elles apprécièrent ces mets bien mérités. Rapidement, tout le petit monde – les chiens comme les hommes – rentra dans la tente pour se réchauffer. Elles apprécièrent la douceur de leurs duvets. Il n’y avait plus aucune lumière. Sans se voir, elles dialoguèrent pour tenter de démêler l’énigme qui leur faisait face.

- « nous avons déjà marché un jour entier sans trouver ni indice, ni réponse…je ne pense pas qu’en descendant plus bas nous trouverons quelque chose en mesure de nous indiquer la marche à suivre, commença Floriane. Il faut, dans la mesure du possible, que nous prenions garde à ce qui nous entoure. Les réponses aux interrogations les plus profondes sont souvent les plus évidentes et nous sommes face à une énigme profonde. La quête n’est pas tant physique qu’elle est intellectuelle. Si nous ne nous posons pas de questions, ou du moins pas les bonnes questions, il parait évident que nous pourrons encore marcher longtemps et même passer devant le protecteur sans le voir. Il faut mettre à profit ce que l’on nous apprend et rabâche à longueur de journée comme étant LA démarche scientifique : COMPRENDRE l’énoncé du problème et analyser les données avant de se lancer dans l’élaboration d’une réponse et espérer obtenir le résultat qui soit le bon…

- depuis quand tu écoutes les cours toi ?

- tu es légèrement mal placée pour faire de l’ironie là-dessus !

- c’est vrai, capitula Marie. Néanmoins ce que tu dis n’es pas totalement vrai : nous savons que nous avons pour « mission » de retrouver le protecteur dont le visage nous a été montré par les insectes et notre stratégie est de fouiller les coins que nous ne connaissons pas. La réponse peut donc être partout et je ne pense pas qu’un autre indice nous soit apporté. Il faut donc chercher, chercher et encore chercher…

- certes, mais la forêt est immense et les coins que nous ne connaissons pas infini. Je pense que ceux qui ont échoués avant nous ont eu les mêmes indices – peut être les seuls qui existent – et ont imaginés une stratégie similaire. Mais aucun n’a retrouvé le protecteur. Il faut donc que nous prenions le problème non plus de front mais avec plus de subtilité. Une réflexion plus poussée s’impose.

- tu m’as convaincu !

- bien. Nous devons nous poser plusieurs questions : qui est le protecteur ? Pourquoi le recherche-t-on ? A quoi sert-il ? Pourquoi est-il irremplaçable et indispensable ? Comment s’y sont pris ceux qui ne l’on pas trouvé ? Vers où l’on-t-il cherché en vain ?

Floriane tourna sa tête en direction de Marie en attente d’une approbation bien qu’elle savait qu’elle ne pourrait pas la voir.

- ça en fait des question… Mais elles me paraissent nécessaires pour recentrer nos recherches. Essayons d’y réfléchir dans notre sommeil. Il faut impérativement que nous nous reposions pour reprendre la route. Nous apporterons des réponses à ces interrogations demain, en marchant vers la clairière. Je reste convaincu qu’il y a quelque chose à voir là-bas.

- j’espère de tout cœur que tes intuitions soient bonnes…

Sur ce, chacune resta quelques minutes à réfléchir sur ce qui venait d’être dit avant de s’endormir la tête contre le pelage de leurs chiens.

