Solitude, mon ennemie bien-aimée

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- Laisse-moi.

J’entourai mes genoux de mes bras. Entre les mèches de mes cheveux anthracite, je pouvais apercevoir sa frimousse déconfite. Il fit un pas vers moi, puis se ravisa, tordant ses mains d’un air frustré.

- Tu ne comprendras jamais.

Mes paroles étaient à peine compréhensibles, étouffées par mes sanglots incoercibles. J’avais honte de ma réaction, honte de mes sanglots à chacune de nos altercations, honte de mon caractère emporté, d’encore le rejeter. Comme à chaque fois, je voulais qu’il disparaisse loin de moi, que son regard triste s’évanouisse avec sa présence. Je voulais être seule sans assistance, car alors rien ne me rappelait la personne que j’étais et nul œil ne pouvait alors refléter l’âme qui m’habitait. Je voulais que le monde disparaisse, que ma honte enfin ne cesse, que pour toujours dans la solitude je me vautre. Loin de cet enfer que sont les autres.

- Cette dispute ne mène à rien… dit-il en vain.

Je le haïs pour avoir dit ça. Pensait-il que je ne le savais pas? Pensait-il que je n’avais pas conscience de la démesure de ma réaction ? Je savais que je n’avais aucune raison d’être rongée par l’irritation, aucune raison de lui en vouloir d’être là, de toujours et malgré tout veiller sur moi. Mais je ne le supportais plus, devant lui je me sentais comme nue. Désarmée et sans endroit où cacher mes failles, je voulais juste qu’il s’en aille.
Après un dernier regard dépité, il finit par me laisser. Soudain j’étais isolée et dans toute cette solitude je crus me noyer. Je souhaitais qu’il revienne, que j’en vaille la peine. Car j’avais cru que je me sentirais mieux sans ses yeux posés sur moi, mais son départ n’avait que permis de chasser mon émoi. À présent rien ne me séparait à moi-même, pas même quelqu’un qui m’aime. Je me voyais directement dans toute mon intégralité, et c’était bien plus douloureux que de juste se voir dans les yeux de son aimé.
Je compris que ma solitude n’était pas un but, mais au contraire ma chute. Pour elle je n’avais pas seulement blessé celui qui m’aimait, j'avais aussi blessé celle que j’étais. À présent la solitude m’entourait de ses bras rachitiques, m’emprisonnant dans son étau fantomatique. Et je mourrais d’être seule.

Je me sentis m’enfoncer dans mon fauteuil. Seule la brume habitait mon esprit, tandis que je glissais dans la folie.

Je saisis le cutter abandonné sur le bureau, et sortis de ma chambre pour rejoindre mon bourreau. J’enfonçais l’arme droit dans le cœur. Pourtant sur son visage n’apparut nulle douleur. Le temps s’immobilisa et une larme s’échappa, mais il n’y eut nul mal. Le miroir se contenta juste de crisser sous la lame.

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