14 : Trouver un plan pour fuir.

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Trois jours après l'exécution publique, la vie semblait reprendre son rythme normal comme si rien ne s'était passé. Pourtant, bien que les bûchers furent retirés après que les cadavres carbonisés furent jetés dans une fosse commune, il persistait toujours la trace du feu sur la place centrale de la ville où se situait le marché. À chaque fois qu'Anna passait au marché, elle ne pouvait s'empêcher d'avoir envie de vomir bien qu'elle ne pouvait se permettre de prendre le risque d'afficher son dégoût devant les autres habitants. Anna se refusait même d'adresser la parole aux autres personnes parcourant le marché, à l'exception des commerçants, afin de ne pas se risquer à aborder le sujet et dire sans ménagement le fond de sa pensée. Ce petit exercice quotidien, la jeune femme s'en serait bien passée, espérant juste pouvoir rentrer dans son véritable foyer au plus vite, bien qu'elle occupe une maison depuis plus d'un mois désormais comme si elle faisait partie du quartier. Elle redoutait toujours une seconde vague de chasse aux sorcières, dans le cas où l'inquisition n'aurait pas eût son compte de victimes.

Cependant, elle et Van ne pouvaient quitter la ville, celle-ci étant toujours sévèrement gardée et ce fut ce détail, qui fit redouter à la jeune femme qu'elle était toujours en danger en restant à Worms. Elle manquait même de temps pour chercher une solution avec Van, ce dernier ayant été réaffecté au quartier incendié afin de le rebâtir encore une fois. Anna, non seulement d'être encore traumatisée par l'exécution publique, se sentait désespérément seule dans sa maison en journée et encore plus depuis qu'elle avait pris l'habitude d'être plus proche sentimentalement de son équipier. Certes, ils étaient bien loin de pouvoir être considérés comme un couple et ce n'était pas non plus le grand amour entre eux, mais quelque chose avait changé entre eux : ils n'hésitaient pas à se montrer affectueux l'un envers l'autre par moment, et Van laisser dormir la jeune femme collée à lui sans se plaindre ou la repousser. Cependant, même si elle se sentait seule, elle se refusait à interagir avec les autres, ne supportant pas leur air satisfait par les exécutions. Cela en était arrivée à un point, qu'elle préférait passer par les petites ruelles sombres, et étroites menant à son quartier plutôt que les grands axes, afin de ne croiser personne sur son chemin.

Ces ruelles reflétaient bien mieux la situation réelle de la ville, que le marché et les grands axes de la ville. Alors que dans les parties les plus peuplés de la ville, tout semblait aussi normal qu'à l'arrivée de Van et Anna à Worms, il manquait une chose dans ces ruelles : avant la grande chasse aux sorcières, la zone grouillait de mendiant, de paumé et de laissé pour compte. Là, il ne restait plus un seul individu comme s'ils avaient tous été emportés en quelques jours. Depuis, qu'elle avait recommencé à sortir après avoir repris des forces moralement, Anna avait pris l'habitude d'emprunter ces passages régulièrement, ne craignant pas de s'y faire agresser depuis que les lieux étaient déserts. La jeune femme aurait sûrement reçu les reproches de son équipier s'il l'avait vue faire, car celle-ci se montrait bien trop confiante en parcourant les ruelles alors que, rien ne lui prouvait que cela était véritablement sans danger pour elle. Elle n'eût cependant pas besoin de Van pour apprendre cette leçon : dans un bruit de fracas, une silhouette sortie de sous un tas de petit bois et commença à la menacer d'un couteau.

Pourtant, si Anna était restée figé de surprise, ce ne fut pas à cause du couteau la menaçant mais bien à cause de la personne qui le tenait. Devant elle se trouvait une fillette de sept ans, le corps et les cheveux entièrement maculé de boue et de poussière, tenant à peine sur ses jambes qui ne cessaient de trembler. À première vu, la fillette semblait épuisée et affamée : elle faisait si peine à voir avec sa robe en lambeau et son apparence de pouilleuse, que la première réaction d'Anna ne fut pas d'avoir peur du couteau, mais d'avoir pitié de la pauvre fillette. Et pour cause elle avait raison de ne pas craindre l'enfant qui tentait de la menacer, car celle-ci semblait bien trop affaiblie pour aller au bout de sa démarche. Cela expliquait sans doute pourquoi la fillette qui était pourtant l'agresseur, restait sur la défensive à plusieurs mètres d'Anna et semblait la craindre quand cette dernière, commença à s'approcher d'elle. Dans l'espoir d'être prise au sérieux, la fillette se permis même d'interpeller Anna et de la menacer verbalement :

