Chapitre 3

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Ecrit en écoutant notamment : Teksa - Gloomy World [Techno]

Lorsqu’ils arrivèrent sur place, Rémi s’excita tout d’un coup :

— Eh les gars, regardez, la meuf de tout à l’heure est là avec ses parents on dirait !

— J’aimerais bien te voir à l’action, rigola Félix.

— Vous verrez, un peu plus tard, si elle est toujours là, je tenterai ma chance. Impossible qu’elle résiste à mon charme.

Félix contempla, douteux, l’accoutrement de son ami. Les baskets, le 501, la chemise, le pendentif et ses cheveux figés par le gel formaient un ensemble un peu particulier, qu’on avait du mal à classer entre beauf ou classieux.

Le maire débuta son discours en souhaitant la bienvenue aux vacanciers, remercia ensuite l’organisation pour la soirée qui s’annonçait, puis encouragea les deux dernières équipes encore en lice, qui allaient s’affronter juste après. Il quitta ensuite l’estrade sous une salve d’applaudissement desquels émergeaient très distinctement les sifflements de Rémi.

— Tu nous casses les oreilles ! cria Julian à son intention, alors que Rémi avait toujours deux doigts entre les dents.

Pendant que la foule était occupée à regarder la finale se jouer, ils allèrent s’acheter des saucisses grillées, qu’ils dégustèrent un peu à l’écart, observant le groupe de musique qui était en train de s’installer sur la scène au milieu de la place.

— Alors, Julian, tu cherches quoi toi ce soir ?

— Ah, moi, si je peux, je tenterais bien quelque chose avec une fille de dix-sept ou dix-huit ans, mais je ne saurais pas trop comment faire. Je me demande même si tu ne devrais pas me montrer, car je n’ai jamais essayé sérieusement.

— Et toi Côme ? Pas avant le mariage ?

— Euh si, si !

— Si quoi ?

— Si, je cherche…

— Tu cherches quoi ?

— Bah oui… un peu comme toi…

— Comme moi comment ?

— Euh… une demoiselle, qui a mon âge peut-être.

— Ah bah voilà ! Bon courage pour trouver ta « demoiselle », donc !

Ils furent interrompus par un des membres du groupe, qui fit hurler sa guitare électrique pour tester le son.

— Ils ont l’air vieux, mais peut-être pas si ringards que ça, constata Félix.

Ils démarrèrent leur prestation une petite demi-heure plus tard, jouant plusieurs morceaux de rock connus de tous, ce qui leur valut un succès certain. Une fois que Rémi fut parti à la conquête de sa fameuse cible, leur groupe se désolidarisa progressivement, chacun vaquant dans son coin. La musique était loin d’être désagréable, et la nuit qui tombait doucement donnait à la scène un côté assez épique. Le guitariste se donnait à fond, ses cheveux s’étant très rapidement mis à dégouliner.

Rémi, Julian et Félix finirent par se retrouver à nouveau vers dix heures et demie, sans pouvoir remettre la main sur Côme.

— Quel rabat-joie, je suis sûr qu’il est rentré, à mon avis ses parents l’ont rappelé à l’ordre, imagina Rémi.

— Il a les clés, au moins ? ajouta Félix.

— Euh… non, c’est moi qui les ai. On fait quoi ?

Julian se proposa pour passer voir devant la maison pendant qu’ils attendraient pour leur part ici.

— Alors Rémi, comment est-ce que ça s’est passé ?

— Eh ben, j’ai déjà réussi à lui parler un petit peu, c’est un bon début. Après, j’y retourne, et je lui propose qu’on se revoie demain.

— Pas mal du tout ! approuva Félix. Moi je n’ai pas encore trouvé celle qui me convenait, mais tu seras le premier à le savoir, je te le garantis !

Rémi afficha un sourire satisfait et n’oublia pas d’appliquer une bonne bourrade à Félix.

Ils aperçurent alors Julian revenir avec un Côme aux yeux rougis. Ce dernier s’adressa à Rémi :

— C’est de ta faute ! Je suis allé parler à une fille comme tu m’as dit de faire, mais elle a dit que « je ne lui plaisais pas trop », puis elle m’a tourné le dos.

