Dis-moi que tu m'aimes

4 minutes de lecture

Elle – Tu dors ?

Lui – Non. Toujours pas, non.

Elle – Préoccupé ?

Lui – Je ne sais pas m'endormir facilement quand quelqu'un est à côté de moi.

Elle – Je te dérange ?

Lui – Mais non, sinon je ne t'aurais pas proposé de te loger.

Elle – Peut-être que je te dérange, mais que tu ne veux pas le dire.

Lui – Tu ne me déranges pas.

Elle – Bon, bon…

Lui – Tu voulais me dire quelque chose ?

Elle – Pourquoi tu me demandes ça ?

Lui – On avait cessé de parler. On était plongé dans le silence et tu m'as demandé si je dormais. J'imagine que tu veux discuter, non ?

Elle – Mmh, peut-être.

Lui – Alors, tu veux parler de quoi ?

Elle – Je n'en sais rien. Je pensais que tu dormais.

Lui – Tu pensais que je dormais et pour ça, tu as engagé la discussion ?

Elle – Je pensais te parler pendant que tu étais assoupi.

Lui – Pourquoi parler à une personne qui ne peut pas répondre ?

Elle – Tu dois avoir une idée, non ?

Lui – Pourquoi tu ne veux pas le dire ?

Elle – Tu n'as jamais parlé à une personne assoupie ?

Lui – Mon ex, une fois.

Elle – Tu lui as dit quoi ?

Lui – Pourquoi je te le dirais ? Et d'ailleurs, tu t'éloignes du sujet. Tu voulais me dire quelque chose.

Elle – Je ne sais pas si je veux te le dire si tu es réveillé.

Lui – Alors je vais fermer les yeux et tu n'as qu'à imaginer que je suis endormi. Je ne dirai rien, je n'écouterai même pas, tu n'auras qu'à dire.

Elle – Tu mens. Tu vas écouter.

Lui – Tu ne le sauras jamais. Allez, je ferme les yeux… Tu ne dis rien ?

Elle – Chut. Laisse-moi un moment. Juste un moment. Là… Là… Ne dis rien. Voilà… J'ai beaucoup réfléchi ces derniers temps. J'ai beaucoup pensé à toi. Je voulais te dire que depuis un moment, je me sens fébrile quand tu es là. Et maintenant que je suis près de toi, que quelques centimètres nous séparent… Maintenant que je sens ton souffle sur moi… Je voulais que tu saches que depuis longtemps, tu es dans mes pensées, juste quand je ferme les yeux, avant de dormir. Je voulais que tu saches que tes mots, ta présence, tes yeux sur moi, me font me sentir bien. Et quand je te vois avec elle, je me sens triste. Non… Je ne me sens pas triste. Je me sens en colère. Je me sens jalouse. Je voulais que tu saches que je pense à toi, souvent, et qu'en cet instant, je brûle de désir. Ma peau est toute de glace, mais je fonds à l'intérieur. Je me sens comme la neige sous un gel, après une pluie verglaçante et j'attends que tu viennes sur moi, pour que je me brise. Je veux me briser sous ton poids. Là…

Lui – Qu'est-ce que tu fais ?

Elle – Je te touche. Je suis froide, n'est-ce pas ? Je me sens gelée… Je pourrais me briser et me répandre sous ton corps.

Lui – Non… Tu es chaude.

Elle – Ce n'est pas ce que je sens. Ouvre les yeux…

Lui – Je ne devrais pas.

Elle – Tu as déjà parlé. Tu as même écouté puisque tu m'as répondu.

Lui – J'avais menti.

Elle – Alors pourquoi garder les yeux fermés ?

Lui – Si je les ouvre, alors ce sera comme si tout devenait vrai. Et je serai une personne horrible. Infidèle.

Elle – Tu n'as rien fait. Tu as dit que tu ne dirais rien, que tu n'écouterais pas… Et je n'ai toujours pas senti le bout de tes doigts sur moi.

Lui – Je ne devrais pas…

Elle – Ne fais rien si tu n'en as pas envie.

Lui – J'en ai envie.

Elle – Alors garde les yeux fermés.

Lui – Je pense à toi aussi. Je pense tout le temps à toi. Quand je suis loin de toi, quand je mange, quand je me réveille, quand je rêve, quand je pisse, quand je chie, quand je suis avec elle, je pense à toi. Et je ne me sens pas fébrile. Je sens que je bouillonne quand je suis avec toi. Je sens que tu n'as besoin que de murmurer quelques mots pour que je ne me retienne de t'embrasser, de te toucher, de te mordre, de te baiser. Et parfois, ça m'enrage. J'essaie d'être une bonne personne, mais j'ai tant de désir qu'il y a des fois où, quand tu me parles, je me sens en colère. Et je voudrais te baiser sur la pierre, sous un orage, dans tous les éléments, n'importe où, pourvu que ça te fasse mal. Mais je me reprends, et je me souviens que ce n'est pas ta faute. Et je me souviens que ce n'est pas de la colère. C'est que je t'aime. Je t'aime depuis longtemps, longtemps, longtemps, et je brûle, brûle, brûle au point que là, en cet instant, il ne te suffirait que d'un mot, simplement dire un mot pour que je rompe les liens de mon honneur.

Elle – Quel est ce mot ?

Lui – Tu le sais très bien.

Elle – Peut-être que je me trompe. Peut-être que j'ai un mot en tête, mais qu'à l'inverse, il t'éloignera de moi. Peut-être qu'avec cet autre mot, juste cet autre mot, il n'y aura plus rien entre nous. Peut-être que cela suffirait à ce qu'on ne ressente plus cette incandescence, là, dans ces centimètres qui nous séparent.

Lui – Il n'y a aucun mot capable d'atténuer mon amour pour toi. Pourquoi tu ne le dis pas ? Pourquoi tu ne fais que jouer avec moi ? Tu me parles de tes pensées, de la façon dont je les hante, mais tu ne me dis pas ces mots-là. Dis-moi que tu m'aimes.

Elle – Tu sais.

Lui – Je sais, mais je dois l'entendre.

Elle – Viens.

Lui – Non. Toi, viens.

Elle – Heureux ?

Lui – Dis-moi que tu m'aimes.

Elle – …

Lui – Embrasse-moi. Maintenant, dis-moi que tu m'aimes.

Elle – Tu respires fort…

Lui – Toi aussi.

Elle – Les hommes gémissent… Mais toi, tu respires si fort.

Lui – Dis-moi que tu m'aimes.

Elle – J'aime…

Lui – Dis-moi que tu m'aimes.

Elle – Tu vas me briser…

Lui – Dis-le.

Elle – Je brûle…

Lui – Dis-le !

Elle – Ah…

Lui – Dis-le !

Elle – Je…

Annotations

Vous aimez lire Brice Gouguet ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0