- Reste où tu es la rouquine sinon, ça va mal finir pour toi ! Tu vas poser ton panier, et y laisser tout ton argent dedans puis disparaître de ma vue !

- Comment t'appelles-tu petite ? Lui demanda Anna en ignorant les menaces de la fillette. Comment t'es-tu retrouvé seule dans cette ruelle ? Où sont tes parents ?

- Tu m'as pas entendu ? Insista la fillette dont la voix tremblait désormais autant que ses jambes, trahissant chez elle une peur et un manque d'assurance. Pose tout ici et vas t'en ! Le reste ne te regarde pas. En plus je ne suis pas idiote ! Si je te dis mon nom, tu vas me dénoncer, alors ne joue pas les malines avec moi !

- Je ne compte pas te dénoncer, je veux juste t'aider, répondit Anna d'une voix douce et chaleureuse. Si tu as faim, il suffisait de me le dire, j'ai assez de pains et de pommes pour t'en donner.

- J'en veux pas de ton aide ! S'emporta la fillette. Je te prendrais ce que tu as par la force s'il le faut.

Malgré l'état déplorable de la fillette, il restait chez elle une flamme ardente dans son regard. Ses yeux brillaient de la rage de vivre, et de s'en sortir par tous les moyens possibles. Cependant, elle était si fatiguée et affamée qu'elle ne put cacher plus longtemps qu'elle était à bout de force. Tandis qu'Anna continuait de marcher vers elle, la fillette s'effondra par terre avant même que la jeune femme n'ait tenté de la raisonner. Anna ne put s'empêcher d'avoir les larmes aux yeux en regardant la fillette gisant au sol, seule et à l'agonie à cause de sa vie de misère. Elle ne put se résigner à abandonner l'enfant : Anna passa l'arceau de son panier et prit ensuite la fillette pour l’emmener chez elle, le temps de retrouver ses parents si elle en avait encore. En portant le corps de l'enfant, Anna s'aperçut rapidement que la petite avait de la fièvre, et qu'il lui fallait du repos ainsi qu'un endroit chaud pour qu'elle se repose. La jeune femme poursuivit sa route au travers des ruelles et arriva enfin près de sa maison, mais elle attendit d'être sûre qu'il n'y ai aucun témoin, avant d'entrer dans la maison avec la fillette dans les bras. Une fois à l'intérieur, elle commença par prendre un bain avec l'enfant et pu ainsi après l'avoir lavé entièrement, admirer chez elle de magnifique cheveux blonds comme les blés. Elle sécha et allongea ensuite la fillette dans le lit qu'elle partageait normalement avec Van, et fit bouillir de l'eau sur le feu de la cheminée pour en imbiber ensuite d'épais tissus, servant à éponger le front de l'enfant et faire tomber sa fièvre.

Anna sortit ensuite à nouveau, s'assurant les volets de la chambre fermée pour personne ne voit la fillette. La robe de la petite fille était si abîmée, que la jeune femme se risqua à user des maigres économies qu'elle et Van possédaient, afin de récupérer des vêtements en meilleur état même cela attirerait l'attention et éveillerait les soupçons, vu sa situation officielle. Le seul problème restant était la question suivante : comment apprendre la nouvelle à Van et expliquer la situation ? Ayant réussi à trouver une robe rouge et une culotte blanche à la taille de la fillette, le tout pour deux écus et sans qu'on ne lui pose de question concernant la destinataire de ces vêtements, elle commença à réfléchir à ce qu'elle dirait à Van concernant l'enfant. Après tout, il ne pouvait que se montrer compréhensif, se disait-elle. Et puis, ce n'était que le temps de trouver sa famille ou quelqu'un la connaissant et pouvant s'occuper d'elle. Elle songea que la meilleure solution restait de dire les choses comme elles étaient. Malgré sa petite escapade, elle rentrait tout de même avant Van qui semblait finir tard sa journée, et fut soulagée car elle pourrait tout lui expliquer avant qu'il ne voit l'enfant.