— Eh, ça ne marche pas à tous les coups ! Mais ne t’inquiète pas, plus tu en rates, plus tu as de chances de réussir après.

Ils restèrent ensemble tous les quatre pour écouter le groupe suivant, qui rencontra un peu moins de succès avec leur musique plus typée funk. Heureusement, le feu d’artifice suivit pour ranimer un peu la foule qui commençait à se disperser. Assis dans l’herbe, ils contemplèrent le spectacle pyrotechnique, étonnés des moyens dont disposait la commune.

Quelques instants après que la dernière gerbe multicolore eut illuminé la nuit noire, le speaker prit le micro :

— Merci à tous ! Ce fut avec un immense plaisir que nous avons pu organiser et vous faire vivre cet évènement. Pour ceux qui souhaitent encore danser, veuillez accueillir le dernier groupe de la soirée. Enfin groupe, il est seul, mais cela ne l’empêchera pas de mettre l’ambiance. Il a 20 ans, étudie la mécanique des fluides… oulah… mais a bien choisi son nom de scène : voici Martin, also known as DJ Flowmaster !

Le dénommé Martin s’avança doucement sur la scène, poussant le chariot sur lequel étaient posées les platines. Il s'occupa des derniers branchements, observa quelques instants la foule pour cerner le type de gens auquel il avait affaire, puis démarra avec le célèbre Losing It de Fischer pour marquer son style orienté dance et house. Quelques seniors qui avaient tenu jusqu’ici s’en allèrent rapidement en soupirant : « cette musique de jeune, dis-donc, aucun intérêt ! ».

Rémi s’adressa à Côme :

— Je le sens bien, le Martin ! Tu vas voir, c’est autre chose que la messe du dimanche !

— Euh oui… on va voir.

Le set continua sur de la dance music assez connue, sur laquelle Félix et Julian prenaient beaucoup de plaisir à danser. Le DJ maniait son matériel avec professionnalisme, bougeant en rythme, scrutant de temps en temps son public pour y déceler ses envies. Tandis que Rémi se déhanchait comme bon lui semblait, eux deux maîtrisaient beaucoup mieux le rythme des morceaux et se permettaient d’improviser quelques chorégraphies intéressantes. Côme hésitait pour sa part à se lancer et restait plutôt en retrait.

— Fais comme tu le sens, Côme, personne n’est ridicule, regarde-moi ! cria Rémi.

Il esquissa quelques mouvements de bras, mais le détachement total était encore bien loin.

— Je pense vraiment qu’il te faudrait quelques binouzes dans le gosier, toi !

Sur ce, Rémi, qui n’avait pas oublié son objectif pour autant, alla retrouver sa fameuse jeune fille.

*

**

Sur le chemin du retour, à déjà une heure du matin passée, Rémi se pavanait devant ses amis, répétant inlassablement qu’il avait réussi à arranger un rendez-vous pour le lendemain soir. Mis à part Côme, qui souhaitait aller dormir au plus vite, ils décidèrent de réunir leurs matelas dans la plus grande des chambres. Ils savaient tous bien que ces fins de soirées étaient propices aux discussions plus intimes, celles que la sobriété du jour avait tendance à inhiber. Pourtant, constatant qu’ils étaient même trop fatigués par cette journée pour se lancer dans un jeu d’action ou vérité, ils ne tardèrent pas à retrouver leur oreiller.

La chaleur et l’air sec réveillèrent Rémi, qui soupira en constatant qu’il n’était que trois heures du matin. Il ferma les yeux pour tenter de se rendormir, mais la tâche était ardue. La manière de se présenter à son rendez-vous le tracassait déjà, car il savait qu’au vu de l’aisance qu’il avait volontairement affichée ce soir, il se devrait d’être irréprochable dans son apparence et sa manière d’être.

Lorsque, désabusé, il souleva rapidement une paupière, la position de Félix l’intrigua tout particulièrement.

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