Je l'ai fait. Cela semblait impossible au premier abord, voire fou ou suicidaire, mais pourtant je l'ai fait. L'idée ne m'est pas venue tout de suite. Il m'a fallu des rencontres, de l'entrainement, de la détermination. Mais c'est fait. Un fil tendu entre deux arbres solides d'une montagne, mon corps tenant en équilibre sur la ligne droite scindant l'horizon en deux, mes bras faisant corps avec l'air, mes cheveux voletant au rythme du vent, il me semblait être à ma place. Sans harnais pour me protéger, j'étais seule avec mon équilibre et mon calme pour unique protection. Le vide sous mes pieds était gitantesque, celui au-dessus de ma tête l'était d'autant plus. Chaque pas demandait un courage hors norme, une détermination sans faille. De loin, on aurait dit que je marchais dans l'air. Mon corps a mis un moment avant de s'habituer à cette nouvelle pratique, défiant les lois de la physique et du naturel, s'engageant en terrain inconnu, la moindre de mes cellules criant contre cette idée saugrenue. Il a falllu faire la paix en moi. Il ne fallait pas chercher à éliminer la peur, l'appréhension et le doute, bien au contraire, il faut les accueillir, les écouter, et les transformer en joie, en détermination, et en concentration.

Marcher ne m'avais jamais semblé aussi éprouvant. Cinq cents mètres à parcourir sur un fil plus fin que la largeur de ma main, les cinq cents mètres les plus épuisants et grisants de ma vie.

Là, au coeur de la nature, perdue au milieu de l'air, des rayons du soleil et du vent, mon corps flottant dans l'atmosphère, je me suis sentie terriblement vivante, mon coeur battant à mille à l'heure, ma respiration régulière rythmant chacun de mes pas, j'ai compris que si j'étais là, c'était pour vivre des moments comme ceux-ci, qui me feront me demander pourquoi je suis ici, et qui m'aideront à y répondre, chaque fois différement, au gré de mes actions, de mes questions et de mon évolution.