Entrant dans la chambre, elle changea le tissu chaud et humide du front de la fillette puis déposa les vêtements qu'elle avait achetés pour elle au pied du lit. Puis, en attendant que Van ne rentre ou que la petite se réveille, elle commença à préparer un repas à base d’œufs et de pois pour le soir. Tandis qu'elle était occupée à cuisiner, elle ne vit pas rentrer son équipier et s'aperçut de sa présence au moment où celui-ci venait d'ouvrir la porte de la chambre. Avant qu'il n'ait pu dire un mot, Anna se précipita sur lui et posa son index sur les lèvres du jeune homme, lui faisant signe de ne surtout pas parler ou faire de bruit pour laisser dormir la fillette. Elle le tira à l'extérieur de la chambre, puis referma la porte et lui expliqua d'elle-même la situation à voix basse, ne négligeant aucun détail pour qu'il comprenne bien ce qu'il se passait. Mais ce dernier n'avait pas l'air d'apprécier l'idée et le fit bien savoir à la jeune femme :

- Tu es folle d'avoir amené cette enfant ici, on est déjà dans une mauvaise situation en étant coincé dans cette ville, et tu nous ramènes encore plus de problèmes.

- Tu aurais voulu que je l'abandonne à son sort ? S'indigna Anna. Es-tu sûr que ce n'est pas toi qui as perdu la tête ? Comment aurais-je pu laisser cette fillette mourir de faim et de fatigue dans la rue ?

- Je ne dis pas que tu aurais dû la laisser tomber, mais que tu n'aurais pas dû l'amener chez nous, répondit Van. Je n'ai rien contre cette petite, mais on ne sait rien d'elle je te rappelle.

- Et alors ? Répliqua Anna. Elle reste une enfant, et on se doit veiller sur elle le temps de retrouver ses parents.

- Il se peut aussi, et même très probablement qu'on ne retrouve jamais ses parents, expliqua Van. Ce n'est pas une coïncidence si je suis revenu assez tard aujourd'hui, et la raison ne vas pas te plaire du tout.

- Mais enfin de quoi tu parles au juste ? Lui demanda Anna. Qu'est-ce qui te fait croire que ses parents seront introuvable ?

- La quinzaine de femmes exécutées il y a quelques jours, plus de la moitié étaient mère d'un ou plusieurs enfants, lui répondit Van avec tristesse et dégoût. Il y a malheureusement des chances pour que cette petite soit la fille de l'une d'entre elle. Et si la petite s'est retrouvé à vivre à la rue après l'exécution, c'est sans doute que son père est mort aussi ou qu'il l'a tout simplement abandonné.

- Dans ce cas-là si elle n'a plus de famille elle restera avec moi ! Déclara Anna d'un ton ferme. Après tout, c'est moi qui t’ai empêché d'intervenir, alors je suis responsable de son malheur et je me dois de réparer cela en veillant sur elle.

- Tu te rends compte de ce que tu dis ? Répliqua Van. Moi aussi, si la situation était différente je ferais comme toi. Mais là, si elle reste avec nous, pas moyen de quitter la ville sans se faire remarquer. Le jeune couple sans enfant qui du jour au lendemain à une fille de sept ans, et en plus une fille recherchée par l'inquisition si sa mère était l'une des victimes du bûcher.

- Comment une petite fille peut être recherchée par l'inquisition ? S'étonna Anna. Qu'elle soit recherchée pour être placée dans un orphelinat d'accord, mais par des assassins comme les inquisiteurs, dans quel but ?

Van aurait préféré éviter le sujet avec Anna, celle-ci étant encore très marquée moralement par les événements récents. Cependant, il devait lui dire la vérité concernant la petite et celle-ci allait être dur à digérer pour la jeune femme. Sachant qu'il lui faudrait beaucoup de tact et de courage pour annoncer la vérité à la jeune femme, Van prit une grande inspiration avant de se lancer dans les explications :

- Il faut que tu saches que l'inquisition à complètement perdu la raison. Leur exécution publique à tellement été bien accueillie par la population de la ville, qu'ils ont pensé qu'ils seraient encore plus appréciés en finissant le boulot.