La nuit fût paisible. Elles n’avaient en aucun cas été dérangée par la fraicheur apportée par l’obscurité qui avait été contrée par la chaleur émanant de la fourrure de leurs chiens. Seuls les bruits émis par les animaux sauvages attirés par l’étrange pustule verte - leur tente - qui sortait de la terre les réveillèrent quelques fois. Au petit matin les chiens demandèrent à sortir. Elles se levèrent en même temps pour ne pas perdre du temps avec un demi-sommeil léger qui risquait de les fatiguer plus qu’elles ne l’étaient déjà. Elles s’habillèrent chaudement et déjeunèrent sur le pas de leur habitation temporaire, sans mot dire. Une fois leur cerveau désembrumé, elles rangèrent leur campement et reprirent leur marche en direction de la clairière. En chemin, elles répondirent aux questions qu’elles s’étaient posées la veille : Qui était le protecteur ? Un être surnaturel qui visait à l’équilibre du bois. En quoi était-il important, concrètement ? Sans lui, le bois perdait de sa cohésion et se laissait envahir et modifier par les hommes, ce qui, sur le long terme, engendrerait sa destruction, d’où la nécessité de le retrouver au plus vite. Pourquoi était-il irremplaçable ? Comme l’avait affirmé le misple, le protecteur était bloqué entre la vie et la mort. Or très peu de cas de zombi – pour ne pas dire aucun – avaient été déclaré dans la région, ni dans le reste du monde d’ailleurs. Comment sa disparition soudaine pouvait-elle être expliquée ? Déjà, cela ne venait pas de lui : le protecteur veillait sur le bois de façon permanente et bénévole. Il s’était offert au bois et jamais il ne serait parti sans donner au lieu un successeur. Il s’était donc obligatoirement fait enlever. Par qui ? Surement des hommes qui n’avaient aucun attachement au bois et qui souhaitent le voir vulnérable pour pouvoir l’anthropisé à leur bon vouloir. Comment avaient-ils fait pour l’enlever et le maintenir enfermé s’il s’agissait bien d’une sorte d’esprit comme elles l’avaient imaginé ? Le protecteur était nécessairement un peu plus matériel qu’un esprit pour pouvoir être capturé. Néanmoins pour qu’aucun être de la forêt ne soit parvenu à le retrouver où à le localiser, le protecteur, ne pouvant pas être tué, avait dû être enfermé quelque part, ni à la surface de la terre, ni dans les airs. Il devait être enterré, et sous surveillance. De plus, la personne qui l’avait enlevé devait être très proche du bois pour que ce dernier se confie à elle sur son fonctionnement. Elles même, qui y allaient pourtant chaque jour depuis plusieurs années ne savaient pas l’existence du protecteur jusqu’à leur rencontre avec le néflier. Le kidnappeur devait donc être un « agent double ». Elles arrivèrent enfin à la conclusion suivante : chercher le protecteur comme elles avaient commencé à le faire ne servait à rien. En effet, pour qu’il ne puisse pas envoyer de signaux, il devait être profondément enterré dans une cage ou bien une boite en fer pour être sûr qu’il ne s’échappe pas - le bois pourrit avec le temps or le protecteur est immortel - et surveillé. Il fallait donc qu’elle se mettent à réfléchir à un endroit suffisamment caché pour que l’enleveur ait pu le retenir puis le mettre sous terre, sans être vu par quiconque. Floriane, qui avait été pollué depuis sa plus tendre enfance par les films de science-fiction, avança que cette mission pouvait aussi avoir était conçu de toute pièce pour tester leurs intentions et voir de quoi elles étaient capables pour le bois.

Elles n’avaient pas vu la distance défiler. En ce qui leur paraissaient être quelques secondes voire quelques minutes, elles arrivèrent à l’entrée de la clairière. Là, une petite maison de bois avait été érigée. Une fumée blanche et opaque sortait de la minuscule cheminée. Dans le jardin, des chevreuils broutaient tranquillement et dégustaient le foin qui avait été mis à leurs dispositions. Des lapins et volatiles étaient également présents. Peut-être que l’habitant serait en mesure de les aider ? ou du moins de leur dire ce que les personnes envoyées avant elles avaient fait, où elles étaient parties à la recherche du protecteur et ce qui leur était arrivé ? Elles s’avancèrent donc jusqu’à la porte et frappèrent. Aucune réponse ne leur parvenait. Au loin, elles entendirent un hennissement. Elles se retournèrent et virent à l’opposé de la d’où elles venaient, un magnifique cheval pommelé attelé. Un homme était auprès de lui et remplissait la carriole de bois. Elles s’avancèrent vers eux. Lorsqu’il les aperçu l’homme s’immobilisa. Elles ne mirent pas longtemps avant de le reconnaitre : il s’agissait du protecteur ! L’homme que leur avait indiqué les insectes !

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