Dernier voyage

Une minute de lecture

Le chuintement musical de la vieille Micheline me plongeait dans un demi-sommeil alourdit par le tanguage régulier de la voiture sur les voies.

La guerre était finie.

J'époussetai distraitement le béret rouge qui me rendait si fier et ajustai machinalement l'aigle impérial épinglé sur le côté gauche.

Quelle merde!

Njegos, Milos, Vlada, Vedran.

Ils étaient mes frères d'armes, mes camarades sous la bannière yougoslave, mes amis les plus proches. Et leur nom repose désormais au milieu de milliers d'autres que la guerre a rendu à l'oubli. Comment notre pays, notre Grande Nation Socialiste, fer de lance de l'opposition Est-Ouest pendant la guerre froide a pu tomber aussi bas à la mort de Tito?

Nous avons quitté Belgrade ce matin, dissimulée dans les brumes nauséabondes des bombardements de l'OTAN, et nous avons pris la direction du Sud.

Le Sud.

Ce Sud que j'affectionnais tant, enfant, ce Sud qui représentait l'été, les vacances, les châteaux de sable sur la côte Dalmate et le cabotage sur le misainier de mon père. Tous les étés, Zagreb, Sarajevo, Belgrade et Novi Sad se déversaient sur l'Adriatique, tandis qu'aujourd'hui, la capitale yougoslave vomit ses soldats vaincus sur Dubrovnik.

Dans quel but? Rappatrier les femmes, les enfants et les vieillards encore prisonniers des Croates vers la Serbie.

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