- Qu'est-ce que tu entends par finir le travail ? Demanda Anna d'une voix tremblante. Ils n'oseraient toute même pas faire ce que je crois ?

- Justement c'est bien ce qu'ils comptent faire, répondit Van une voix écœurée. Ils n'ont pas hésité à déclarer dans toute la ville que pour le bien des habitants, il fallait aussi se débarrasser des enfants de sorcière pour éviter qu'ils ne se vengent. Et cela ne semble même pas choquer ou indigner les habitants, bien au contraire.

- Mais enfin, ils ont déjà exécuté une quinzaine de femmes qui n'étaient même pas de vrais sorcières ! S'emporta Anna. Ils ne peuvent pas mettre des enfants sur un bûcher. Si c'est le cas, ils vont devoir me tuer s'ils veulent que la petite soit exécutée ! Je sais qu'on a une mission et des ordres, mais la vie de cette enfant est tout aussi importante. J'ai encore moins de raison de me séparer d'elle maintenant que tu m'as dit ça.

- Tant que la petite passe inaperçue ça ira, mais si on découvre qu'elle est bien la fille d'une des condamnées, ça reviendra à devoir affronter une ville à seulement nous deux, lui rappela Van.

- À deux ? S'étonna Anna. Je croyais que tu étais contre le fait de garder la petite avec nous.

- C'est vrai que je suis contre, mais cela ne veux pas dire que je vais t'abandonner seule avec elle ! Répliqua Van, vexé qu'Anna ait douté de sa loyauté envers elle.

Tandis qu'ils finissaient leur discussion, le repas avait fini de cuire mais la fillette ne s'était toujours pas réveillée. Renonçant à essayer de la faire manger ce soir-là ils prirent seuls leur repas est se couchèrent à même le sol pour laisser dormir la petite fille dans le lit. Cette nuit-là, l'un comme l'autre furent tous deux prit d'un fou rire nostalgique face à la situation : cela leur rappelait leur toute première nuit dans la maison. Au matin, Anna se leva la première afin de voir comment allait la fillette et constata que même si celle-ci était toujours profondément endormie, sa fièvre était tombée durant la nuit. Le visage de l'enfant avait également reprit des couleurs et la fatigue ne s'y voyait plus. Alors qu'Anna était à son chevet, la fillette commença à émerger de son sommeil et ouvrit lentement les yeux. La petite fille mit un long moment avant de comprendre qu'elle s'était évanouie et qu'elle était bien loin de la ruelle sombre où elle avait tenté de voler Anna. Quand elle le comprit, elle se releva en sursaut, paniqué et angoissée de ne pas savoir où elle était. Voyant la fillette sur le point de hurler de peur, Anna lui mit sa main sur la bouche pour l'en empêcher et lui murmura de se calmer, qu'elle était en sécurité et qu'elle devait se faire discrète car elle était en danger en dehors de la maison.

Après plusieurs minutes, la fillette commença à se calmer et à réaliser sa situation en se voyant propre et confortablement logé, elle fini par comprendre qu'Anna ne lui voulait aucun mal et avait juste prit soin d'elle. Cependant, la fillette ne parlait pas, honteuse de la façon dont elle avait traité sa bienfaitrice la veille et aussi encore peureuse de s'ouvrir à une inconnue. Elle ne daigna que donner finalement son nom à la jeune femme : la fillette se nommait Fara. Enfin Anna avait un nom à mettre sur le visage de l'enfant, et lui donna son nom en retour avant de proposer à la fillette de mettre les vêtements qu'elle lui avait acheté. Cependant, Fara bien qu'en meilleure forme que la veille, avait encore besoin de repos et son corps affamé était encore fragile. Anna s'occupa alors de la faire manger dans la chambre pour le midi, tandis que Van lui était déjà reparti sur le chantier de reconstruction. À plusieurs reprises au cours de la journée, Anna tenta d'entamer le dialogue avec Fara, mais cette dernière n'osait toujours pas lui parler, n'ouvrant la bouche que pour la remercier et pour lui indiquer si elle se sentait bien ou non. Seulement, Anna devait savoir si la fillette avait encore quelque part où aller, et s'il lui restait de la famille. Cependant, Fara cette fois-ci, expliqua d'elle-même la situation : elle confirma le sort tragique de sa mère quelques jours plus tôt, et l'abandon de son père alors que sa mère était enceinte d'elle. Anna se mit à prendre la fillette dans ses bras et la serrer fort contre elle par compassion, surprenant Fara qui ne voulait pourtant pas de sa pitié la veille et le lui avait bien dit.

