3 - Draps

Une minute de lecture

Les draps sont sales.

C’est là devant moi. Ce matin, les draps sont sales. Plus qu’hier, moins que demain. C’est étrange ce constat soudain, qui ne m’a pas frappé les jours précédents. Hier, ils n’étaient pas vraiment sales, aujourd’hui oui ? En une nuit, cachée, la saleté a décidé de ne plus s’abstenir.

Les miens aujourd’hui, comme ceux de millions d’autres. Les autres demain.

Les draps sont sales.

Mais pourquoi ? Qu’est-ce que « sale » ? Un mot qui changé de langue, n’a plus ce sens ? Qu’est-ce que cette saleté, qui apparait au loin, et contre laquelle on se bat, encore, sans même savoir pourquoi elle existe ?

Les draps sont sales.

Sales quand on mouille son lit, petit. Au nom de muscles trop faibles encore, de signaux peu coordonnés.

Sales quand les pensées atroces sont retenues par le subconscient pour les transformer en cauchemars. Et que la peur nous fait suer.

La maladie aussi à ce pouvoir. En plus du rejet du contenu de l’estomac.

Les draps sont sales, quand pour quelque raison, on bave en dormant.

Sales d’avoir été agrippés, en profonde détresse, pour recueillir des rivières au débit intarissable. De la pénurie de mouchoirs.

Sales parce que l’on ne donnera pas la vie. Pas tout de suite.

Et la poussière s’accumule, emportée par le vent vers la fenêtre ouverte. Les cheveux se fatiguent, se détachent pour prendre leur retraite.

Quand le lit est pris comme place de travail, et que les plumes ne sont jamais refermées. Que le risque est pris de s’accompagner de verres ouverts au monde, sans aucune protection.

Après la grande balade dans la forêt, que les feuilles prises dans nos cheveux arrêtent de s’acharner. Et que l’ami avec nous oublie d’enlever ses chaussures. Pour nous embêter ?

Et cette nuit-là, le moustique s’est fait prendre à son propre jeu, écrasé par un bras mal déplacé.

Les draps sont sales. Cycle infini.

Les draps sont sales parce que l’on vit. Un jour après l’autre. Encore et toujours. La vie rend nos draps sales, pour qu’on les lave encore.

Et pour nous montrer qu’on est vivants. Encore.

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