A la maison

4 minutes de lecture

Pendant sa semaine à l'hôpital, Sybille avait, sans cesse gardé, un oeil sur son bébé. Un premier enfant étant toujours un évènement, elle s'inquiétait au moindre signe un peu suspect et l'épisode de l'accouchement, n'allait pas dissiper cette sensation.

***

Née un 5 décembre, Gaëlle est de bonne constitution avec ses 3,5 kg et ses 56 cm. C'est un nourrisson calme, d'humeur joyeuse et dotée d'un appétit insatiable.

***

De retour chez eux, Max s'empresse de montrer à son épouse, la transformation de leur débarras encombré en une chambre pour enfant. L'antique commode des grands-parents, servant de fourre-tout, a été débarrassée d'une multitude d'objets quelconques et placée à droite de l'entrée. En face, se trouve un coin à langer avec sa chaise et au centre de la pièce, trône le petit lit appartenant à sa belle-mère et prêt à accueillir le nouveau-né.

Dès que Sybille y pénètre avec Gaëlle dans les bras, elle est tout de suite enchantée par l’aménagement de la pièce et dépose un tendre baiser sur la joue de son époux, puis profite du sommeil de la petite pour la coucher dans les draps bien chauds. En silence, les parents sortent de la chambre et Max descend au rez-de-chaussée, tandis que son épouse range ses affaires dans leur garde-robe et se met à l'aise.

À peine, ses vêtements retirés, des gargouillis s'entendent dans la chambre contigüe. De sa bouche en forme de cœur, Gaëlle fait des bulles de salive tout en riant dès qu'elles éclatent. Mais tout à coup, son visage devient pâle, son corps se raidit, ses grands yeux bleus se révulsent et l'espace de quelques secondes, ses membres ont des secousses musculaires.

— Voilà, voilà, j'arrive mon petit boutchou. La maman entre dans la pièce juste après l'incident et trouve sa fille endormie.

« Tiens, il me semblait t'avoir entendue ? » Pense-t-elle, caressant le visage de son enfant, dont le front un peu chaud et une forte respiration l'étonne. Tout en délicatesse, elle ôte l'épaisse couverture posée sur le drap, songeant que la petite est trop couverte et la range avec d'autres affaires dans l'ancienne commode. D'habitude, Le tiroir du haut coince un peu, mais cette fois-ci, il résiste, elle tire de toutes ses forces et l'ouvre d'un coup, dans un grand fracas. Aussitôt, le nourrisson se met à pleurer, pleurer si fort, que sa mère ne résiste pas à la tentation de le sortir du lit pour le bercer et enfin, réussir à le calmer.

— Oh ! Mon petit ange, je suis vraiment désolée. Quelle idiote je fais. S'excuse Sybille auprès de son enfant. À présent que je t'ai réveillé avec maladresse, veux-tu ton lait ? dit la maman qui s’installe sur la chaise et déboutonne son corsage, pour donner le sein à son enfant. D’instinct, le nourrisson se dirige vers le mamelon et plonge son regard dans celui de sa mère. Au cours de ce tendre tête-à-tête, toute une gamme d'émotions défile dans leurs yeux respectifs. Cet instant, d'extrême douceur, submerge le cœur de la maman.

Tout juste rassasiée, Gaëlle grimace et se tortille puis se met à pleurer. Sybille positionne alors son enfant à la verticale et l'appuie contre son épaule, qu'elle recouvre d'un bavoir. De sa main droite, elle soutient le derrière du nourrisson et de la gauche, frotte son dos, dans l'attente d'un rot salvateur. L'enfant se contracte, émet une sorte de hoquet et, dans un grand jet, régurgite son lait, en partie sur le bavoir et le sol.

« Eh bien ma petite, que se passe-t-il ? C’est déjà la deuxième fois, aujourd’hui. Bois-tu trop vite ? » S’interroge-t-elle en essuyant la bouche de l’enfant avant d’ôter son lange et de la remettre au lit.

Tout en nettoyant le sol, elle se rappelle avoir été prévenue que cela pouvait se produire, mais à condition de ne pas être trop répétitif. Petit à petit, un certain malaise s'insinue dans son esprit et en quittant les lieux, elle effleure de ses doigts, le doux visage de sa fille, puis emprunte l'escalier vers le rez-de-chaussée et rejoint son époux au salon.

— Comment s'est passé cette première tétée à la maison ? Questionne le papa qui dépose son journal sur les genoux et tourne sa large tête vers son épouse.

— Mitigée, elle a remis tout son lait, ensuite s'est rendormie.

— Oh ! Pauvre petit ange. Il y a un souci, tu crois ?

— je ne sais pas trop. Répond-elle et Sybille tourne les talons pour se rendre à la cuisine, sans attendre une éventuelle réponse de son époux, dont le front se plisse en la suivant du regard.

En soirée, tout se passe au mieux pour la petite Gäelle, qui digère à merveille son lait. Rassurée, la maman se dépêche de la changer avant qu’elle ne plonge dans les bras de Morphée et remarque l’apparition de quelques gros boutons sur ses fesses. Son talc à portée de main, elle l’applique sur la région irritée, rhabille la petite et la recouche.

  • Dans le petit salon, un téléviseur au tube cathodique, diffuse une émission de variétés en noir et blanc. Assis dans un fauteuil rembourré aux couleurs vives, Max, intéressé par ce qu’il voit, ne remarque pas de suite, que son épouse a pris place sur le divan jaune, capitonné, près du poêle à bois, qui crépite.
  • Notre petite, a-t-elle mieux supporté son lait ? Demande-t-il en se levant pour prendre une bûche, situé dans une niche, près de la porte d’entrée et l’ajouter au feu.

Pendant la nuit, Sybille, dont le sommeil est léger, croit percevoir des sons incongrus. Elle se glisse hors du lit, s’emmitoufle d’un peignoir épais, chausse ses pantoufles et avance sans bruit sur le plancher, pour ne pas réveiller Max.

À nouveau, Gaëlle est prise de courtes convulsions, un mince filet de salive coule le long de son menton, de petites gouttes de sueur perlent sur son front et ses mouvements désordonnés l’ont entièrement découverte. Tout est déjà terminé lorsque Sybille pénètre dans la chambre. La petite dort tranquillement et ne réclame même pas à boire. Elle essuie son front et sa bouche puis la recouvre simplement d’un drap, croyant que l’épaisse couverture est la cause de son état.

Annotations

Vous aimez lire Gini ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0