Cependant, Fara ne pouvait se défaire de l'étreinte d'Anna, non pas que la jeune femme la serrait trop fort mais à cause de la chaleur presque maternelle que ressentait la fillette en cet instant. L'après-midi fut des plus calme et Fara après avoir enfin mangé un vrai repas semblait énergique et en pleine forme. Mais les choses n'eurent pas duré longtemps lorsque Van revint en fin d'après-midi. La rencontre entre le jeune homme et la fillette fut alors la source d'un incident inattendu. La fillette intimidée par Van, restait caché derrière Anna tandis que la jeune femme fit les présentations à sa place et résuma la situation de Fara à son équipier. Mais la fillette, effrayé par le fait de faire face à un inconnu à la carrure martiale et aussi encore traumatisée par le sort funeste de sa mère, se mit à trembler sans pouvoir se contrôler. Perdant le contrôle de son corps, Fara laissa échapper de ses mains une puissante bourrasque qui balaya la pièce, tandis que Van d'un geste de la main, écarta la rafale sur ses flancs : la fillette possédait le don de la magie de l'air. Cette dernière, effrayé que ses dons se manifestent devant des inconnus, prit peur et s'enfuit de la maison avant même qu'Ann et Van ne pu l'en empêcher. Désormais, touts deux le savaient très bien, après un tel raffut ils allaient attirer l'attention de tous et devaient donc quitter la ville dès aujourd'hui ou y mourir.

Anna et Van avait une chose à faire avant de quitter la ville, ils devaient à tout prix retrouver la fillette. Ils savaient qu'en raison des pouvoirs de Fara, le destin de l'enfant était désormais entre leurs mains. Ils ne prirent que le strict nécessaire chez eux pour voyager léger, faisant leur bagage en catastrophe, et quittèrent leur maison avant l'arrivée de l'inquisition. Marchant à travers les rues du quartier, Anna était persuadée de trouver Fara là où elle l'avait rencontrée la veille et elle guida Van jusqu'à l'endroit en question. La fillette était terrorisée, son cœur s'emballait si vite et si fort qu'elle croyait qu'il allait exploser. Elle n'avait que peu d'avance sur Van et Anna mais elle voulait absolument ne pas être retrouvée par eux : elle ne voulait pas causer d'ennuis à Anna qui fut si gentille avec elle, et pensait que ses dons allait lui faire subir un sort terrible. Cependant, Fara avait réagi par peur et par instinct car elle avait causé sa perte en fuyant la maison de Van et Anna. Comme l'avait prévu le jeune homme, les répurgateurs et l'inquisition avaient commencé une nouvelle chasse. Mais Fara était si terrorisée que sa magie lui échappait dans tout les sens, attirant l'attention des chasseurs de sorcière qui la coincèrent dans une rue, et semblaient n'avoir aucune pitié envers elle malgré son jeune âge et son visage larmoyant déformé par la terreur. Mais l'inquisition ignorait que deux personnes recherchaient également l'enfant pour une toute autre raison.

