Chapitre 8

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Écrit en écoutant notamment : Bass Température - Tribe of the Bells [Techno]


La journée fut un peu moins sportive que la veille. Après le repas du midi, ils dégustèrent le gâteau d’anniversaire vautrés dans les divers fauteuils et canapés du salon, puis Rémi remercia un par un ses amis d’une franche accolade pour la place de concert qu’ils lui avaient offert.

Félix proposa ensuite un tour à pied dans le village. Côme accepta avec un large sourire de leur servir de guide, car selon lui, le coin recelait de monuments, chemins méconnus et diverses autres curiosités.

Après avoir essuyé un appel de ses parents, Côme mena ses amis sur les chemins du village et finit par s’arrêter au beau milieu de la place de l’église. Rémi soupira en remarquant le sourire que Côme avait du mal à contenir.

— Retournez-vous et admirez !

Rémi fit volte-face sans pour autant trouver ce qu’il y avait d’intéressant à voir. Heureusement, Félix et Julian semblaient tout aussi perdus.

— On dit que c’est le plus vieil arbre de la région ! Un if qui a été planté à l’époque de Charlemagne.

L’enchevêtrement de racines et de branches semblait bien posséder un âge canonique au vu de la complexité de ses ramifications. L’écorce paraissait également creuse par endroits.

— Dinguerie ! s’écria Rémi.

— C’est vrai que c’est incroyable qu’il ait vécu le règne de Charlemagne, la guerre de Cent Ans, la Révolution… ajouta Félix, rêveur.

— Attendez, j’ai encore bien mieux.

Ils pénétrèrent dans l’église vide, traversèrent la nef, dont les collatéraux étaient ornés de diverses représentations bibliques, jusqu’au chœur. Un petit escalier les mena vers une crypte au plafond bas fermée en son bout par une porte en fer rouillée frappée de l’inscription « Accès Interdit ».

— Tu vas nous crocheter la serrure ? s’amusa Rémi.

— Euh non, mais il y a un autre passage !

Il se glissa alors dans une anfractuosité qui s’enfonçait discrètement sous le sol derrière un muret. Félix et Julian suivirent, puis Rémi, légèrement plus épais que ses amis, éprouva quelques difficultés à se frayer un passage à travers l’étroite ouverture. Côme ouvrait le passage à l’aide d’une lampe torche et ils s’enfoncèrent prudemment à travers le dédale rocheux.

— Attention à la tête, prévint Côme, le plafond descend parfois très bas.

Tout d’un coup, Rémi s’exclama :

— Eh, regardez les inscriptions gravées sur le mur : « Requiem æternam dona eis Domine, et lux perpetua luceat eis. Requiescant in pace. Amen. — 1411 » C’est du quinzième siècle ! Par contre, je ne sais pas du tout ce que ça veut dire.

— Ce sont des prières en latin, répondit Côme, mais je ne peux pas plus t’aider.

— C’est glauque, mais j’aime plutôt bien.

Rémi ne croyait pas si bien dire, car soudainement, le passage s’élargit et exhiba un entassement d’os de diverses longueurs. Quelques crânes au regard noir et vide les observaient même depuis un rebord surélevé. Côme n’était pas effrayé le moins du monde et annonça :

— Nous sommes en-dessous du cimetière. Entre quatre et six mètres sous la surface.

— Incroyable ! souffla Rémi.

Il s’avança et leva le bras pour venir effleurer un des crânes.

— Mais c’est connu comme passage ?

— Euh, je ne crois pas que ce soit répertorié dans les guides touristiques. C’est mon grand cousin Nicolas qui me l’a fait découvrir. De nombreuses personnes sont sûrement déjà passées par ici, mais pour notre part, on n’y a jamais rencontré aucun touriste.

— Tu nous as bien caché ton jeu, n’empêche !

— Euh oui… au moins tu vois que les églises peuvent être intéressantes.

Quelques mètres plus en amont, Félix sentit la main de Julian attraper son poignet. Les tremblotements de son ami ne pouvaient pas seulement être dus à la fraîcheur humide du lieu : il paraissait vraiment mal à l’aise devant ce spectacle mortuaire, alors que Rémi s’extasiait de plus belle à chaque explication de Côme.

Pendant un court instant, le torse de Julian vint chercher un peu de chaleur contre son dos. Félix savoura l’onde de volupté qui le traversa, tout en restant immobile. Il aurait eu envie de se retourner et de caresser le visage de son ami.

— Je vais leur proposer qu’on fasse demi-tour.

Côme indiqua que le chemin ne se terminait pas en cul-de-sac, et que la sortie était assez proche. En effet, deux minutes plus tard, ils débouchèrent à l’air libre entre deux pans rocheux serrés qu’il fallait escalader pour rejoindre le bout d’une plage. Leurs yeux mirent quelques secondes à se réhabituer à la clarté du jour.

Alors qu’ils longeaient la plage, leur groupe fut joyeusement interpellé :

— Côme ! Content de te voir ici !

— Oh, bonjour Sylvain ! Je ne savais même pas que vous étiez aussi ici en ce moment. Les gars, voici Sylvain, un ami de mon père, Madeleine, sa femme, et Odile, qui a notre âge.

Félix, Rémi et Julian se présentèrent succinctement à leur tour. Ils discutèrent de leur début de vacances respectifs et de la splendeur de la région avant que Félix ne proposât à Odile de passer la soirée à la maison. Il semblait si responsable que personne n’y vit d’inconvénient : ses parents la déposeraient vers sept heures et reviendraient à onze.

Dès qu’ils furent assez éloignés, Rémi lança :

— Tu les connais bien, Côme ?

— Oh oui assez, nous nous voyons plusieurs fois par an.

— Et ne me dis pas que tu n’as jamais rien essayé avec cette magnifique fille !

— Euh non… Mais tu as raison, elle est jolie, dit-il avec un sourire chétif.

— Dans ce cas, je te laisse faire ! Promis, je ne serai pas lourd et je ne tenterai rien moi-même.

— Euh… D’accord.

— Et elle est un peu comme toi ? Je veux dire… bien élevée et tout ?

— Selon tes critères, je pense que oui !

Ils achetèrent quelques vivres pour ne pas que la soirée parût misérable, avant de passer sous la douche et de préparer leur sauterie. Côme alla ouvrir lorsque la sonnette retentit, et récupéra une bouteille de vin de la part des parents d’Odile, qu’il remettrait comme cadeau aux siens. Rémi, surpassant ses promesses de l’après-midi, demanda en toute galanterie à la jeune fille ce qu’elle souhaitait boire.

Elle remarqua ensuite, posé dans un coin du salon, le jeu d’échecs, auquel les garçons n’avaient pas touché depuis leur arrivée. Félix se porta volontaire pour jouer une partie avec elle et installa les pièces sur l’échiquier sous l’œil captivé de ses amis. Odile poussa avec détermination le pion devant sa dame de deux cases, puis son adversaire fit de même.

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