Les réfugiés s'ennuient ferme à bord du P.E.T. « Vous voulez une histoire ? demande le soldat Bassine. Ça concerne le président Donaldson.

 — C'est un secret d'État ? dit Rick.

 — En quelque sorte. En fait, le président Donaldson a un âne. Il s'appelle Trompette, et il l'aime beaucoup. Un jour, Trompette décide de prendre l'air jupitérien. Vous connaissez Donaldson, il envoie des gardes du corps et tout le tintouin. Donc l'âne était protégé par des gorilles...

 — Le président a des gorilles ?

 — Non, par "gorilles" j'entends des armoires à glaces.

 — Ça n'a pas de sens.

 — Je vous demande pardon ?

 — Soldat Bassine, comment diable des frigidaires peuvent-ils protéger un âne ?

 — Ce ne sont pas des frigos, shérif Storm. Ce sont des mecs baraqués.

 — Mais qui donc ?

 — Les gardes du corps, putain !

 — Ne me bassinez pas, Bassine. Bref, qu'est-ce qui est arrivé à Trombone ?

 — De un, c'est Trompette. Et de deux, je n'ai plus envie de vous raconter. Je ne suis pas là pour amuser la galerie. L'A.N.U.S. est en mission officielle pour le sauvetage de Mars.

  — En parlant de Mars, intervient Cathy, je crois que nous faisons fausse route. Je viens de voir un panneau qui indique "Saturne."

 — Ce n'est pas une erreur, répond calmement le soldat Moon.

 — Alors, quoi ? On ne va plus sur Mars ?

 — Si. Mais d'abord, on doit faire les courses. »

 Kate sort un papier froissé de sa poche. « J'ai la liste de tout ce qu'il nous faut avant d'attaquer nos ennemis. Il y a cinq jours de voyage jusque Mars : vous croyiez quoi ? Qu'on allait manger nos pieds ?

 — Et vous ne pouviez pas faire les courses avant de partir ?

 — Et puis quoi encore ! Vous avez vu les prix, sur Jupiter ? Quarante dollars les deux rouleaux de sopalin. C'est du vol, voilà ce que c'est. Je connais les bons plans : vous pouvez dire ce que vous voulez sur les anneaux de Saturne, leurs supérettes restent les meilleures. Ne vous inquiétez pas, shérif Storm. Ça ne prendra pas longtemps. »

 « Deux jours plus tard » écrit en surimpression. Plan d'ensemble sur Saturne. On voit l'escarpin géant se propulser depuis les anneaux. « C'est bon ? dit Rick. Vous avez tout ce qu'il vous faut ?

 — Je crois que oui, répond Kate Moon. Des crackers, du fromage, deux côtes de porcs, du homard, des rillettes de thon, du lait, des oranges, des pommes, de la farine, une pince à épiler, des magasines de cul, et... Attendez. Où est le café ? Ah. C'est bon, il était juste caché en dessous du sac. J'ai eu peur : je suis de ce genre de personne qui ne peuvent RIEN faire sans leur café. Que voulez-vous ! Je carbure au café. Je pense café. Je vis café. Vous ne trouverez pas plus café que moi. D'aileurs, vous saviez que le café venait de la Terre ? lI a été découvert en 1874 par un certain Orson Welles — celui qui a inventé la luge, d'après mes souvenirs —, et depuis les hommes ne cessent d'en boire. Le 17 août 1924, Georges Washington aurait même déclaré : "Couleur, café. Que j'aime ta couleur, café." Incroyable, non ?

 — Vous savez ce qui est incroyable, Moon ? C'est d'être conne à ce point. »

 Le Propulseur Énergétique Transsidéral emprunte l'astroroute 75. « Est-ce que l'escouade Tempête a un plan d'attaque ?

 — Bien sûr, dit Wrecklerton. Nous l'avons mis au point avant le P.E.T. ne sorte du siège de l'A.N.U.S. Nous y avons passé beaucoup de temps, shérif Storm.

 — Et en quoi consiste-t-il ?

 — Chaque chose en son temps, souffle Chuck Chuck.

 — Vous avez raison, dit Rick. D'abord, lavez-vous les dents. »