À quelques mètres d'eux et ne souciant pas de la présence de témoin, Anna avait pris la pose d'une archère et faisait comme si elle s’apprêtait à tirer une flèche. Effectivement, ce fut bien son intention car une longue flèche de glace s'était formée le long du torse de la jeune femme, partant d'une de ses mains à l'autre. La flèche fila à toute vitesse à travers l'espace qui séparait Anna de l'inquisiteur qui retenait Fara, perçant le cou de ce dernier sous le regard médusé de la fillette. Van, lui aussi surprit par le comportement de la jeune femme n'aurait pas pu dire ce qu'il s'était passé dans l'esprit d'Anna : elle qui refusait de blesser avec sa magie, elle n'avait pas hésité à abattre un inquisiteur pour sauver la fillette. Était-ce par sentiment de revanche, frustrée de n'avoir pu sauver la quinzaine de femmes du bûcher, qu'elle était devenue si féroce au combat ? Ou était-ce peut-être la présence de la fillette, qui avait réveillé une sorte d'instinct maternel, transformant la jeune femme en une louve hargneuse prête à tout pour protéger ses louveteaux ? Dans tous les cas, le combat avait été engagé par la jeune femme, et Van ne pourrait pas l'éviter lui non plus.

Le jeune homme chargea le groupe ennemi, fauchant en premier les inquisiteurs à coup de rapière tranchant leur gorge, avant de s'attaquer aux deux répurgateurs restant. Van voulant éviter de révéler ses pouvoirs, frappa le torse d'un des répurgateur d'un simple coup d'estoc. Cependant, alors que celui-ci n'avait ni armure ni autre protection, la lame du jeune homme fut stoppé net au contact du corps du répurgateur. Ce dernier se mit à afficher un sourire machiavélique, tandis que Van tenta de le décapiter en visant son cou d'une puissante frappe circulaire, qui fut arrêté à nouveau par la peau de son ennemi sans qu'il n'ait besoin de parer l'attaque. Quelque chose n'allait pas dans ce combat car il était impossible que de simples humains, aient une peau plus résistante que l'acier et encaisse sans broncher une lame affûtée et extrêmement tranchante. Van eût alors la surprise de sa vie envoyant l'apparence des deux répurgateurs changer progressivement, passant d'une peau rose à un peau de cuire rouge sang avec des épines par endroit. Devant lui ne se tenait pas deux fanatiques religieux, mais deux démons qui semblaient suffisamment sûr d'eux pour montrer leurs vrais visages. Mais leur assurance fut de courte duré car caché derrière Van, Anna n'était pas restée inactive : au-dessus des deux répurgateurs flottaient des pieux de glace. Van attrapa la fillette et se recula instantanément quand il s'en aperçut, tandis que les pieux s’abattirent sur les démons, les transperçant de partout.

Pourtant, ce ne fut pas l'attaque d'Anna qui mit fin à la vie des deux démons mais eux-mêmes. Ayant compris qu'ils étaient fichus, les deux démons se percèrent le corps de leurs lames enflammées, s'immolant eux-mêmes par le feu pour ne pas laisser leur cadavre comme preuve de leur présence parmi les rangs de l'inquisition. Van et Anna prirent la fillette avec eux, et rasèrent les murs de la ville pour rejoindre la sortie la plus proche. Par chance, leur combat avec les répurgateurs n'était pas passé inaperçu et les portes de la ville furent allégée d'une grande partie de ses gardiens. Voyant enfin une occasion de quitter la ville, Van n'hésita pas à passer en force : convoquant l'âme qui sommeillait dans sa rapière, il envoya le loup de glace enfoncer les portes lui barrant la sortie. Les portes ouvertes et le peu de garde restant complètement apeurés et désorientés, ils passèrent la sortie de la ville à l'aide d'une charrette volée, et foncèrent loin de la ville le plus vite possible, avant que quelqu'un ne réagisse enfin et lance une poursuite contre eux. Cependant, tandis qu'ils fuyaient la ville, Van ne pu s'empêcher d'être inquiet de sa découverte. N'y avait-il que deux démons au sein de l'inquisition ou plus ? Combien pouvait-il y en avoir et surtout jusqu'à quel niveau de hiérarchie et de décision ? Jusqu'à quel point pouvait-il y avoir coïncidence entre le fait qu'il y ait des démons dans l'inquisition, et la capacité des répurgateurs à viser si juste quand il s'agissait de chasse aux sorcières ? Quoi qu'il en soit, Van savait qu'il devait à tout prix informer Konrad de cette information, même s'il devait abandonner à nouveau de futures victimes à l'inquisition, même si certains allaient être des enfants. Et puis, comme pour se consoler ou se chercher des excuses, il pensa qu'avoir au moins sauvé Fara compensait cet abandon.

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