Le Livre de Börth (2/2)

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La décision acheva de diviser la Communauté. Le Coryphée fut en effet inflexible. Chioné fécondée, il leur fallait demeurer auprès d'elle. Mais le vieux Samir ne pouvait s'y résoudre. Il fit d'abord contre mauvaise fortune bon coeur. Afficher son désaccord était une chose, s'opposer de front à leur Chef relèverait de la mutinerie. Après tout, n'était-ce pas là le rôle du Coryphée que de prendre les décisions quand il le fallait ?

Le soir même cependant, c'est Gudrun, un impétueux guerrier, qui prit le Coryphée de front. Gudrun était apprécié de ses pairs pour sa fougue et sa vaillance, mais le peu de respect qu'il avait pour le protocole ainsi que son inclination à ne jamais en faire qu'à sa tête lui attirait souvent les foudres des plus anciens. Le colosse avait pour épouse Leila, une érudite acquise à la cause de Samir.

— Est-ce donc là le sort que tu nous réserves ? lança Gudrun en s'adressant au Coryphée. Vivre reclus dans cette épave, coupés du monde, avec pour seule perspective cet enfer glacé et inhospitalier ? Est-ce là l'avenir auquel tu destines nos enfants ?

Des voix indignées s'élevèrent. Harald, le Capitaine des Guerriers, tenta de raisonner son cerbère. Mais Maël, le Coryphée, l'interrompit d'un geste.

— Laisse !

Puis, se tournant vers l'impertinent, il ajouta :

— C'est là la voie de la raison. Cette épave, comme tu dis, sera notre abri. Chioné, même endormie, nous protègera du Mal d'Awarn qui pourrit les chairs des hommes et des bêtes et l'Egérie nous aidera à le vaincre.

— Nos armures et nos boucliers nous protègeront de cette peste insidieuse ! A quoi bon vaincre le mal si c'est pour survivre comme des rats dans un terrier ? rétorqua Gudrun.

— Pauvre fol ! Ton armure te protègera pendant une lune tout au plus. Elle t'alourdira et te ralentira et quand épuisé, tu l'auras enfin compris, il sera trop tard. Et tu périras dans cet enfer blanc ! Toi et les frères ou les soeurs que tu auras entraînés à ta suite !

C'est Samir qui vint à la rescousse de Gudrun.

— Pas si nous faisons route vers le midi. Le climat devrait y être plus clément, fit-il, pensif. Et le Mal d'Awarn ne pourra rien contre nous si nous nous éloignons suffisament de ces terres

— Folie ! rétorqua Maël. Quoi qu'il en soit, ma décision est prise !

Gudrun se leva, s'approcha du Coryphée et le toisa.

— C'est ta décision, fit-il. Je refuse de me terrer, et je refuse de m'en remettre à l'Egérie. Les enfants de Chioné ne seront jamais tout à fait des hommes, et quand ils se prendront pour des dieux, ils nous conduiront à notre perte.

— Nous avons le pouvoir d'empêcher ça ! répondit Maël. Nos alchimistes peuvent les façonner à notre image !

Gudrun, après avoir repris sa place, cracha, dédaigneux.

— Comme ils l'ont fait depuis maintenant vingt générations ? Vois où cela nous a mené !

Tandis que son épouse venait se blottir contre lui, il ajouta :

— Si Samir propose de partir, je le suivrai.

Un silence glacial tomba alors sur l'assemblée.

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