Convalescence

2 minutes de lecture

" Tu aurais pu faire attention.

- Oui, maman.

- Tu te rends compte ? Il s'en est fallu de peu pour... pour...

- Oui, maman."

Rivette n'était pas fier. Il regardait sa mère pleurer à chaudes larmes et s'en voulait atrocement.

Même si dans les faits, il n'aurait pas pu faire grand-chose pour changer les choses.

Une balle était toujours un risque pour un policier.

Le jeune inspecteur posa sa main sur celle de sa mère et lui fit un sourire encourageant.

" Je vais bien. Maman. Je vais bien. Tu vois ?

- Ils m'ont dit que tu es resté conscient jusqu'au bout. C'est ce qui t'a sauvé.

- Oui, maman.

- Béni soit Dieu de t'avoir sauvé.

- Oui, maman."

Rivette avait furieusement envie de lever les yeux au ciel devant sa mère. Sa mère et la Religion !

Il se mordit la lèvre et se tut.

" Et tu es toujours si seul ! Personne ne vient te voir.

- Je suis bien comme ça, maman."

L'inspecteur se voulait rassurant mais les yeux de sa mère le peinaient. Ils étaient embués de larmes.

" Tu es si seul, mon fils.

- Je suis heureux, maman."

Heureux ?

Il ne le savait pas vraiment.

Mais seul ?

Certainement pas.

Au pied de son lit, il y avait un fauteuil en plastique d'un inconfort digne de la torture médiévale. Sur ce fauteuil se tenait son collègue.

Et ses yeux clairs l'observaient avec inquiétude.

Il ne l'avait pas quitté depuis sa blessure.

Rivette était même sûr que le vieux policier avait hanté la salle de chirurgie.

Ce qui l'amusait quand on y pensait.

" Je vais bien !, affirma le convalescent.

Et c'était dit à la fois pour la femme et pour l'homme. Tous deux soupirèrent d'une manière identique.

Cela frappa Rivette. Le collègue décédé avait l'âge d'être son père.

Il portait à nouveau son pantalon noir et sa chemise blanche. Effacé l'uniforme rutilant. Mais son image était restée imprimée dans les souvenirs du jeune homme.

Une infirmière arriva et vint rappeler doucement aux deux pauvres âmes qu'il fallait se quitter.

La vieille femme se leva et tristement, elle embrassa le front de son fils.

" Il y a quelque chose qui te ferait plaisir, fils ?

- Oui, maman."

Cela fit étinceler les yeux de la mère, ravie de se rendre utile pour son enfant.

" Un livre sur l'histoire de la police et sur les uniformes aussi.

- Tu ne peux pas penser à autre chose qu'à la police ?! Surtout après ton accident...

- Maman, s'il te plaît."

Il venait de capter les yeux glacés de son collègue et un vent froid commençait à lui chatouiller le cou. Cela le fit sourire.

" Bon, bon. Si cela t'intéresse. Je vais te trouver cela.

- Merci maman."

Puis, devant la porte de la chambre, la mère, honteuse, lança à son fils :

" Je vais rendre visite à ton père. Il a le droit de savoir ce qui t'est arrivé.

- Oui, maman."

Mais la voix de Rivette était infiniment triste.

La porte refermée, l'ambiance changea du tout à tout. L'inspecteur claqua les doigts et regarda son collègue blessé sans aménité.

" Les uniformes de la police ? On peut savoir pourquoi ?

- Il y a forcément une raison à votre présence ici. Si on peut vous renvoyer...

- Putain Rivette ! Je ne t'ai rien demandé !

- Deux cents ans ! Vous avez pas envie de partir ?

- Merde !"

Et il se retrouva réellement seul lorsque la silhouette de son collègue s'évanouit dans la brume.

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